Assises de l’AFDESI sur les TV connectées

Publié le 9 juin 2011 et mis à jour le 4 juillet 2014 - 4 commentaires -
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Depuis environ un an se succèdent conférences et autres assises sur le thème des TV connectées. C’est un grand sujet qui agite la profession : les constructeurs de téléviseurs connectés, les opérateurs télécoms, et surtout les chaines de télévision et les autres éditeurs de contenus. J’intervenais ainsi lundi 6 juin 2011 aux Assises de l’AFDESI sur les TV Connectées, chez TF1, pour modérer une table ronde sur la stratégie des acteurs. Ma troisième en douze mois après celle du GESTE en avril 2011 et celle de CB Web en septembre 2010. L’AFDESI est une association européenne qui fait la promotion des services de télévision interactive. Leurs membres sont surtout des éditeurs de services web et des constructeurs.

Les débats sont permanents, mais la compréhension des enjeux de la TV connectée évolue en parallèle. Les menaces des uns (Google TV) s’atténuent tandis que d’autres solutions émergent (HbbTV) qui deviennent intéressantes. On en apprend aussi un peu plus sur les usages adoptés par les consommateurs. Nous sommes en tout cas en pleine innovation de rupture dans le secteur de la télévision. Cela affole certains acteurs. Cela créé des opportunités pour eux comme pour d’autres. Ces Assises de l’AFDESI m’ont permis de compléter le panorama, mais ce n’est qu’un point d’étape !

Je vais ici faire en un compte rendu et survoler les différents enjeux qui y étaient évoqués, parfois avec quelques digressions (en italiques).

Réguler ou pas ?

J’avais manqué le colloque du 28 avril 2011 organisé par le CSA et qui portait sur les besoins de régulation du secteur. L’autorité de régulation de l’audiovisuel ne fait pas qu’appliquer la loi, elle cherche aussi à la faire évoluer ! La nouveauté des TV connectées et l’impact qu’elles pourraient avoir sur la chaine de valeur de l’audiovisuel la poussent à réfléchir à une évolution de la régulation du secteur. Elle est surtout poussée par le lobbying des acteurs qui se sentent menacés. C’est pourquoi une mission d’étude sur les TV connectées a été confiée par le Ministère de la Culture à Marc Tessier et qui doit rendre ses conclusions à la rentrée scolaire 2011.

Emmanuel Gabla (CSA)

Dans les assises de l’AFDESI, Emmanuel Gabla du CSA nous faisait une piqure de rappel en évoquant les nouveaux enjeux de régulation dans un environnement qui est loin d’être homogène en Europe. Pour lui, le succès des TV connectées est déjà acquis, ce n’est qu’une question de temps. Même si la forme de ce succès me semble encore bien incertaine !

Les tentations de régulation visent surtout à limiter les risques pesant sur le financement de la création qui repose aujourd’hui en grande partie sur les chaines de TV, et un peu sur les FAI via la taxe “COSIP”. Sachant qu’on a tendance à mettre dans le même sac le financement du cinéma, des informations et des documentaires, des séries TV et aussi de la télé réalité. Selon le point de vue, on peut se soucier plus de certains et moins des autres !

Si la chaine de valeur évolue au détriment des chaines TV, c’est le financement (public) de la création qui est menacé ! En ligne de mire, les services globaux que sont Google mais aussi Netflix. Les chaines TV cherchent aussi à limiter les effets du piratage des contenus sur les TV connectées. Enfin, et cela concerne surtout les services de vidéo à la demande, l’harmonisation de la TVA est nécessaire pour que tous les acteurs jouent sur un pied d’égalité. Elle devrait s’appliquer en Europe par application d’un taux de TVA au niveau du pays d’où provient la commande.

