J’ai passé deux jours de novembre à Dublin pour assister à mon premier Web Summit, à ce jour la plus grande conférence sur l’innovation numérique et les startups au monde.
Cet événement né en 2010 était au départ une réunion de startups locale de Dublin de quelques centaines de personnes comme il en existe dans toutes les grandes villes. Lancé sur une croissance exponentielle, c’est devenu une place de marché géante rassemblant un nombre record de startups en amorçage ou en phase de croissance, des investisseurs, des médias et des entreprises. Un véritable rouleau compresseur !
Cet événement s’est distingué des autres grâce à la force entrepreneuriale et marketing de son fondateur, Paddy Cosgrave. Cela doit nous servir de leçon, surtout dans la mesure où Paris avait son événement, LeWeb, qui fut pendant plusieurs années le plus grand du genre. Celui-ci a été complètement dépassé par le tsunami du Web Summit.
Je vais revenir sur ces parcours parallèles et surtout évoquer ici les recettes du succès du Web Summit qui constituent de bonnes leçons pour toutes les startups. Je traiterai aussi des leçons entrepreneuriales des startups qui exposaient au Web Summit. Et terminerai dans une seconde partie par quelques innovations intéressantes vue sur place.
Les recettes du Web Summit
Le Web Summit est à la fois une sorte de foire géante aux startups et une grande conférence multi-thématique. La foire rassemblait cette année 2141 startups disposant chacune d’un stand d’à peine 1m2 pendant un jour. Chaque jour, un tiers d’entre elles présentaient leur produit sur 750 stands. Quelques dizaines d’autres startups, bien financées, avaient de leur côté un stand classique.
Les conférences étaient réparties entre une grande plénière pouvant accueillir plus de 4000 personnes et une vingtaine de conférences thématiques accueillant entre 100 et 2000 personnes : money, health, marketing, ecommerce, food, mode, code, machine, accélérateurs, contenus, musique, entreprises, sport et même surf. Plus de 1000 intervenants défilaient sur ces scènes avec comme stars notables, Michael Dell, Bill Ford, Dan Brown (qui traitait du sujet “la science va-t-elle tuer Dieu“) et Chris Froome (l’anglais vainqueur du Tour de France, sans aucun rapport avec la conférence).
Les startups exposantes sont classifiées dans trois catégories : Alpha pour l’émergence, Beta pour les premières levées de fonds et Start pour celles qui ont commencé à décoller. La catégorie Alpha dominait largement en volume avec des projets issus du monde entier avec une diversité jamais vue. Malgré le supposé tri des startups qui exposent, réalisé parmi 60 000 candidates selon les organisateurs, la qualité des projets était évidemment variable. Certaines semblaient avoir été choisies uniquement pour augmenter le compteur du nombre de pays représentés, comme Baboon, une startup qui propose la livraison de repas en Albanie et au Kosovo !
On pouvait observer ces mêmes idées qui germent simultanément partout dans le monde, ou donnent lieu à des “copycats” avec de légères variantes. On se lasse aussi, comme visiteur, de marronniers assez anciens comme ces solutions diverses de collecte d’avis de consommateurs !
Les visiteurs du Web Summit sont d’abord les startups qui viennent en moyenne à trois, et ont deux jours de libre puisqu’elles n’exposent que pendant un jour, ce qui donne près de 7000 personnes. Suivent les startups qui viennent sans exposer et démarchent parfois celles qui exposent, et testent leurs idées. C’était par exemple le cas de Edouard Morhange (Storyplayr) qui témoigne dans Petiweb. Et puis 1231 médias et 1000 investisseurs. Le reste ? De grandes entreprises, des prestataires de service, des consultants, de nombreux étudiants et aussi des demandeurs d’emplois, sans que le décompte des 42 000 participants de l’édition 2015 soit disponible.
Le Web Summit a pu atteindre cette dimension record grâce à une prouesse marketing dont il est intéressant de décortiquer les composantes.
Cela commence avec une mise en avant des startups dans un contexte où elles sont devenues un véritable produit d’appel. C’est le modèle de l’hypermarché face au détaillant qu’était LeWeb. Dans un événement, l’équilibre entre offre et demande est toujours important. Ici, l’offre de startups est pléthorique, jusqu’à l’overdose. La demande était moins évidente à évaluer. Les startups présentes indiquaient cependant avoir eu la visite d’un nombre suffisant de grandes entreprises et parfois d’investisseurs.
