Le 22 octobre 2014 avaient lieu trois événements reliés de près ou de loin à l’initiative fédératrice de la FrenchTech :
- Les Rencontres Internationales de la FrenchTech organisées par UbiFrance et l’AFII.
- La pose symbolique de la première pierre de 1000 Startups à la Halle Freyssinet, le plus grand incubateur au monde lancé par Xavier Niel, et en présence du Président de la République.
- L’événement CES Unveiled de Paris présentant en avant-première quelques startups françaises qui lanceront leur produit au CES de Las Vegas en janvier 2015.
Le point commun de ces trois événements était de mettre en valeur la dimension internationale de nos startups et de notre écosystème d’innovation numériques. Le premier événement, explicitement destiné à partager les bonnes pratiques des entreprises innovantes à l’international, le second créant une première mondiale avec le plus grand incubateur au monde, faisant de Paris une place remarquable et remarquée en matière d’entrepreneuriat, et le dernier illustrant un développement sans précédent des startups dans le secteur des loisirs numériques et des objets connectés. Au point de faire de l’ombre à tous les pays européens présents au CES !
Cela faisait plaisir à voir. Entrain, dynamisme, et aussi de nombreuses innovations au rendez-vous aussi bien côté startups qu’au niveau de l’écosystème, avec 1000 Startups.
Je vais ici reprendre chacun des trois événements et ensuite les relier entre eux par un fil conducteur qui a démarré il y a quelques années déjà sur l’internationalisation de l’écosystème français des startups.
Rencontres Internationales de la FrenchTech
Cette conférence n’est pas nouvelle, seul son nom l’est. Il s’agissait avant des Rencontres Internationales du Numérique ’Ubifrance. J’ai eu l’occasion de faire le compte-rendu de l’édition 2010 de cette conférence. A l’époque, le UbiFrance “bashing” était plutôt légion chez les startups. Elles se plaignaient d’une offre de services peu adaptée à leurs besoins. Ce bashing a baissé de plusieurs tons depuis. UbiFrance s’occupe bien mieux des startups aujourd’hui et en coordination avec les pôles de compétitivité et autres structures de l’écosystème numérique français.
Cette conférence sponsorisée par des entreprises privées (IBM, BNP Parisbas, Air France, Microsoft, …) est l’occasion de croiser et d’entendre à la fois les responsables d’Ubifrance dans de nombreuses régions du monde et des entrepreneurs qui se sont implantés à l’international. Les trophées de l’international du numérique de l’IE Club organisés depuis une dizaine d’année mettaient ici en valeur 17 PME innovantes, très souvent peu connues.
Les “best practices” fusaient de toute part. C’est un des rares endroits où en une journée, on peut apprendre énormément de choses sur les opportunités qui existent dans chaque région du monde et comment les aborder. Comme Ubifrance est implanté un peu partout dans le monde, ils ont tendance à vouloir systématiquement rappeler qu’il ne faut pas penser qu’aux USA dans son développement international.
L’une des tables rondes les plus marquantes concernait l’Asie, animée par Alexandre Zapolsky de Linagora et de la commission internationale de Syntec Numérique. Elle rappelait l’attractivité de ce continent, dans la lignée de quelques observations faites lors de mon récent passage à Tokyo : il y a en belle place à prendre en Asie pour les entreprises françaises. Qu’il s’agisse de la Chine, de Taïwan, de la Corée du Sud ou du Japon.
Jean-Marie Giraudon de SSL Europa expliquait ainsi comment il avait, après deux ans d’investissements et de patience, pu pénétrer le marché chinois avec ses solutions de sécurisation et de signature électronique. En plus de la Chine, la société est aussi implantée au Vietnam et en Australie. Advanced Track & Trace. Expérience similaire avec Jean-Pierre Massicot de Advanced Track & Trace qui est aussi implanté en Chine et va y déployer un système de traçabilité alimentaire en partenariat avec la société chinois Wan Cheng. Netgem, le spécialiste des box TV d’opérateurs, s’est implanté à Singapour pour à la fois gérer son plus gros client, Telstra en Australie, ses fournisseurs à Taïwan, et gagner de nouveaux clients, comme au Sri Lanka.