Emmanuel Gabla a aussi commenté les réactions acrimonieuses sur la décision récente du CSA concernant la citation des services de Facebook et Twitter. Selon lui, le CSA n’a jamais dit qu’on ne pouvait pas les citer ! Mais seulement lorsque son évoquées les pages ou flux des chaines et programmes relatif à ces services. Ce qui n’empêche pas que cette lecture bien pointilleuse de la loi sur la publicité déguisée reste bien décalée par rapport à la réalité. Et la presse anglo-saxonne qui nous a justement épinglé sur cette décision était pourtant bien précise sur la nature de l’interdiction !

Pascal Rogard de la SACD évoquait en milieu d’après-midi le risque de remise en cause de l’HADOPI – qu’il craint – mais se dit prêt à expérimenter un assouplissement de la chronologie des médias tout en mettant en garde contre le risque du rouleau compresseur d’Hollywood.

Je trouve que l’on met un peu la charrue avant les bœufs. Dans une approche très française assez averse au risque, on veut réguler à outrance alors que le risque évoqué n’est même pas avéré et que les usages et le marché n’ont pas encore décollé. Le législateur a ainsi le don de créer des dispositions qui ralentissent la diffusion d’innovation. La taxe sur la copie privée qui s’applique aux disques durs des set-top-boxes explique par exemple en partie le retard dans les usages de l’enregistreur de TV numérique en France (PVR). En plein, on pourra cependant porter au crédit du CSA la volonté d’éviter que le législateur soit encore un train en retard par rapport aux évolutions technologiques comme c’est généralement le cas.

L’autre point inquiétant concernant la régulation est que celle-ci risque de dépasser son cadre normal consistant à créer des règles du jeu équitables. Les chaines souhaitent explicitement éviter que l’offre de contenus ne se développe. Tandis que les grandes ont souffert de la TNT, Alain Weil de BFM-TV (qui intervenait au colloque du CSA) voudrait d’abord élargir l’offre hertzienne avant que l’on passe à l’hyper-choix de services via les TV connectées. Tout cela génère un désagréable parfum d’acteurs cherchant à limiter l’arrivée d’innovations dans les mains des téléspectateurs que nous sommes alors pourtant que les couts de production de certains contenus est en nette baisse. Bref, limiter le jeu naturel de la concurrence entre acteurs des contenus. Le législateur devrait comme c’est un peu plus le cas aux USA se poser la question de la protection du consommateur avant de protéger les positions acquises des acteurs économiques.

Marc Tessier (2)

Fort heureusement, Marc Tessier (ci-dessus) concluait ces Assises en proposant une évolution de la régulation semble-t-il un peu plus équilibrée, s‘appuyant sur quelques principes ou observations de bon aloi :

  • Tout ce qui fragmente l’offre au point de réduire le choix du consommateur n’est pas bon. L’expérience est la pire quand un contenu que l’on désire n’est pas disponible sur son écran de télévision à cause de sa marque. Il rappelle l’époque des débuts de Canal+ (dont il était le DG) où l’arrivée de la chaine payante a brutalement fait disparaitre les TV sans prise Péritel en trois mois.
  • L’exigence d’une bonne régulation est avant tout de protéger le consommateur. Il faut lui donner la possibilité de sortir de son choix. Ce d’autant plus qu’une TV est conservée de nombreuses années avec un cycle de vie bien plus long qu’un téléphone ou même qu’un ordinateur. Il faudra pouvoir changer de service ou de contenus pendant la durée de possession de cette TV. On pourrait remarquer au passage que le problème qui se pose actuellement est plutôt leur pérennité. Comme les constructeurs font évoluer leur architecture d’applications tous les ans, la base installée est souvent délaissée. L’architecture de mon téléviseur coréen connecté “vieux” de deux ans ne supporte pas les nouvelles applications du portail génération 2011 !
  • Il y a plusieurs manières de consommer des contenus dans les foyers. Et il y a plein de types de foyers et de gens dans les foyers. Il faut s’adapter à la diversité des foyers dans les usages. Cela s’inscrit dans un rappel simple : tout le monde n’a pas accès au haut débit ! Il se réjouit de la pression sur les prix créée par l’IPTV. Dans la bataille à venir, les prix vont baisser (pour l’accès aux contenus et services).
  • Il faut s’assurer une juste répartition de la valeur, mais sans créer de répartition arbitraire. Il faut respecter le droit des auteurs et assurer le financement autant des réseaux que de la création. Et ne pas confondre la “non discrimination” (impossibilité de favoriser tel ou tel service dans les tuyaux) et le “must carry” (obligation de transporter tout service dans les réseaux). On peut faire du must carry tout en étant discriminant. On touche là à une corde sensible de la net neutralité. Cela devrait faire débat !
  • La régulation et les négociations associées vont être internationales. On ne pourra pas imposer des règles propres à la France. Il va donc falloir se créer un “corpus régulatoire français” vendable à nos partenaires internationaux.

