J’étais 100% offline pendant LeWeb 2008. Mon laptop à la maison, mon smartphone au vestiaire, pas de Twitter (que je n’utilise pas…). Mais je couvrais l’événement comme photographe amateur, invité par l’équipe organisatrice et par le truchement de Jean-Marie Hulot de Fotonauts.
Pendant ce temps, la moitié de l’audience de la conférence LeWeb 2008 twiterisait en direct sur ses laptops et mobiles. J’avais l’impression d’être dans un monde parallèle, sorte de conférence des utilisateurs de Twitter. Cet outil est un véritable phénomène et surtout une addiction qui pousse à tout faire en temps réel. Le royaume de l’instantané où le futile se mêle à l’utile. Twitter permettait de suivre en temps réel les avis sur la conférence, ses déboires que nous verrons et l’envoi de pointeurs divers. Sur les tables et dans les rangs, il y avait aussi beaucoup de Macs, quelques netbooks, quelques PC sous Linux, et aussi pas mal de participants en train d’écouter et surpris en train de coder une page web en PHP ou du code Java.
Mais l’Internet ne fonctionnait pas vraiment bien le premier jour de cette conférence. Le web était donc partiellement offline. Offline l’étaient également certaines conversations, au sens où j’ai pu glaner beaucoup plus d’informations sur l’état des lieux de la startuposphere dans des meetings informels que dans les sessions de la conférence elle-même.
Le thème cette année était “Love”. Vaste programme, assez incongru au vu des préoccupations des entrepreneurs, mais malgré tout visible en filigrane dans certaines des interventions.
Que dire de cette conférence ? Bien, c’est toujours un must, avec ses hauts et ses bas. Ces derniers constitueront l’un des souvenirs clés, au même titre que les interventions des politiques en 2006, qui avaient valu quelques points de vie à Loic Lemeur. Mais tel un phénix, il renait chaque année et repart de plus belle. Et il a raison de ne pas se laisser démonter par l’adversité.
Les plus de l’édition 2008
Alors, voici en vrac ce que j’ai trouvé de bien cette année :
- Même si ils ne nous ont pas transportés, il y avait quelques bons speakers dans la conférence: le professeur David Weinberger de Harvard, qui nous a délivré sa vision de l’évolution du leadership à l’ère du web, nécessairement distribué et de l’information disséminée. Il y avait aussi Helen Fisher, professeur dans l’université Rutgers (NJ, USA), sur la chimie de l’amour où l’on apprend, bon sang de bonsoir, que l’amour n’est qu’une simple succession bien décodée de réactions chimiques à base d’hormones diverses, avec des variations d’un individu à l’autre. Il était frappant de voir le sérieux de l’audience écoutant cette présentation. On pouvait également être marqué par cette intervention de Morten Lund (ci-dessous), un investisseur danois connu pour avoir financé Skype, et qui racontait ses déboires récents, un investissement à fond dans un projet de média qui a mal tourné et l’a ruiné. Au point de devoir vendre sa maison. Le gars qui se présente comme “Chief ideologist” de son fond d’amorçage LundXY parait quelque peu allumé; mais il faut des originaux dans ce métier ! Il y avait aussi Joichi Ito, le patron des Creative Commons.
- Il y avait aussi Pierre Chappaz de Wikio qui nous a fait un exercice de transparence assez rare dans ce business: présenter l’intégralité de “ses chiffres” : audience, chiffre d’affaire, profitabilité. On y apprend que son rythme actuel de CA est d’environ 2m€ par an, pour 10 millions de visiteurs uniques mensuels (dont 30% en France). Ce qui lui permet d’être à l’équilibre. En creux, cela nous rappelle qu’il est pour l’instant à un ARPU annuel de 0,2€ par visiteur mensuel, ce qui est très faible. Et que donc, il n’y a pas beaucoup de places pour les désintermédiateurs de contenus de son genre ! Au passage, on notait quelques piques liées à NetVibes et aux différences de point de vue sur la monétisation de ce site entre Tariq Krim (fondateur, ancien CEO) et Pierre (ancien DG).