Les clés de la réussite dans les différents pays ont été évoquées. Exemple avec le Japon, un pays friand en innovations où il faut savoir se différentier, respecter les coutumes et les normes locales et, un peu comme en Chine, savoir faire appel à des intermédiaires locaux pour créer une relation de confiance. Il y avait aussi une belle intervention de Bruno Bonnell, dans un robot de téléprésence Awabot alors qu’il était à Lyon, expliquant de manière très synthétique les différences clés entre les différents pays d’Asie (lenteur au Japon, rapidité en Corée, etc).
David Monteau rappelait dans la conférence Ubifrance les trois objectifs de la French Tech qu’il coordonne avec Clara Deletraz à Bercy : labelliser les métropoles, développer l’offre d’incubation et d’accélération privée et surtout, renforcer l’attractivité internationale de l’écosystème français des startups. En clair, surtout aider les entreprises françaises à exporter. Ce dernier point, très étroitement relié au premier, est le plus important pour développer l’écosystème. Le marché des startups est généralement le monde. S’il ne l’est pas, leur croissance n’ira pas bien loin. David Monteau insistait aussi sur l’aspect collaboratif de la FrenchTech. Son organisation l’illustre bien : ils ne sont que deux à Bercy pour la coordonner. Ils s’appuient sur Bpifrance pour gérer le budget de 215 millions d’Euros ventilés à 200 m€ dans le financement en fonds propres d’incubateurs, accélérateurs et fablabs et à 15 m€ pour la dimension communication internationale.
Hervé Schrick de Xange Private Exity et de l’AFIC (Association Française des Investisseurs pour la Croissance) indiquait que le potentiel de développement international est l’un des principaux critères de décision d’investissement dans une startup.
Gaël Duval a annoncé la réédition de la “French Touch Conference” de New York de juin dernier. La prochaine édition aura lieu les 24 et 25 juin 2015. L’objectif sera notamment d’y attirer plus d’investisseurs, médias et intervenants américains de l’écosystème de l’innovation du coin.
Paul-Francois Fournier de Bpifrance rappelait que le succès de la banque publique d’investissement passera par l’international. Il en profitait pour mettre en avant la création récente du pass FrenchTech qui vise à simplifier l’accès aux différents services publics pour les startups de forte croissance. La sélection des startups est gérée par les pôles de compétitivité et en collaboration avec la Coface, l’INPI, Bpifrance, Ubifrance et les investisseurs. Je participe à l’un des comités de sélection de startups chez Cap Digital, ce qui me donne un point d’observation intéressant.
Axelle Lemaire, Secrétaire d’Etat au numérique, clôturait la matinée en se félicitant du dynamisme de la FrenchTech et en rappelant quelques mesures clés qui vont contribuer à la faire rayonner à l’international, et notamment le visa entrepreneurs en cours de création.
Je n’ai pas assisté à toute la conférence, étant parti pour les deux autres événements de la journée. Elle se poursuivait l’après-midi avec trois tables rondes : sur l’export en Europe (UK, Allemagne, Russie), sur le financement du développement international et sur l’export dans d’autres zones et notamment l’Inde et l’Afrique. Elle se terminait avec la projection du film “We love entrepreneurs” réalisé par Frenchweb. Le lendemain, les PME et startups pouvaient rencontrer les experts d’Ubifrance pour étudier leurs projets de développement international. Cette conférence annuelle est un des rares endroits où les startups peuvent apprendre des choses concrètes pour se développer à l’international ! D’où son succès grandissant.
Cf mes photos de cette conférence dans le plugin Photo-folders installé dans mon blog depuis juillet 2014, ici pour l’occasion avec son interface en version anglaise. Vous pouvez aussi y accéder en cliquant sur les photos intégrées dans l’article.