Le satisfecit sur HbbTV

HbbTV a été cité de nombreuses fois lors de ces Assises de l’AFDESI. Tout d’abord, Emmanuel Gabla s’est félicité de l’approche de normalisation qui a amené HbbTV à être adoubé par l’organisme de normalisation européen ETSI et avec un bel exemple de travail collectif associant la France et l’Allemagne. Et de citer aussi bien l’expérimentation MesServicesTV qui va être lancée par l’AFDESI que celle de France Télévision à Roland Garros.

Il regrette cependant que la voie hertzienne ne soit pas plus utilisée pour envoyer des contenus. Il trouve qu’il faudrait diffuser un maximum d’informations par voie hertzienne. Les usages basculeront sinon trop rapidement sur ADSL si tout vient de l’Internet. Une bien curieuse manière de poser le problème. J’aurais préféré qu’il nous dise qu’il faut aussi alimenter en contenus “riches” les téléspectateurs qui sont peu ou mal connectés à Internet ! Et à vrai dire, le faible usage du canal hertzien par France Télévision n’était qu’un choix temporaire pour mener cette expérimentation. Pas une religion sur le déploiement des services HbbTV en production.

Sinon, Gilles Maugars, DGA de TF1 en charge des moyens techniques, saluait le travail de France Télévision réalisé à Roland Garros. Et Philippe Alcaras le président de l’AFDESI citait le million de TV compatibles HbbTV déjà vendu en Allemagne et l’adoption d’HbbTV en Espagne.

Klaus Merkel (IRT) (4)

Nous avons eu droit à une intéressante intervention de Klaus Merkel de la R&D de l’IRT (Institut für Rundfunktechnik, basé à Munich), un institut allemand de recherche dans les techniques de broadcast radio et TV, sorte de joint-venture des broadcasters allemands, surtout issus du secteur public.

HbbTV est opérationnel en Allemagne depuis 2010. Plus de 20 matériels le supportent, aussi bien des TV connectées que des set-top-boxes. Le tout pour une réception par le câble (dominant en Allemagne), le satellite et enfin la TNT. Il y a 41 applications HbbTV de déployées dont la moitié provenant du groupe public ARD. Les services (grille ci-dessus) sont assez variés : des compléments sur les programmes en cours, un guide de programme pour la chaine Das Erste, de la télévision de rattrapage pour ARTE et aussi pour la chaine privée Pro7 (avec publicité affichée autour, voir ci-dessous), de la vidéo à la demande (avec Maxdome, le leader de la VoD en Allemagne), de la musique (Musicbox), des informations sur les voyages, sur la cuisine, etc. L’écosystème HbbTV comprend sinon 18 SSII qui développent les applications correspondantes. Nous avons donc à la fois des services HbbTV qui enrichissent les chaines TV et des services qui en sont déconnectés. Reste à savoir comment fonctionne le portail d’accueil de l’ensemble de ces services et qui l’opère !