L’événement appliquait à ces startups le principe du Minimum Viable Product (MVP) pour leurs stands. On ne peut pas faire plus dépouillé ! En tout, à peine trois mètres carrés de bois aggloméré osb – qui coute moins de 10€ en grande distribution – et un panneau standardisé de format A2 avec le logo de la société, une tag line plus courte qu’un tweet sur trois à quatre lignes, une URL, le pays d’origine et un Twitter ID. Et pour poser ses éléments de démonstration et goodies, une planche de 40cm par 1m de large ! A charge pour les startups de se débrouiller pour attirer les visiteurs. Le plus important pour elles était de bien décrire leur solution en quatre lignes. Et ensuite, de créer des animations avec déguisements, bonbons, démonstrations et tout le toutim.
Le Web Summit utilise ensuite des méthodes de vente très agressives pour attirer les startups, empruntant à la VPC et aux VRP à l’ancienne, quand vous recevez un mailing vous indiquant que vous avez gagné un gros lot alors que vous n’avez gagné que le droit de participer à un tirage, souvent en échange d’une commande.
Les startups du monde entier sont démarchées par les équipes du Web Summit qui leur annoncent par email qu’elles ont été sélectionnées pour être mises en valeur dans la conférence. Elles ont surtout été sélectionnées pour payer leur participation, qui correspond en fait à l’équivalent de places payantes. En 2015, les tarifs étaient de 1950€ pour les startups Alpha avec quatre entrées à la clé, de 2950€ pour les startups beta ayant levé entre 1 et 3 m€, toujours avec quatre entrées, puis 3950€ pour les startups Start ayant levé plus de 3m€, avec deux tickets, un stand plus grand, un accès au lounge et au dîner des intervenants. Ces tarifs ne sont pas exorbitants pour autant par rapport à de nombreux événements internationaux destinés aux startups. En son temps, la conférence DEMO organisée par IDG aux USA exigeait plus de $20K par startup, sachant que le droit à pitcher était compris alors que seules 200 startups parmi 2141 pitchaient au Web Summit. Techcrunch Disrupt est à $3K !
Pour les startups comme pour les participants, la méthode utilisée consiste à faire croire que tout le monde va à l’événement. Quand on consultait la liste des inscrits, on voyait ainsi défiler tout un tas de noms de français. Ils sont en fait intégrés dans la liste dynamiquement en fonction de son adresse IP, une fois sur deux, le reste étant des VIP d’autres pays. Sur PC/Mac et un grand écran, on ne se rend pas trop compte de l’astuce. Elle est plus visible sur smartphone avec un affichage des noms sur deux colonnes. Allez voir par exemple sur le site de RISE qui aura lieu à Hong Kong en mai/juin 2016 ! Ici, c’est la liste des participants au Web Summit qui est fournie ! La ficelle est très grosse mais je suis sûr qu’elle fait son effet ! On arrive cependant à épuiser cette liste après avoir scrollé un certain temps !
Ces méthodes de vente agressives ont été dénoncées par Neil Murray dans “Why I’m not going to Web Summit – in Dublin, Lisbon or anywhere else” paru dans Tech.eu. Ce qui a généré une réaction de Paddy Cosgrave, l’organisateur du Web Summit, qui évoque notamment les méthodes style “big data” qui sont exploitées pour organiser et optimiser l’événement. Cela a généré une contre-réponse de Robin Wauters dans “Is Web Summit a scam? Well, if you have to ask …”.
Au passage, on sent que les organisateurs évitent soigneusement d’ouvrir leurs données. Ainsi, on ne peut faire de recherches sur les participants que dans l’application mobile dans laquelle il faut se logger avec son identifiant de participant. Et allez récupérer des listes dans une application mobile ! Il est aussi impossible de récupérer la liste des startups exposantes.
Le marketing s’appuie sur de la publicité online et surtout, sur une mécanique communautaire astucieuse consistant à faire appel à des étudiants recrutés dans le monde entier qui gagnaient leur place gratuite en échange de relai de l’événement dans les réseaux sociaux. C’est le modèle du travail gratuit !