1000 Startups
Second événement marquant de cette semaine, la pose symbolique de la première pierre de la Halle Freyssinet par Xavier Niel, François Hollande et Anne Hidalgo.
En guise de première pierre, il s’agissait de trois logos bleus imprimés en 3D par les équipes de l’Usine IO, le fablab le plus avancé de la région parisienne, installé à deux pas de la Halle Freyssinet et qui sera aussi en charge de la création du fablab intégré à la Halle. Normal, vu que Xavier Niel est l’un des principaux investisseurs dans l’Usine IO ! (cf quelques photos du lieu).
Beaucoup de personnalités étaient présentes à cet événement, et notamment Axelle Lemaire et Fleur Pellerin, un grand nombre d’entrepreneurs, notamment parmi ceux qui ont été financés par Xavier Niel directement ou via son fonds Kima Ventures, les fondateurs et des élèves de l’école 42, une autre des initiatives de Xavier Niel, Jacques-Antoine Granjon (qui, avec Xavier Niel et Marc Simoncini, est à l’origine de la création de l’EEMI, une école qui forme aux métiers du web), l’architecte Jean-Michel Wilmotte et son équipe, Jean-Louis Missika (Maire-Adjoint de Paris en charge de l’urbanisme et de l’innovation), etc. A lui tout seul, Xavier Niel a créé un véritable écosystème entrepreneurial qui démarre dans l’enseignement, se poursuit dans le financement et couvrira avec 1000 Startups les phases d’amorçage et d’incubation des startups.
Dans leurs discours respectifs, Xavier Niel, Anne Hidalgo et François Hollande (discours du Président) ont réaffirmé la place de Paris comme plaque tournante de l’innovation, sur le fait que la France était un pays où il faisait bon d’entreprendre. Hollande a insisté sur l’absence de contradiction entre l’installation d’un incubateur tourné vers le futur dans un bâtiment classé monument historique !
Quid de la “dernière pierre” ? C’est prévu pour fin 2016 sachant que les chantiers de BTP ont des délais voisins de ceux du développement logiciel : imprévisibles et très élastiques, comme les coûts d’ailleurs ! Pour certains, il serait préférable que l’inauguration ait lieu avant mai 2017. En attendant, on peut visualiser la simulation 3D réalisé par l’architecte Jean-Michel Wilmotte.
Côté communication, avec l’école 42 et cet incubateur en construction, Xavier Niel a lancé une offensive salutaire et positive sur l’écosystème entrepreneurial français, qui, semble-t-il, commence à avoir de l’impact outre-Atlantique. Petit à petit, la France commence à être prise au sérieux. Même s’il y a encore beaucoup de chemin à faire !
On met évidemment sous le tapis en pareille circonstance les sempiternels écueils de l’environnement entrepreneurial français : le code du travail, la complexité administrative, le coût du travail (qui est à relativiser dans les startups, notamment du fait du Crédit Impôt Recherche) et la fiscalité de l’investissement (qui au demeurant n’est pas si mauvaise que cela). Comme si on laissait le MEDEF s’en charger car cela concerne toutes les entreprises et pas juste les startups !
Mes photos de cet événement sont ici.
CES Unveiled Paris
Lors de la conférence Ubifrance, j’entends David Monteau de la Frenchtech évoquer le fait que 30% des startups du CES, dans l’espace Eureka qui leur est dédié, seront françaises. Je me frotte les yeux et me dit qu’il exagère, qu’il doit y avoir une erreur de calcul. En janvier 2014, elles étaient une grosse trentaine sur un total de 150. En 2015, il devrait y avoir au moins 300 startups en tout dans cet espace. Gary Shapiro, le patron du CES que j’ai croisé le soir même, m’indique qu’il y en aurait même probablement plus. Alors 30% de 300, ça fait déjà 90, c’est énorme. Presque un triplement par rapport à 2014.