- Les présentations des startups se sont faites dans de meilleures conditions au niveau de la salle et de l’audience qui était plus nombreuse que les années passées. Il y avait néanmoins cet éternel problème de la connexion Internet qui ne fonctionnait pas. Ce qui rappelle qu’il faut toujours avoir une bonne démo enregistrée ou sous forme de slides dans le cas fort probable où cette situation se produit ! Une trentaine de startups présentaient leur pitch devant un jury composé de sponsors (Microsoft, Google), VCs (Partech) ou bloggeurs (l’inévitable Robert Scobble). L’intégration de ces présentations avec la session plénière passait par des compte rendus du jury intéressants. Au bout du compte, les gagnants ont été Viewdle, Webnode et Zoover. L’ukrainien Viewdle est un projet maintenant “classique” de reconnaissance des visages dans les vidéos. Classique au sens où pas mal de techniques de reconnaissance de visages ou d’images similaires donnent lieu à la création d’innombrables startups qui, faute de pouvoir sérieusement concurrencer Google, attaquent une niche de marché, ou le marché des entreprises. Viewdle n’est pas inconnu car on l’a déjà vu à TechCrunch40 en septembre 2007, et il a aussi gagné le prix de la meilleure startup de Plugg Web 2.0. Cerise sur le gâteau, les startups gagnantes se sont vues décerner leur prix par Christine Lagarde. Les startups étaient également à l’honneur dans les coursives de la conférence, et en particulier sur les stands de l’incubateur Paritech qui présentait neuf de ses poulains et sur la zone Microsoft qui en faisait autant. Une bonne initiative de ces deux acteurs qui au passage avaient financé la participation à la conférence pour leurs startups. Une initiative qui mériterait d’être répliquée ailleurs, chez d’autres incubateurs et organisations qui accompagnent les startups. Pour terminer, il est bien dommage que les pitches des startups ne soient pas enregistrés et que le site de la conférence ne comprenne pas de descriptif des sociétés et de ce qu’elles recherchent comme financement.
- Evidemment, on participe à LeWeb pour rencontrer du monde plus que pour écouter des orateurs. Et là, c’est un “best of” en Europe dans le genre. Côté France, nombreux entrepreneurs vedette étaient là et/ou intervenaient (Simoncini de Meetic, Kociusko-Morizet de Price Minister pour n’en nommer que quelques uns). Nos habitués VCs et Business Angels étaient également de la partie. J’ai pu rencontrer de nombreux jeunes entrepreneurs se lançant et cherchant des fonds, un grand classique. Et aussi rencontré des entrepreneurs expérimentés, telle que Catherine Barba de CashStore. Il y a deux ans, la moitié de son chiffre d’afaire provenait de la commercialisation de ses données (profils d’achat de ses utilisateurs). Maintenant, 75% de son CA proviendrait de la vente de services aux grands sites de ecommerce pour les aider à les rendre plus efficace. CashStore et le Cybermonday sont donc des outils de promotion pour se crédibiliser. Une belle illustration du glissement des modèles économiques vers l’entreprise et vers la génération de CA. L’exigence de faire du chiffre d’affaire, sur toutes les lèvres des startupers !
- Loic nous a repris son habitude de modifier l’agenda au dernier moment et d’y injecter des politiques français. Nous avons eu droit à Eric Besson (voir plus loin) et à Christine Lagarde, s’exprimant parfaitement et intégralement en anglais. Elle a de la classe et elle maitrise son sujet ! Nous avons eu quelques rappels sur les bénéfices de la loi TEPA sur l’investissement dans les startups. Mais nos bizarreries fiscales françaises où l’on fouette et l’on caresse à la fois sont toujours incompréhensibles pour pas mal d’étrangers.
- Le thème de la conférence était Love. Ce qui me donne un prétexte pour signaler qu’il y avait beaucoup de jolies femmes dans cet événement. Et pas que dans les métiers de la communication ou des médias. On retrouvait notamment l’incontournable Anina (ci-dessous), mannequin bloggeuse entrepreneuse (Fashion 360 et Anina.net) dont les coiffures et tenues changent radicalement chaque année. Autre phénomène : le métier de caméraman professionnel est devenu féminin. J’ai y compté bien plus de femmes que d’hommes (plus bas). Et en effet, l’appellation anglaise du vestiaire était incorrecte (Cloack Room au lieu de Cloak Room), mais les hôtesses étaient fort jolies et sympathiques. Alors, pourquoi toujours râler ?
- Parlons communication justement. Certaines interventions dans la conférence rappelaient fort à propos le rôle du “body language” dans la communication. Que ce soit avec Christine Lagarde, déjà citée, ou avec Marc Canter ou bien Chris Anderson de TED qui déambulait dans l’allée au milieu des participants pendant son speech. Par contre, pas facile de bien parler enfoncé dans un canapé. A l’envers, les présentations derrière le pupitre et à lire un script étaient évidemment moins efficaces. Notamment pour les startups gagnantes du concours.
- Le streaming vidéo live de la conférence par Ustream, permettant à autant de participants (gratuits) de participer de chez eux qu’il y avait de participants sur place.