C’était cumulé à une réduction drastique des coûts variables sur l’édition 2015 qui leur a permis de doubler l’audience sans trop de difficultés, probablement en distribuant de nombreuses places gratuites. La recette : rendre les repas payants ! Cela allait jusqu’à proposer des hamburgers/frites à 20€ dans le Food Summit, heureusement substituable par un repas plus convenable que l’on pouvait trouver dans la rue à côté du RDS.
Mais cela a évidemment fait râler ceux qui payaient leur place mais pas suffisamment pour les détourner de l’événement. C’est cependant un peu dur à avaler quand on a payé le tarif normal, situé entre 1000€ et 2745€. Au passage, leur système de yield management est aussi compliqué que celui des compagnies aériennes ! Les prix démarraient en fait à 395€ pour les premiers billets vendus six mois avant l’événement, via des promos “2 pour 1”.
Qui plus est, l’accueil, les vestiaires et la logistique étaient assurés par 500 bénévoles, étudiants pour la plupart à Dublin. Une autre manière de réduire les coûts et réduire le budget des prestataires. Sur place, seules les équipes de régie vidéo/audio des salles de conférences avaient l’air d’en faire partie.
L’événement porte résolument une ambition mondiale sans limites, avec la capacité à attirer des participants et startups issus du monde entier, même issues des USA (surtout hors Silicon Valley). En 2014, 35% des participants provenaient des USA, 45% d’Europe, 9% et 15% du reste du monde. En comparaison, la dernière édition de Le Web attirait 9% d’américains.
Le Web Summit va être décliné en 2016 à Bengalore (SURGE), Hong Kong (RISE) et New Orleans (Collision). En 2016, les organisateurs ambitionnent d’attirer 100 000 personnes dans les quatre événements. C’est un sommet jamais atteint dans l’écosystème des startups. Cela devient un géant écrasant toutes les autres opérations du genre par la force du nombre. A ce rythme, seule une grande crise financière de l’écosystème des startups pourrait casser cette dynamique.
Enfin, pour l’édition de 2016 à Lisbonne, le Web Summit propose 10000 places gratuites aux femmes de la tech. Une manière comme une autre de compenser le manque chronique de femmes dans cette industrie. Cela donnera donc en théorie un quart de femmes alors que l’on est plutôt en-dessous de 15% actuellement.
Le Web Summit est aussi plein de défauts, mais qui n’ont pas l’air d’empêcher sa croissance !
Tout d’abord, les startups sont ravalées au rang de consommables banalisés avec leurs stands rikiki. Le premier jour, l’affluence était telle qu’il était difficile de circuler dans les allées et il n’était pas toujours évident de savoir à qui on s’adressait sur les stands. D’où l’intérêt pour les équipes startups d’être affublées de t-shirts pour permettre aux visiteurs d’identifier les bonnes personnes !
Les équipes du Web Summit survendent le bénéfice de la présence au Web Summit. Les médias ont une belle salle de presse semblent plus intéressés par la réalisation d’interviews des intervenants que par le parcours des allées de startups. Quand celles-ci voyaient un badge vert de média, ils se ruaient sur son porteur comme s’ils n’en avaient pas vu de la journée ! De leur côté, les startups françaises n’avaient pas vu plus que quelques journalistes français. Dans les allées, contrairement à la folie que l’on peut constater au CES de Las Vegas, il était bien rare de croiser des équipes de télévision.
Les sessions plénières étaient assez ennuyeuses malgré des intervenants parfois prestigieux. Elles enfilaient des formats convenus avec une dominante de tables rondes, de débats avec un journaliste voire de quelques keynotes. C’est d’ailleurs en invitant des journalistes de médias prestigieux à intervenir qu’ils s’en attirent les faveurs ! Rien de moins que CNN, The Guardian, Wired, Financial Times, Bloomberg, CNBC, Wall Street Journal, Forbes, Techcrunch, Reuters, CNET et Re/Code !
Les formats sont tous courts, comme sur TEDx, sauf que là, on n’apprend pas grand chose et la valeur émotionnelle des contenus est très faible. Plus d’une fois sur deux, il s’agit d’un dirigeant de groupe ou de startup qui fait son marketing.
Il n’y avait sinon aucune interactivité, même pas de Twitter wall. Pas de performance ou de musique pour se reposer ou distraire les neurones. C’était bien lisse. De la bonne vieille conférence 1.0 ! Seules les breakouts donnaient lieu à des questions de la salle.