Mais ce n’est pas un mirage. Si le village Ubifrance de la zone Eureka passera de 11 à une vingtaine startups, plusieurs métropoles régionales ont aussi lancé leur propre initiative pour envoyer leurs startups au CES. En tout, il y en aura bien entre 80 et 90. C’est une première historique : à part peut-être au MWC de Barcelone, on n’a jamais vu autant de startups dans un grand événement numérique à l’étranger.
Axelle Lemaire a d’ailleurs annoncé qu’elle visitera le CES 2015 pour soutenir les entreprises françaises présentes, comme l’avait fait Fleur Pellerin en janvier 2014. Pierre Gattaz du MEDEF sera de nouveau de la partie. Cette approche dans la durée est salutaire car on ne fait passer un message qu’à force de répétition et de persévérance. Si la communication est bien orchestrée autour de la présence française au CES, elle devrait être remarquée !
Ce mercredi 22 octobre avait lieu le “CES Unveiled” à Paris. De quoi s’agissait-il ? En fait, d’un tout petit événement regroupant 26 startups et PME françaises, futures exposantes au CES dont une bonne partie pour la première fois. Elles y présentaient, parfois en avant-première, leur innovation qui sera annoncé au CES. C’était ainsi le cas de la ceinture connectée de Emiota, du système de suivi du sommeil de toute la famille de SevenHugs, du système de son 3D de 3D Sound Labs, des nouvelles lampes LED multi-couleur de Holi, la caméra 360) de Giroptic (la startup lilloise qui a battu le record français de levée de fonds sur KickStarter, avec plus de $1,4m) et les supports robotisés de caméras de Move’n see capables de suivre les évolutions d’un sportif.
Le Consumer Electronics Association qui organise le CES avait recréé pour quelques heures l’ambiance du CES de Las Vegas : une conférence de presse avec les mêmes intervenants que la conférence à laquelle j’assiste chaque année au CES (Shawn DuBravac, l’américain qui présente les tendances technologiques de l’année), Gary Shapiro (le patron de la CEA). Le tout se poursuivant avec la présentation des nouveautés des startups et PME dans le ballroom de l’hôtel Westin de la rue Castiglionne près de la place Vendôme, un buffet appétissant, des gens passionnés et de l’américain dans l’air.
Avec 90 startups françaises au CES 2015, mon décompte habituel des entreprises françaises présentes au CES va exploser. L’année dernière, j’en étais arrivé à environ 109 dans le Rapport du CES. Au train où vont les choses, on va probablement atteindre les 150 cette année. Les premières années où j’allais au CES (2006-*), j’en comptais avec difficultés une trentaine ! C’est dire les progrès accomplis !
Comment expliquer cela ? Au-delà de ce qui va suivre sur l’internationalisation de l’écosystème français de l’innovation, il y a aussi une explication sectorielle : les entrepreneurs français semblent s’être engouffrés dans le créneau des objets connectés avec un assez bon timing. Le marché est déjà très encombré mais on compte des acteurs importants à l’échelle mondiale avec Parrot et Withings. Les startups françaises de ce secteur associent souvent des compétences croisées avec design, ingénierie, composants (souvent en liaison avec ST Microelectronics et le Minatec de Grenoble…) et logiciels. Le marché des objets connecté est saturé de produits “me-too” : il est aujourd’hui bien difficile de différencier un fitness-tracker d’un autre. Mais les innovations de nombreuses startups françaises sont souvent plus originales.
Parfois, ce sont des coups d’épée dans l’eau comme la Hapifork qui avait fait fureur au CES 2013 mais qui plus d’un an et demi plus tard n’est toujours pas disponible. Son inventeur Jacques Lépine est récidiviste pour 2015, sur le pavillon Ubifrance, avec Slow Control, un biberon connecté qui permet notamment d’éviter que le bébé avale de l’air. Un produit qui laisse évidemment un peu songeur. Mais c’est le propre de l’innovation : lancer des ballons sondes et observer ceux qui iront loin !