Klaus Merkel (IRT) (5)

De son côté, Christophe Coquerel présentait une initiative locale en France avec le service HbbTV de T-Seniority qui agrège des contenus de la chaine locale Normandie TV en rattrapage, du contenu local provenant du Conseil Général et à destination des personnes âgées, des sites d’information (WikiManche, MancheSanté, …), ainsi que des informations d’alerte en cas d’évènement important). Le service peut diffuser de la publicité ultra-ciblée géographiquement. Il s’appuie notamment sur deux startups du secteur de la TV numérique : HTTV qui équipe la tête de réseau et Hyperpanel qui intègre son middleware dans les set-top-box dédiées au service. Le retour d’expérience est d’ailleurs que cela reste compliqué de connecter la box à Internet. Je doute du succès à grande échelle d’une telle approche, avec une set-top-box dédiée. Mais ce n’est qu’une expérience !

La monétisation des services des TV connectées

Plusieurs méthodes de monétisation des services des TV connectées existent : l’indirecte avec la publicité et la directe avec des services payants.

Le service peut être gratuit et compléter une autre franchise profitable, comme cela semble être le cas pour l’Equipe, représenté par Sébastien Valère. Ils ont créé leur première application de TV connectée avec SFR, puis sur les TV connectées elles-mêmes (les développements étant réalisés par WizTivi). Avec des contenus qui associent pour l’instant textes et photos, alimentés par la rédaction qui fait plus de 300 journalistes (plus que tous les grands quotidiens… !). Il doit y avoir tout de même de la publicité, mais ne couvrant pas tous les frais car l’audience est pour l’instant relativement faible sur les TV connectées.

C’est lorsqu’un service ou un contenu devient payant, surtout de manière transactionnelle, que les choses se compliquent sur les TV connectées. Pour Olivier Binet de Paypal, la sécurité est un point essentiel pour les moyens de paiement. Ils travaillent en Europe avec Samsung et aussi sur la XBOX. Mais il faut se logger pour profiter de ces services ! Selon Mathieu Dubreu d’ATOS Origin, le FAI est un opérateur mieux positionné pour le paiement des services car il permet de s’affranchir de la phase d’identification du foyer ou de l’utilisateur.

Stéphane Martin (ARPP)

Enfin, Stéphane Martin (ci-dessus) qui représente l’ARPP (ex BVP) privilégie l’approche de l’autorégulation pour ce qui est de la publicité et de ses évolutions, notamment pour ce qui est de la protection de certains publics. Les TV connectées permettront d’ailleurs d’exprimer des plaintes sur les contenus des publicités de manière interactive via les TV connectées. Rendez-vous à l’Université d’Eté du SNPTV du 26 juin 2011 pour en savoir plus !

Comment faire évoluer les guides de programmes ?

C’est un sujet rarement évoqué dans les colloques et pourtant très important. Ces guides sont une composante clé de l’expérience utilisateur dans les set-top-boxes (FAI, satellite, câble) et dans les TV connectées ! C’est d’ailleurs clairement un point faible de solutions comme Google TV et Apple TV qui ne gèrent pas directement la réception de la TV broadcastée.

Yann Lousouarn de Bouygues Telecom (ci-dessous) était le plus disert sur les nouveaux services à apporter dans les guides de programmes électroniques (EPG – electronic program guides). Ils ne concernent pas que le direct : il faut leur intégrer la TV de rattrapage ainsi que la vidéo à la demande. Pour un FAI, avant même d’augmenter les revenus, il s’agit de pousser le consommateur à profiter de l’expérience globale de l’opérateur pour réduire le “churn” (taux de désabonnements). Se pose la question d’avoir des guides de programmes intégrés (on dira “horizontaux”) ou bien organisés par chaines (ce qui est le cas pour la TV de rattrapage aujourd’hui) ou par thème (comme chez Numericable).

Yann Lousouarn (Bouygues Télécom) (2)

L’inégale qualité des informations contenues dans les guides de programme a été ensuite évoquée. Dans la TNT, elle dépend des chaines. Certaines proposent sept jours de programmes glissants et d’autres uniquement le programme en cours et le suivant. Le CSA a demandé d’améliorer le guide des chaines TNT qui est très pauvre. Un projet est en discussion dans le HD Forum. La faible qualité des guides de programme de la TNT est peut-être due au fait que la TNT est rarement utilisée conjointement avec un enregistreur (que ce soit dans une TV TNT, un Media Center ou une set-top-box à disque dur et tuner TNT). Un guide glissant de 7 ou 15 jours est surtout utile avec un enregistreur ! Sinon, la pauvreté des informations vient en général de celle des systèmes d’information des chaines TV. Certaines gèrent encore leur programmes dans de simples tableaux Excel… !