Et puis :
- Les files d’attente dans les sessions hors plénière. Les sessions des breakouts étaient visiblement assez courues et les salles parfois trop petites.
- L’environnement était fatigant et bruyant, ce d’autant plus que l’événement était réparti sur deux zones séparées d’environ 800 mètres, à traverser le plus souvent sous la pluie. Un peu comme le CES de Las Vegas avec LVCC d’un côté et le Sands de l’autre.
- Une logistique de transports moyenne à Dublin avec beaucoup d’embouteillages. C’est un point qui sera entièrement résolu avec le déplacement de la manifestation à Lisbonne.
Mais que voulez-vous, ce n’est pas suffisant pour décourager les participants et les exposants. Des startups se sont rebellées contre le système mais l’expérience montre qu’il y a toujours plus de moutons que de brebis galeuses !
Comment LeWeb s’est fait disrupter
Jusqu’en 2011, LeWeb était le plus grand événement en Europe si ce n’est au monde rassemblant innovateurs numériques et startups. Il avait plafonné en 2012 à près de 3500 participants. Cette année là, le Web Summit créé en 2010 l’avait déjà dépassé avec 3857 participants.
C’est d’ailleurs en décembre 2012 que Géraldine et Loïc Le Meur ont vendu la franchise de LeWeb à Reed Midem. Semble-t-il un bon timing ! Il a alors commencé à décliner lentement alors que le Web Summit poursuivait son ascension fulgurante. La formule de Le Web commençait à s’user, malgré un contenu qui restait de très bonne tenue dans les conférences. Même dans sa dernière édition, le contenu était dans l’ensemble au-dessus de la majorité des conférences auxquelles je peux assister.
La double gouvernance du projet Reed Midem / Le Meur était probablement complexe à gérer. Le premier s’occupait surtout de la commercialisation auprès de sponsors et d’une bonne partie de la logistique tandis que les Le Meur pilotaient surtout le contenu de la conférence, profitant de leur immense réseau entrepreneurial, notamment dans la Silicon Valley où ils étaient installés depuis 2007.
Reed Midem avait acheté LeWeb pour le développer à l’international. Mais, s’activant bien trop lentement, ils n’ont pu que constater qu’ils s’y prenaient bien trop tard ! Une édition avait eu lieu à Londres en 2012, avant la vente à Reed, et 2013, mais sans dépasser les 1000 et quelques participants. Il semblerait que Reed Midem n’ait pas bien saisi le rôle critique des Le Meur dans la valeur de l’événement. Les Le Meur étaient probablement moins motivés après le rachat. Leur séparation dans la vie privée n’a pas du simplifier les choses.
L’autre point épineux de LeWeb était son positionnement et sa taille. Je me rappelle que certains se plaignaient du fait qu’il y avait trop de monde (3500 personnes). L’événement était bien international au niveau des intervenants mais un peu trop français : ils représentaient plus de la moitié des participants et l’essentiel du jury du concours de startups. Il y avait au plus une centaine de stands de startups dans les allées qui étaient dominées par des stands de grandes entreprises sponsors, américaines (Microsoft, Google, Sales Force) ou françaises (Orange, France Télévisions, Renault, Somfy, etc).
Le Web n’avait pas l’ambition à grandir en taille comme l’a fait le Web Summit. A la fois parce qu’il n’est pas facile de le faire à Paris et parce que ce n’était pas le souhait des Le Meur. Ils étaient même tentés d’en faire un événement encore plus élitiste.
En avril 2015, les Le Meur rachetaient la franchise de Le Web à Reed Midem pour un montant non divulgué et probablement très faible. A ce jour, il semble que dans le meilleur des cas, LeWeb, dont l’édition 2015 a été annulée, ne reviendra pas sous la même forme. S’il revient, il est fort probable qu’il devienne un événement encore plus select et pas forcément à Paris.
La concurrence s’est amplifiée avec l’émergence d’un autre événement : Slush, à Helsinki. Piloté par une association, il atteindra pour l’édition 2015 un pic de 15 000 participants, avec un positionnement centré sur l’Europe du nord, la Russie avec un œil sur l’Asie et donc moins international que le Web Summit.