Une approche à long terme
Tout cela n’est pas le fruit du hasard mais la somme de plein d’initiatives privées et publiques dont certaines ont démarré il y a bien des années, bien avant le lancement de la Frenchtech. Elles rappellent que toutes les politiques de l’innovation relèvent d’approches à long terme.
En voici un inventaire probablement très incomplet :
- L’augmentation d’année en année de la proportion des étudiants en grandes écoles qui font un cursus complémentaire à l’étranger. La majorité reviennent en France et ne s’expatrient pas ! Cf le classement 2014 de l’Usine Nouvelle qui montre que la proportion des élèves des grandes écoles d’ingénieurs partis faire un cursus complémentaire à l’étranger dépasse facilement les 20%. Le niveau de maîtrise de l’anglais progresse aussi, les TOEFL et autres TOIC étant maintenant incontournables dans ces écoles.
- Le fait que des accélérateurs comme Le Camping et des initiatives comme The Family encouragent leurs startups à “vivre” en anglais, avec des entrepreneurs en résidence américains, des pitches réalisés en anglais, des voyages d’études et de prospection à l’étranger.
- L’existence de médias anglophones sur l’écosystème français des startups tels que RudeBaguette.
- Les initiatives des pôles de compétitivité avec leurs voyages de prospection régulièrement organisés pour leurs startups, aux USA comme en Asie. Cap Digital le fait très bien depuis des années et n’est pas le seul.
- On peut maintenant officiellement donner des cours en anglais dans les universités. Depuis le feu vert des députés obtenu – non sans mal – par le gouvernement en mai 2013.
- L’installation en France d’un événement majeur de dimension mondiale qu’est LeWeb, depuis 2006. Cela compte aussi pour dynamiser l’orientation internationale de l’écosystème français !
- La capacité de Bpifrance de suivre une par une des étapes du financement des startups prometteuses, jusqu’à des tickets qui peuvent dépasser 10m€ dans des levées de fonds supérieures à 20m€ (Withings – 23m€, Sigfox – 15 m€, Voluntis – 20,75 m€, Sarenza – 75m€, etc). Levées de fonds qui sont évidemment destinées à accélérer la croissance internationale de ces startups.
- Plus récemment, la création du label FrenchTech des métropoles dont le cahier des charges contient une forte dose d’intégration avec l’international (j’ai contribué à leur création…). Mais comme nous l’avions vu lors de ma visite à EuraTechnologies à Lille, certains n’ont pas attendu cela pour ce bouger et lancer par exemple des partenariats avec Stanford !
- La fusion en cours d’Ubifrance avec l’AFII qui permettra début 2015 à l’Etat d’avoir une approche plus intégrée vis à vis de l’étranger, à la fois “inbound” (attirer les entreprises étrangères en France) et “outbound” (aider les entreprises françaises à exporter), comme le fait très bien UKTI au Royaume-Uni. J’avais évoqué l’utilité d’un tel rapprochement en 2011.
- Le fait qu’Ubifrance s’occupe maintenant des startups et pas seulement des PME. 2013 a été une année charnière avec le premier village Ubifrance au CES de janvier 2014. Il y en a aussi un au SXSW (South By Southwest, d’Austin, Texas).
- Le fait que de nombreux entrepreneurs ont su surfer en temps et en heure sur des vagues technologiques majeures, par exemple dans la sécurité, le big data, les objets connectés, la e-santé ou la robotique.
Alors, optimisme béat et méthode coué ? Un peu tout à la fois. Il reste encore beaucoup à faire, bien évidemment.
On a souvent tendance à mettre “l’idée” au peu en arrière plan dans les démarches entrepreneuriales, mettant en avant la composante équipe et aussi la confrontation au marché. Il n’en reste pas moins qu’un cercle vertueux reste à enclencher qui pousse les entrepreneurs à être plus ambitieux dans “l’idée”. Bien trop d’entrepreneurs se lancent dans des micro-scénarios/projets/applications qui ne présentent pas de grandes perspectives, en particulier à l’international. J’ai un beau bêtisier dans mon disque dur avec les dossiers reçus dans tous les jurys dont je fais partie depuis 2006.