Les agrégateurs de contenus comme les FAI font de leur côté appel à des fournisseurs de données qui collectent celles-ci auprès des chaines. Les guides sont généralement neutres éditorialement. Ils peuvent être enrichis de fonctions de recommandation comme avec les systèmes de Gravity (représenté par Peter Csiko dans la table ronde).

Daniel Daum du groupe Prisma Presse représentait de son côté une activité en déclin : celle des programmes TV papier. L’un de leurs titres est passé de deux à un millions de ventes hebdomadaires en quelques années. Le groupe doit s’adapter aux nouveaux usages numériques et rapidement dématérialiser son offre, notamment sur les tablettes. Mais on sent que le secteur ne se bouge pas assez vite ! Il y a tant d’innovations à créer pour créer des guides de programmes riches et éditorialisés sur supports électroniques, en liaison avec les set-top-boxes et TV connectées, au-delà des bien ennuyeux guides que l’on trouve sur le web.

En tout état de cause, les guides de programmes ont vocation à s’enrichir considérablement. Rien que pour la VoD, ils peuvent comprendre à la fois des contenus riches (critiques, bandes annonces, photos, navigation hypertexte dans le casting) et sociaux (évaluations, commentaires). Et ils ont vocation à être utilisés sur tablettes et smartphones.

L’enjeu de la VOD et de la catchup

La vidéo à la demande et la télévision de rattrapage sont les deux premiers usages des TV connectées, que la connexion vienne de la TV ou d’une set-top-box attachée. Daniel Scolan de WizTivi rappelait ainsi qu’il y a 11 millions d’utilisateurs de TV de rattrapage en France ! Et on a une bonne expérience avec les usages de l’IPTV qui constitue une base installée de “TV connectées” même si la connectivité utilisée ne vient pas de l’écran de TV.

Dans la table ronde sur ce sujet, Laurent Sorbier de MySkreen insistait sur le succès des services “non linéaires” aux USA, qui commencent à remplacer les abonnements au câble, que ce soit avec Hulu (20 millions de visiteurs uniques et $260m de revenu) ou avec Netflix (23 millions d’abonnés, 7% de résultat net sur $2,2B de CA). L’offre premium y fonctionne bien. Et le marché ne va que se développer, que cela soit au travers des TV connectées ou des tablettes. MySkreen se positionne comme un agrégateur de contenus de toutes sortes avec 55 plateformes de VoD, 26 plateformes de catchup et 280 sources professionnelles de vidéo. C’est une solution d’agrégation “horizontale” de contenus très intéressante amenée à se diffuser en marque blanche.

Grégory Dorcel (ci-dessous) a fait rapidement évoluer le mix de diffusion de sa maison d’édition de films pour adultes : de 70% sur DVD il y a 5 ans à 65% du CA en VoD. Le DVD adulte est mort à cause du piratage et aussi parce qu’il n’était pas disponible dans la grande distribution et seulement dans les réseaux locatifs, un marché qui s’est aussi effondré. Ils se sont lancé dans la Vod dès 2001 avec une stratégie de “contenus premium”. Sachant qu’ils n’ont pas de soucis de chronologie des médias. Les films sortent directement en VoD et DVD. Avec des formules à 8,5€ en VoD à la séance et de 20€ à 30€ par mois en SVOD (souscription/abonnement de vidéo à la demande). La majorité de la consommation reste toutefois illégale, le légal ne représentant que 10% à 15% du total. Mais pour Rémi Tereszkiewicz de Videofutur, le DVD “normal” meurt moins vite et se renouvèle avec les Blu-ray et la 3D. Et les pratiques de consommation sont très dépendantes de l’âge.