Il existe bien d’autres événements liés à l’entrepreneuriat numérique et à vocation internationale. Notamment DLD qui a lieu à Munich et Tel Aviv ou TechCrunch Disrupt à San Francisco, New York et Londres. Le Webit d’Istambul attire de son côté 4500 personnes. Mais aucun de ces événements n’a l’ampleur du Web Summit !
On retrouve dans les courbes ci-dessus le scénario d’une exponentielle ! Pour une fois, celle-ci n’est pas spécialement liée à un quelconque progrès technique ni aux conjectures de la singularité ! On est plutôt face à un cygne noir !
Le succès du Web Summit nous rappelle que le produit parfait n’existe pas. Il s’améliore par tâtonnements. Facebook et Google ont plein de défauts mais ils ont gagné. En leur temps, VHS, MS-DOS et Windows ont aussi gagné alors qu’ils n’étaient pas forcément les meilleures solutions technologies du moment. Ils bénéficiaient par contre d’un marketing de plateforme plus efficace. On peut penser, à contrario, aux startups d’ingénieurs qui cherchent à créer un produit parfait, dépensent beaucoup d’argent, notamment public, mais ont de graves déficiences en marketing et en capacité à répondre à un besoin pressant de clients potentiels.
Le second point est l’importance d’une approche concurrentielle. Paddy Cosgrave indique ainsi qu’il a créé le Web Summit car il était insatisfait des événements qu’il parcourait en Europe. Il dit s’être différentié grâce à une utilisation extensive d’outils qui relèvent du big data pour optimiser les rapprochements entre intervenants dans l’application de l’événement, pour gérer les mouvements de personnes en s’appuyant sur la mécanique des fluides, etc. De son côté, Reed Midem s’est planté en acquérant Le Web, illustrant ainsi une acquisition ratée, le lot commun des grandes entreprises.
Enfin, le Web Summit n’a pas hésité à être clivant avec son approche marketing agressive. Pour avoir un autre point de vue de cette ambivalence de l’événement, vous pourrez aussi lire le très bon compte-rendu de Ulrich Rosier dans Numerama “Web Summit, l’odeur de l’arnaque et la saveur du succès”.
Dublin s’est aussi fait disrupter
Dublin accueillait le Web Summit depuis 2010. Il s’est lui aussi fait disrupter, et par Lisbonne. Un peu comme Barcelone avait remplacé Cannes pour le MWC en 2007, faute d’une capacité d’accueil suffisante.
Les organisateurs du Web Summit s’étaient lancés en 2014 dans une confrontation avec le gouvernement irlandais. Ils les accusaient de ne plus assez les supporter. Et le gouvernement trouvait leurs exigences démesurées.
L’édition 2014 avait donné lieu à un bagarre autour de la qualité du Wi-Fi dans le RDS qui accueillait le Web Summit. Un peu comme Le Web au 104 à Paris en 2008. Pour 2015, le RDS a investi en équipements pour améliorer la qualité du réseau et le résultat s’est fait sentir puisqu’il était toujours disponible pendant l’événement. Mais il a facturé $1m aux organisateurs au passage qui ont trouvé la pilule amère ! Les plaintes concernaient aussi les embouteillages. Les emails d’échanges entre les organisateurs et le gouvernement irlandais ont même été publiés.
Là-dessus, Lisbonne aurait fait des ponts d’or au Web Summit pour les attirer. Qui plus est, celle belle ville a de nombreux atouts vis à vis de Dublin : il y fait 20°C à 24°C en novembre avec le soleil, elle a une meilleure capacité hôtelière et le centre de conférence est installé au milieu de la zone créée à l’occasion de l’exposition universelle de 1998, à trois stations de métro de l’aéroport. Une ligne qui a été judicieusement prolongée en 2012, alors qu’il n’y a pas de moyen de transport ferroviaire entre l’aéroport de Dublin et le RDS où avait lieu le Web Summit.
Il faut ajouter les nombreuses attractions touristiques de la ville, dont le magnifique “Oceanario” juste à côté du centre de conférence. Seul inconvénient : il y a moins de lignes aériennes directes entre Lisbonne et les grandes capitales du monde. Il restera à convaincre les participants que cette destination vaut le coup. Ce qui devrait être sommes toutes assez facile.
Ceci étant, histoire de se consoler, pour Dublin comme pour Lisbonne, le lieu de l’événement n’est pas corollaire du rôle de la ville d’accueil dans l’écosystème mondial des startups.