L’ambition des idées relève d’un processus mimétique : les grands succès inspirent les entrepreneurs. Xavier Niel, Criteo et autres Withings et Parrot font rêver les jeunes entrepreneurs. La diversité des sources de financement aussi. Quand Blablacar lève 75m€ auprès de fonds internationaux tels que Index Venture et Accel Partners, après avoir été financé au départ par un prêt d’honneur Scientipôle Initiative puis un investissement d’amorçage d’ISAI, le fonds d’entrepreneurs créé notamment par Pierre Kosciusko-Morizet, on commence à se dire que tout est possible pour les bons projets et qu’un cercle vertueux a bien été lancé !
Sur le long-terme, il faudrait qu’un grand nombre de nos startups deviennent des ETI, comme Criteo. Et même qu’au moins 10% de sociétés innovantes du numérique intègrent un jour le CAC 40 d’ici 10 ans. Il faudrait aussi recréer un solde positif de la balance commerciale du pays et dans les industries numériques en particulier.
Ultimement, il reste aussi à regagner notre souveraineté numérique comme le réclame avec force lyrisme Pierre Bellanger dans son livre éponyme. Mais c’est une question qui n’est pas que française. Elle devrait être européenne. Seule, la France n’y pourra pas grand chose. Les grands projets numériques de demain devront être européens, une dimension internationale qu’il reste à construire entièrement. On pourra creuser du côté des initiatives “Digital Agenda for Europe” ayant succédé aux programmes FP6/FP7. Et au passage, examiner la place occupée par les entreprises françaises dans ces projets ! Vaste programme !
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Je n’ai pas trouvé de stats [*] récentes ou détaillées par pays mais anecdotiquement il me semble que les français contribuent largement à de nombreux projets open source, ce qui ne fait pas la une des journaux mais fait partie de la contribution nationale au plan global de façon “bottom-up” ou “grassroots”. Exemple parmi tant d’autres : il y a un français parmi les top commiters de la bibliothèque Reactjs développée par Facebook.
La France reste culturellement plus un pays d’ingénieurs que d’entrepreneurs. Et des projets comme Prestashop (ecommerce open source) montrent que les deux ne sont pas incompatibles. Je suis en train de lire “China’s Second Continent: How a Million Migrants Are Building a New Empire in Africa” qui montre que la présence chinoise en Afrique dépasse les relations Etat-Etats et les grosses entreprises affiliées, et passe aussi par beaucoup d’initiatives individuelles. J’ai l’impression qu’il y a de même une “diaspora numérique” française qui fait son bout de chemin une ligne de code à la fois.
[*] Pour référence :
https://github.com/blog/1359-the-octoverse-in-2012
Ces contributions sont bien connues. Elles ont notamment été relevées par Tariq Krim dans son rapport sur les développeurs français publié au printemps dernier (cf http://www.oezratty.net/wordpress/2014/comment-valoriser-les-developpeurs/).
Ceci étant, il faut distinguer les contributions individuelles à des projets open-source et les initiatives entrepreneuriales de la catégorie que l’on retrouve chez des ISV comme Talend, Bonitasoft et autres Prestashop.
La culture ingénieur open source (un peu idéaliste au passage) rejoint la culture business et de la création de valeur identifiable quand les projets open source deviennent des projets entrepreneuriaux, qui plus est internationaux.