Grégory Dorcel (Studio Dorcel) (2)

Tristan Du Laz de TF1 Vidéo évoquait quant à lui une évolution inéluctable de l’offre. Le marché de la VoD français est estimé à 152m€ par GFK (il doit y manquer Free qui représente aux alentours du tiers de ce total) tandis que le marché de la vidéo physique est de 1,4Md€. Ce marché est trop orienté à la location “à la séance”, qui plus est avec une fenêtre de première diffusion qui est très étroite – et de plus en plus chère – dans la chronologie des médias, tandis que la seconde fenêtre est moins chère. La proportion des abonnements devrait augmenter. On va même s’orienter probablement vers des formules d’abonnement illimitées “tous écrans”. Avec la largeur de catalogue couverte, c’est en effet un facteur clé de développement de la consommation de contenus “legit”.

La stratégie des grands acteurs

J’animais la dernière table ronde de ces Assises, avec des représentants d’Orange, TF1, France Télévision, Samsung, NDS et DotScreen (vidéo disponible sur le site CapeCalm de Marie Rufo). L’idée était de mieux comprendre la stratégie de ces différents acteurs. Malgré la situation de concurrence qui peut les opposer, on les retrouve souvent partenaires. On est en pleine situation de “coopétition”. Le tout dans un environnement plus serein alors que la menace de Google TV semble – au moins momentanément – s’estomper.

Table Ronde 4 (1) bis

Roberto Mauro de Samsung précisait que le leader mondial de l’électronique grand public n’avait pas de visées sur la chaine de valeur des contenus et services. Seulement, de vendre des produits compétitifs et supportant les grands standards du marché. Il propose sinon une expérience multi-écrans de plus en plus intégrée. Une TV Samsung de dernière génération peut ainsi envoyer des contenus à une tablette Samsung sous Android. Soit le live, soit ce qui provient de supports de contenus connectés à la TV (en HDMI).

Nicolas Paepegaey d’Orange citait de son côté les différentes formes de partenariats avec les constructeurs de TV connectées, à commencer par LG Electronics, et qui devraient s’étendre à d’autres constructeurs. Est-ce la mort annoncée des set-top-boxes TV des FAI ? Pas encore, bien sûr ! Mais ces box ne sont pas seules. Un FAI se doit naturellement de supporter les différents écrans dans les foyers. Il est même très bien placé pour proposer des expériences multi écrans à ses clients.

Chez TF1 représenté par Stéphane Cadoch, on est passé progressivement d’une attitude plutôt alarmiste à une approche pragmatique. Ils ont lancé un partenariat avec Samsung l’année dernière. Ils vont aussi se lancer dans des expérimentations HbbTV. Ils sont enfin intéressés par les solutions multi-écrans d’autant plus qu’un grand nombre de leurs programmes se prêtent bien à de nouvelles interactivités.

Stanislas Léridon de la société de services DotScreen qui créé des applications sur mesure pour les éditeurs de contenus et pour toutes sortes d’écrans (TV connectées, tablettes, web) remarquait que la fragmentation du marché des TV connectée était dans les faits bien moins gênante que dans les mobiles. On pense qu’Android est une plateforme homogène dans les smartphones alors que ce n’est pratiquement pas le cas. A l’exception de Sony et Panasonic, les portails applicatifs des constructeurs de TV connectées s’appuient sur les standards du web (HTML, CSS, JavaScript). De plus, les TV connectées n’ont pas vocation à disposer d’offres applicatives aussi riches que sur les mobiles. Selon lui, c’est une sagesse des constructeurs d’en limiter la taille (en nombre d’applications). Mais c’est peut-être plus prosaïquement un problème de ressources et le manque d’habitude de travailler avec les développeurs.