Les pratiques des startups
La première question à se poser est : pourquoi sont-elles venues exposer ? Réponse générale : pour se faire connaître, pour rencontrer des investisseurs, surtout français pour les startups françaises, des grands comptes et des médias. On est parfois dans la situation absurde suivante : les français se déplacent en troupeau loin de France, sont contents de s’y retrouver, et considèrent que c’est plus valorisant de se rencontrer dans un contexte international qu’en France. C’est une attitude assez fréquente chez les grands comptes.
Pour rentabiliser leur investissement dans le Web Summit, comment se comportaient les startups présentes ?
La première relevait du délicat exercice consistant à expliquer son activité en trois à quatre lignes sur le panneau de leur stand. Il faut y équilibrer la description de ce que fait le produit et son bénéfice utilisateur. Comme la majorité des startups avaient une offre logicielle, c’était un passage obligé pour retenir l’attention alors qu’au CES de Las Vegas, la majorité des produits sont matériels et peuvent attirer l’œil par leur forme.
Suivent les habituelles pratiques pour attirer les visiteurs : des déguisements, des T-shirt pour les équipes et aussi à distribuer et des démonstrations percutantes, la présence d’un objet connecté aidant un peu.
Certains font même du street marketing en devenant de véritables hommes sandwich ! Tout est bon pour se faire remarquer !
Ensuite, et surtout, elles préparent leurs rencontres, invitent leurs contacts à les visiter, profitent des lounges de rencontres proposés par la conférence, participent aux rencontres organisées pour leur écosystème par de grands acteurs comme Facebook ou Google et font en sorte de se faire remarquer par les médias pour décrocher une interview.
Dans la partie suivante de ce compte-rendu, je vais me pencher sur les startups rencontrées et la présence française. J’y cite en tout 90 startups sur les 2141 de la conférence. C’est énorme mais ne fait que 5% ! Et en plus, j’ai loupé les 750 startups de la première journée de la conférence ! Ce speed dating de deux jours était très instructif et j’ai découvert pas mal de choses intéressantes ! Un tel Summit est donc utile !
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A lire ! “Les leçons entrepreneuriales du Web Summit” de @olivez sur https://t.co/6iaZN7ee9e #websummit #startup #VC
Très instructif compte rendu dont j’attends avec impatience la suite. J’ai personnellement deux gros doutes : le premier sur la capacité de ces conférences à agir comme un vrai tremplin pour les startups qui y participent (surtout au regard de l’ambition de volume) mais surtout, et c’est là le plus grand, sur le business généré autour de tous ces créateurs de projets.
C’est difficile et coûteux de lancer sa startup, et l’ensemble du business de conférences, sommets, etc peut être un vrai trompe l’oeil sur des startups stressées “parce qu’il faut y être” et “qu’elles ont été sélectionnées” alors qu’à leur état de développement, cet argent serait bien mieux réinvesti ailleurs. J’ai toujours une grosse réserve sur ceux qui font payer ceux qui se battent pour leur entreprise, alors que souvent elle n’ont que peu de moyens. Bien sûr ils sont libres me direz vous, mais le jeune startupeur numérique, exposé tous les jours aux blogs, techcrunch et autres, est souvent sous pression pour participer à de tels évènements, qui coûtent cher, mais rapportent peu.
Malgré ses défauts, cela peut valoir le coup d’aller au Web Summit, comme visiteur ou exposant. La majorité des startups que j’ai interrogées ont trouvé cela utile.
La structure de coûts est sommes toutes raisonnable : on peut s’en tirer au pire à 1800€ de frais de conf, les vols low-cost ne sont pas chers pour Dublin (mais un peu plus pour Lisbonne) et avec Airbnb on trouve de quoi se loger pour pas cher non plus. C’est le temps qui est la valeur la plus rare car cela prend 3 à 4 jours en tout.
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Análisis sobre el web summit https://t.co/7v8fzYFp9P ideal para preparar la edición de 2016 y de la edición 2015 https://t.co/7v8fzYFp9P
Le Web Summit ou comment les Startup deviennent des produis de consommation – l’analyse de Olivier Ezratty (@olivez) https://t.co/xxwukvIpRp
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Web Summit de Dublin (7-10 nov) : compte-rendu !
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