A mon humble avis le débat sur le réalisme des modèles d’affaires qui utilisent de l’open source est tranché et la motivation des ingénieurs et entreprises qui contribuent à ces projets n’est pas qu’idéaliste, loin sans faut. WordPress à titre d’exemple c’est open source et c’est un business non seulement pour Automattic mais aussi pour tout un écosystème. Adobe n’est pas une oeuvre de charité mais leur éditeur Brackets est un projet open source de top niveau, etc. Tout le monde y trouve son intérêt bien compris hors de positions idéologiques ou morales à la Richard Stallman, e.g. discours pragmatique d’Eric Raymond [*]. Quand Walmart dédie 3 employés à plein temps sur leur web framework Hapi ils le font avec un calcul de ROI vs. continuer à arroser Oracle en licenses ATG pour rester bloqués sur une architecture des années 90.
Bien entendu je ne dis pas que l’open source est une panacée, et beaucoup de projets ont malheureusement peu ou pas de marketing. Mais je pense que ça va dans le bon sens (meilleures docs, tutorials, landing pages qui expliquent la raison d’être d’un projet avant de rentrer dans le code) et qu’au niveau business, l’open source permet de mutualiser des briques de fonctionnalité et obtenir plus pour moins cher. La “création de valeur identifiable” ne passe pas que par les grosses introductions en bourses visibles. Economiser des resources qui peuvent être redéployées plus efficacement c’est créer de la valeur.
En termes de modèle d’affaire il y a de plus en plus de projets open source avec couche optionnelle de service premium (e.g. Vagrant -> Vagrant Cloud pour rester dans le domaine du dev). Pour revenir à ton post, VLC c’est de l’histoire ancienne !
Quand à “distinguer les contributions individuelles à des projets open-source et les initiatives entrepreneuriales”, pose la question à Matt Mullenweg… Ce ne sont pas deux sphères dissociées.
[*] http://esr.ibiblio.org/?p=4386
Eh eh, WordPress n’est pas français. Nous avions Dotclear en France. Chercher l’erreur !
La question est donc bien entrepreneuriale, et pas spécifiquement liée au modèle open source.
En tant que bon libertarien je te répondrai que ces projets sont transnationaux, décentralisés, et avec une forte composante individuelle par nature, et que tu appliques un modèle de pensée centralisé et institutionnel là où il n’a pas lieu d’être. WordPress c’est américain, français, vietnamien, sud africain…
Déjà que la nationalité d’une entreprise ça ne veut plus dire grand chose… Et même dans les grandes entreprises il y a des français comme Jean-Pascal Tricoire qui l’ont compris et appliqué. Là nous sommes d’accord, ça va bien au delà de l’open source.
En tout cas merci pour ton blog qui reste la référence pour suivre la France techno.
J’ai vu ton commentaire sur LinkedIn. Vision “Institutionnelle”, tu y vas fort. Surtout dans la mesure où tu évoques un article qui ne traite pas du tout l’open source. C’est toi qui met le sujet sur la table dans les commentaires.
Oui, les boites sont internationales. Mais elles contribuent aussi à renforcer l’économie de leur pays d’origine. Google et Red Hat sont américains ou internationaux de ce point de vue ?
Open source ou pas, la question industrielle est toujours la même : comment migre la valeur ? Qu’il s’agisse des sociétés, des actionnaires, des salariés et des pays !
Donc, quand on a des ingénieurs brillants se retrouvent faire des choses brillantes dans des sociétés dont le siège et la majorité des effectifs n’est pas en France, qu’elles soient “tradi” ou “open source”, la valeur créée n’est pas la même que lorsqu’ils créent de véritables entreprises. Par contre, il est évident qu’une entreprise ne peut réussir qu’en devenant mondiale et distribuée.
Les industries du numérique ne sont pas neutres et lisses dans la répartition de valeur !
J’espère ne pas t’avoir vexé en parlant de vision “institutionnelle”, il est parfois difficile de faire passer le ton juste dans ces conversations par internet. Il semble que nous parlons de choses orthogonales, d’où difficultés à s’entendre.