Les moins
On connait la pyramide des sources de motivation de Maslow : en bas, les besoins basiques (se loger, se chauffer, se nourrir) et en haut, les besoins sociétaux (travailler, reconnaissance des autres, se réaliser, etc). Et bien, à LeWeb, le bas n’était pas au rendez-vous et créait une distraction empêchant de se concentrer sur le haut. Il n’y avait pas assez à manger (déjeuner, pauses), ni à boire (interdit de boire entre les pauses…). Alors, “amour et eau fraiche” ? Pas vraiment car l’eau fraiche était rare. Pourquoi donc ? Visiblement, il y a eu un malencontreux changement de traiteur ne sachant pas allier qualité à quantité et la commande était insuffisante (800 “couverts” auraient été commandés selon le traiteur alors qu’il y avait 1400 présents). Leweb était connu pour sa “bonne bouffe”. Bien, il a perdu cela. Il faisait aussi froid dans cette grande halle reconvertie. Il faut dire qu’avant sa réhabilitation, ce bâtiment abritait le service municipal des Pompes Funèbres parisiennes ! Enfin, l’accès Internet wifi ne fonctionnait pas bien le premier jour. La faute à Swisscom qui l’a installé ? A un bâtiment avec une infrastructure métallique pas encore testée pour ce genre d’événement ? En tout cas, l’accès Internet par câble réseau fonctionnait sur les premiers rangs réservés à la presse et aux bloggeurs.
L’intérêt de la conférence était sinon inégal, notamment du fait d’un poids trop fort des sponsors (Microsoft, Google, MySpace, Orange) dans les interventions (bon CR sur le blog Bibrik). L’intervention le second jour de Marisa Mayer qui dirige la R&D de Google était un peu au dessus du lot, tant par son contenu que par le charme de celle qui incarne d’un air angélique une société qui en même temps fait peur à pas mal de gens (ci-dessous). Il n’y avait pas d’orateur marquant tel que Hans Rossling (que Lemeur ne pouvait pas faire venir une troisième fois…). Il était aussi bien délicat de cadrer toutes les interventions autour du thème de l’amour. Au final, la conférence était assez ennuyeuse. “Boring” selon le très sarcastique et british Guardian, qui ne comprend pas comment un petit frenchie a pu lancer l’événement le plus important du web en Europe. Et qui élabore une théorie du complot selon laquelle l’Internet ne fonctionnait pas pour empêcher la presse de dire du mal de l’événement. Ah, c’était de l’humour british ! Heureusement que Le Monde est là pour un compte-rendu plus factuel de l’événement. Et le Blog de 20 Minutes qui rassemble la couverture de blogs sur les déboires de l’événement.
Enfin, l’intervention d’Eric Besson le début du second jour, parlant en français après une courte introduction en anglais. Arguant du protocole qui exigerait qu’un ministre français s’exprime en français dans les événements en France. Protocole visiblement transgressé par Christine Lagarde, ce qui est tout à son honneur. Pourtant, Besson est aussi un transgresseur ! Mais pas dans ce cas là. Cela faisait peine de voir le Secrétaire d’Etat en charge du numérique persister dans son erreur d’appréciation des facteurs de succès des startups, mettant en avant les infrastructures (haut débit) alors que pourtant, la SV n’est pas franchement très bien équipée de ce point de vue là. Le point essentiel étant d’avoir des stratégies mondiales pour les acteurs ! Mais la symbolique de sa présence était tout de même utile. Tout comme l’engagement de l’Etat autour du numérique, même s’il n’est pas encore porté par l’Elysée de manière bien visible.
Les photos !
Et oui, j’étais aussi là pour prendre des photos. Vous trouverez mon tableau de chasse sur Picasa Web Album ainsi que, trié par catégorie, sur Fotonauts dont voici un best of :
Toutes ces photos ont été prises sans flash, avec un Canon EOS 5D. En attendant la disponibilité de l’EOS 5D Mark II qui repousse plus loin la sensibilité du capteur, très utile pour ce genre de situation !
Mais…
Ne jetons pas la pierre à Loic et Géraldine Lemeur. Il est toujours difficile d’organiser un tel rassemblement, de ménager les susceptibilités, d’avoir des sponsors, de satisfaire les attentes de personnes venant de plus de 30 pays. On aurait pu ne parler que de la crise comme dans de nombreux autres événements (cf SF Valley). On a parlé de la crise, mais pas que de cela et avec une approche plus optimiste. J’admire toujours le courage des Lemeur qui s’engagent, qui ont la foi, qui prennent des risques (notamment en termes de communication).
On va avoir certainement droit comme en 2006 à un long mail d’explications de Loic, s’excusant platement des erreurs commises cette année et promettant qu’on ne l’y reprendra plus. Et il reviendra à la charge l’année prochaine.
LeWeb, c’était finalement comme l’amour (au sens émotionnel). Ca fait souffrir. Mais c’est vachement bien quand même au bout du compte car il y a derrière une passion qui fait avancer, qui obnubile. Et c’est ce dont a besoin ce petit monde de l’entreprenariat.