Pour Eric Scherer de France Télévision, l’opération HbbTV de Roland Garros est surtout une expérience. Elle s’est arrêtée à la fin de la compétition et d’autres prendront le relai, comme TF1. Est-ce que ce standard est plutôt poussé par les chaines publiques (cela semble le cas en Allemagne, et l’homologue de HbbTV au Royaume Uni, YouView, est surtout soutenu par la BBC) ? Pas vraiment et la situation dans chaque pays est différente. HbbTV peut-il devenir un outil d’homogénéisation des plateformes des constructeurs voire devenir la souche de portails applicatifs ? Il est encore trop tôt pour le dire, et chaque chose en son temps ! Bref, l’approche autour d’HbbTV est prudente ou tout du moins modeste chez France Télévision.

Enfin, Olivier Lacour de NDS rappelait que le marché de la télévision payante continue à bien se porter et à adopter les concepts de la télévision connectée avec des set-top-boxes dites hybrides. Le marché américain qui a connu une décrue des abonnés au câble (400000 abonnés en moins en 2010) est un peu particulier (le gain est passé au satellite, à l’IPTV et aux solutions over-the-top type Roku et Apple TV). Dans le monde de la TV payante, l’expérience utilisateur peut aussi être homogène d’un écran à l’autre. C’est le sens de l’offre Snowflake de NDS, dont il est à l’origine.

Et après ?

Ce compte-rendu un peu long n’évoquait qu’un bout des enjeux autour des TV connectées. Le sujet est éminemment complexe, passionnant et mouvant !

Le jour même de cette conférence, Microsoft annonçait à l’E3 de Los Angeles (salon du jeu vidéo) que la pay-tv de Canal+, Sky au Royaume-Uni et FoxTel en Australie serait diffusée en “live streaming” sur les XBOX 360 des abonnés. C’est une évolution intéressante et il ne serait pas étonnant qu’Apple et Google fassent de même avec d’autres fournisseurs de contenus. C’est évidemment le résultat d’accords bilatéraux entre ces acteurs technologiques et chaines de TV ou ayant droits de contenus.

Et comme d’habitude, mes photos de la conférence sont disponibles dans les galeries de ce blog. Quand j’y suis, c’est Michel Safars d’IT- Translation (INRIA) qui est aux commandes de mon Canon !

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Publié le 9 juin 2011 et mis à jour le 4 juillet 2014 Post de | Apple, Digital media, Google, Haut débit, Innovation, Internet, Microsoft, TV et vidéo, USA | 26605 lectures

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Les 4 commentaires et tweets sur “Assises de l’AFDESI sur les TV connectées” :

  • [1] - cedric a écrit le 16 juin 2011 :

    Salut Olivier,
    juste une typo a corriger:! c’est Stanislas Leridon de Dotscreen et non Stéphane 😉
    Cdt

  • [2] - Olivier Ezratty a écrit le 16 juin 2011 :

    Merci de me l’avoir signalé, c’est corrigé!

  • [3] - LB a écrit le 17 juin 2011 :

    Bonjour,

    Merci pour ce compte-rendu pour le moins complet !
    C’est très excitant de voir que les acteurs majeurs du secteur se posent les mêmes questions qu’on peut se poser soi-même.
    Sinon, je crois que Mr. Coquerel qui présentait “une ini­tia­tive locale en France avec le ser­vice HbbTV de T-Seniority” a pour prénom Christophe et non Stéphane.

    Cdt




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Gwendolyn Garan
Gwendolyn est travailleuse indépendante, Game UX Designer, Game UX Researcher (GUR) et 2D Artist pour le jeu vidéo, étudiante en Master 2 Sciences du Jeu, speaker et Formatrice sur l'autisme et la neurodiversité, l'accessibilité et les systèmes de représentation dans les jeux vidéo. #création #jeuvidéo
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Alexandra Ferreol
Alexandra est étudiante d'un bachelor Game Design à L'Institut Supérieur des Arts Appliqués (année scolaire 2019/2020) #création #jeuvidéo
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Ann-elfig Turpin
Ann-elfig est étudiante en deuxième année à Lisaa Paris Jeux Vidéos (Technical artist, 3D artiste), année scolaire 2019/2020. #création #jeuvidéo