Si je te suis tu t’exprimes du point de vue des comptes nationaux type balance du commerce extérieur et PIB (mot clé: intérieur). Pour ma part je part plutôt du point de vue individuel et au niveau global, incluant des français vivant et travaillant n’importe où dans le monde. Je consois que ta définition de “l’essor international de la FrenchTech” exclue la contribution de développeurs français très bien payés à l’étranger et/ou dont le travail est largement diffusé. C’est une question de périmètre, et une vision un poil mercantile, mais c’est sans doute nécessaire étant donné que les Allemands (énorme excédent commercial), Coréens ou Japonais sont aussi largement mercantiles. Seuls les Américains peuvent se permettre des déficits commerciaux permanents, tant qu’ils ont la monnaie de réserve mondiale. Donc ta vision a le mérite du réalisme.
Je note quand même que si un designer de mode ou un grand chef cartonne à l’étranger c’est célébré comme le rayonnement de la France dans le monde. Mais bon c’est clair que ça ne fait pas bouillir les marmittes.
J’ai aussi l’impression que tu utilises le mot “valeur” comme synonyme de “valorisation financière.” Il y pas mal de développeurs pour qui le dollar incrémental au delà d’un revenu confortable a peu de “valeur” vs. la possibilité de toucher un maximum de monde avec le fruit de leur travail et créativité. Ce qui ne veut pas dire qu’ils vivent d’amour et d’eau fraiche, Cf. niveaux de rémunérations chez Google, FB et consorts.
Maintenant c’est sûr que ça serait sympa de voir plus de nouvelles boîtes tech “d’origine française” décoller, pas forcément pour devenir des monstres à la Google d’ailleurs, mais si l’Australie peut produire des Atlassian, la France devrait pouvoir faire de même.
Si ton point c’est qu’il n’y a pas assez de création d’emplois en France dans le secteur numérique pour compenser les pertes dans d’autres industries, et qu’à moins que les expats envoient des chèques à leur famille, leur succès à l’étranger fait une belle jambe à ceux restés sur le territoire national, alors bien sûr tu as raison on est loin du compte. Sur le strict plan du poids dans les exports du pays, je ne peux qu’être d’accord avec toi. Notons quand même que quand DCNS exporte des navires de combat, ils exportent aussi des millions de ligne de code mais ça apparait dans les comptes comme ventes d’armes et non comme technologie numérique.
On va arrêter là la discussion ! Oui, le rayonnement des français à l’étranger contribue à celui de la FrenchTech. Mais il n’a pas spécialement évolué récemment. A moins d’intégrer dans l’histoire la recrudescence du nombre d’expatriés – surtout jeunes – qui ne se sentent pas à l’aise en France.
L’essor international de la FrenchTech in le blog d’Olivier Ezratty #frenchtech http://t.co/mZTOUsJ2fa
A lire ABSOLUMENT par les futures, présentes, ou ancienes start up de #Annecy #FrenchTech . Blog de O. Ezratty http://t.co/tAEC0LUv9O
90 startups françaises au CES… Pauvre Olivier, la rédaction de ton rapport va durer des nuits et des nuits… Va falloir recruter 🙂
French Tech development by @olivez http://t.co/ze5K8krvcw #CES2015 #startup #technology cc @LaFrenchTech #3DSound
Merci @olivez pour le mention ! “L’essor international de la @LaFrenchTech” http://t.co/1W2OMpi7qY cc @3DSoundLabs @UBIFRANCE #startup
#PRESSE
Olivier Ezzratty revient dans son blog sur la belle dynamique internationale affichée par l’écosystème… http://t.co/boG4Vu57wA
#PRESSE #blog @olivez, retour sur la belle dynamique internationale affichée par l’écosystème IT français http://t.co/lXayZ0m3Wi #FRENCHTECH
Pour ceux qui en doutaient encore, la #FrenchTech poursuit son essor mondial http://t.co/cicOjGF1oi via http://t.co/HKuuB3O4Jz cc @olivez
A Lire ! “L’essor international de la FrenchTech” de @olivez sur http://t.co/B4tGgBeAxU #DIPforum #LaFrenchTech @UBIFRANCE