Edité le 12 décembre 2008. Et le post d’explications de Loic et Géraldine est arrivé ce matin
Reçevez par email les alertes de parution de nouveaux articles :
Au sujet de wikio et de la “transparence” connait-on le nombre de visiteurs en provenance de Google ?
Le service de wikio est contesté par de nombreux blogueur, wikio étant accusé de monétiser le contenu des blogs indexés en reverser les dividendes.
Plusieurs polémiques ont eu lieu et ne manqueront pas de se produire de nouveau (surtout que la défense de P. Chappaz à été jusqu’à présent : “oui mais nous en gagnons pas d’argent” …)
Question donc : et si Google – s’appuyant sur la demande de blogueurs – déclassait wikio. Quelles seraient les conséquences économiques ?
Au sujet de la connexion wifi, elle fonctionnait plutôt pas mal dans les salles adjacentes de la salle de conférence.
Globalement, je dirais que l’évènement avait plutôt lieu dans la salle que sur les estrades, mais peut-être que c’est parce qu’il n’y avait rien de bien nouveau sous le soleil, que le “réseautage” devenait si appréciable
@Laurent : en fait, tous les sites web dépendent peu ou prou de Google et de son PageRank. Par contre, Wikio me semble assez respecteux des bloggeurs car il n’extrait de leur prose que les premières lignes et envoie ensuite le trafic chez eux. Et je ne me rappelle pas avoir vu des données sur l’origine du trafic dans les slides de Pierre.
@Captain : indeed. Et c’est d’ailleurs assez classique dans la plupart des conférences. Finalement, rares sont celles où le contenu prime sur le réseautage.
Merci pour cet intéressant compte-rendu.
La qualité des photos en intérieur sans flash me semble fort bonne, en tous cas à la résolution où on peut les voir (jusque 1067×1600 sur Picasa). J’imagine que vous avez travaillé à 1600 voire 3200 ISO. Ça donne envie de passer au capteur plein format. Quel objectif avez-vous utilisé ? Est-il stabilisé optiquement ?
Vous avez en effet photographié de fort jolies femmes, je découvre un autre intérêt commun 🙂 . Mais pourquoi avez-vous pris, comme illustration dans votre billet, une photo de la ravissante Marisa Meyer où elle est relativement ratée ?
Pour Marisa, je trouvais la gestuelle intéressante. Comme indiqué dans mon texte, c’est un élément déterminant d’une bonne photo. Sur Fotonauts et Picasa, j’ai placé 14 photos de Marisa dans lesquelles chacun trouvera son bonheur !
Côté technique : les photos sont toutes prises à 12.6 mpix et converties automatiquement par Picasa en environ 3 mpix. Ca ne change pas grand chose à la perception du rendu.
J’utilisais un un mix d’objectifs à grande ouverture (comme le 50 mm 1.4) et d’objectifs à faible ouverture (comme le télé 100-400mm 4.5-5.6 qui est stabilisé). Les sensibilités allaient de 500 à 1600 ISO et j’ai évité le 3200 ISO, trop bruyant. 500 à 800 ISO pour les photos des intervenants et 1600 ISO pour les photos dans la salle.
Les meilleures photos sont prises au télé 100-400, qui est donc très moyen côté ouverture, mais apporte un bon piqué. C’est la qualité du capteur full frame du 5D, même s’il est maintenant dépassé par des appareils plus récents comme les Nikon D700 ou D3, ou par le 5D Mark II.
Je travaillais la plupart du temps en mode manuel pour éviter des erreurs d’exposition, classiques lorsque l’on utilise le mode automatique sur des photos de scène très éclairées.
Les photos sont en partie des RAW retraitées en JPEG via Photoshop CS3. Pour d’autres, le JPEG de l’appareil tel que (avant compression pour Picasa).
Cet équipement est loin d’être parfait pour ce genre de photos. Il vaudrait mieux avoir un 70-200mm IS USM 2.8 et un 24-70mm également à 2.8, sans compter un 5D II dont la sensibilité ISO est quasiment du double de celle du 5D avec une résolution de 21 mpix vs 12,6 mpix pour le 5D. Peut-être pour LeWeb 2009 ! Avec cela, je gagnerai au moins 2 à 3 ouvertures, donc plus grande vitesse, moins de flou et un meilleur piqué de l’image. Sans compter un capteur 14 bits au lieu de 12 bits, permettant un rattrapage plus fin des fichiers RAW.
Voilà un évènement que j’avais repéré mais impossible d’y être , donc merci olivier. Les photos sont d’excellentes facture
Le service de wikio est contesté par de nombreux blogueur, wikio étant accusé de monétiser le contenu des blogs indexés en reverser les dividendes.
Best Buy Cheap Price