Au cœur de la prochaine Bbox de Bouygues Telecom – 1

Publié le 26 juin 2014 et mis à jour le 27 juin 2014 - 9 commentaires -
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Bouygues Telecom a marqué le 26 juin 2014 un très grand coup en lançant une évolution marquante de son offre triple-play fixe en mettant à jour sa box d’accès aux contenus TV et en annonçant que l’accès à la fibre optique (FTTH) serait commercialisée à 25,99€.

La nouvelle box au nom de code “Miami” introduit de nombreuses nouveautés significatives que je vais détailler dans cet article. C’est la seconde box Android du marché français après celle de SFR, lancée fin 2013, mais la première à gérer l’intégralité de l’expérience télévisuelle : la TV live TNT et IPTV, la TV de rattrapage, la VOD, la S-VOD, les jeux, le tout en liaison avec les terminaux mobiles. Elle se distingue par une interface utilisateur très riche et extrêmement fluide. Elle est probablement également l’offre la plus ouverte à ce jour sur le marché de l’IPTV pour ce qui est de l’extensibilité logicielle d’une box d’opérateur.

BT VOL Q TBlanc

Cette box rassemble aussi des briques technologiques provenant de nos meilleures startups françaises dans le domaine de l’expérience télévisuelle connectée : iFeelSmart pour l’interface utilisateur, Spideo pour le moteur de recommandation, AWOX pour l’accès aux données médias du réseau domestique (en DLNA) et enfin, iWedia pour le middleware.

Suivant la marque de fabrique de ce blog, vous allez avoir droit ici à un décorticage en règle de cette nouvelle offre et en quatre parties :

Et pour suivre la mode lancée par Netflix avec “House of Cards”, tous les épisodes sont publiés en même temps !

Le point de départ

Bouygues Telecom est l’un des derniers grands opérateurs télécom/câble à être arrivé sur le marché du triple-play en France. Sa première Bbox conçue avec Thomson a été lancée en 2008. Elle a bénéficié d’une grosse évolution en 2012 avec la Bbox Sensation, dont la version fibre était fabriquée par Samsung, et la version ADSL avec son modem séparé par Sagemcom. Dans les deux cas, la box TV intégrait un processeur Intel Atom Groveland (que l’on trouve aussi dans les box d’Orange et Numericable, celui de la Freebox Révolution initiale étant de la génération antérieure Sodaville) et une nouvelle interface utilisateur conçue par Bouygues Telecom, tournant sur middleware d’origine Sagemcom.

Bbox Sensation

Avec un peu plus de 2,1 millions d’abonnés en triple-play, Bouygues Telecom est le quatrième opérateur français, derrière Orange, Free et SFR (maintenant chez Numericable). Côté mobilité, Bouygues Telecom est le troisième opérateur français pris entre SFR et Free.

L’offre triple play est déployée soit en ADSL classique soit en mixte fibre+cable (FTTLA pour Fiber To The Last Amplifier) via les infrastructures de terminaison de Numericable. Dans le premier cas, la Sensation était fournie avec deux box : une box TV et un modem et dans le second cas, la box était fournie “tout en un” avec le modem câble intégré.

L’interface utilisateur de la box TV était de bonne facture mais sans plus. Un guide de programme correct, la navigation dans les chaines correcte, des offres de VOD en silo et le support de jeux en cloud gaming. L’exemple classique, commun à tous les opérateurs français est ce sempiternel menu pour la TV de rattrapage qui permet juste de lancer les applications de chaque chaine de TV qui propose sa propre interface pour le rattrapage de ses émissions. Il faut juste savoir où taper si l’on veut récupérer les derniers épisodes de “Games of Thrones” ou “Bones” !

Bbox-Sensation-catchup

En gros, cette offre qui a connu quelques péripéties de mise au point à son lancement était convenable, mais pas suffisamment différentiante pour changer la donne entre les opérateurs sur le marché. D’où l’intérêt de cette nouvelle mouture qui change la donne plus radicalement.

La nouvelle offre

Les annonces de Bouygues Telecom avaient lieu lors de deux conférences de presse le 26 juin 2014 à la Tour Sequana de Bouygues Telecom à Issy les Moulineaux. Deux réunions rassemblant chacune une trentaine de médias, loin des grandes messes de Free ou Orange qui rassemblent habituellement plusieurs centaines de participants. Avec les intervention d’Olivier Roussat (PDG), Herminio de Faria (équipe innovation), Edward Bouygues (marketing) et Olivier Abecassis (pour eTF1).

Le premier point de l’annonce portait sur le lancement le 30 juin d’une offre de fibre FTTH à 25,99€, la moins chère du marché à ce jour. En gros, Bouygues Telecom applique au fixe la stratégie de conquête du marché que Free a appliqué au mobile. Cela faisait suite au lancement de l’offre ADSL triple play à 19,99€ en début d’année. Le prix est il est véritable déclencheur de changement d’abonnement selon Olivier Roussat.

Ce lancement du FTTH complète l’offre mixte fibre + terminaison câble FFTLA qui était proposée en partenariat avec Numericable. A ce jour, 13% de foyers français sont connectables à la fibre mais seulement 2,5% sont connectés. Le prix actuellement élevé de la fibre serait un frein. Il est en général supérieur à 35€ par mois. Bouygues Telecom attaque à la fois les zones denses et les zones moyennement denses (soit les villes de taille moyenne). Ils ont actuellement une convention de co-déploiement avec Orange qui couvre 75% du marché. Ils n’ont pas encore signé une telle convention avec SFR qui couvre les 25% restants. L’offre pourra aller à 400 Mbits/s voire même 1 Gbits/s à terme.

En commercialisant l’ADSL et la fibre à un tarif plancher, l’enjeu de la consommation de contenus payants à la demande est clé pour augmenter l’ARPU (average revenue per user). Aujourd’hui, 40% des clients de la Bbox consommes de la VOD et 73% utilisent le replay des chaines de TV. La refonte de la Bbox vise à augmenter ces usages en tirant à la fois partie des possibilités qui seront offertes par le très haut débit et aussi, pour élargir la base de clients adressable en dessous de celle qui est éligible à l’IPTV.

Avec la nouvelle box qui est capable de recevoir les chaines TV à la fois en IPTV (vidéo gérée en multicast “managé” par le réseau opérateur) et en OTT (vidéo streamée), ils sont à même d’augmenter d’environ 3 millions de foyers leur marché adressable avec cette box.

L’autre point clé de l’annonce était de bien valoriser la télévision qui reste le contenu le plus souvent regardé sur une TV. Olivier Abecassis (eTF1) rappelait ainsi que myTF1 est né sur une box Bouygues Télécom et que ce dernier est soucieux de créer un écosystème qui soit respectueux des contenus. Le live est au cœur de l’expérience mais il est aussi important de proposer une “ouverture au monde applicatif”. TF1 est aussi très sensible à la qualité de l’image diffusée tout comme à la sécurisation des contenus, car les ayant droits américains et la FIFA sont très regardants là-dessus !

Dans quelle offres va s’intégrer la nouvelle Bbox qui n’a pas encore de nom commercial ? Cela n’a pas été annoncé. On peut supposer qu’elle va s’intégrer dans une offre ADSL aux alentours de 20 à 25€, d’une offre fibre aux alentours de 25€ et quelques, et peut-être dans une version sans l’accès en mode “OTT” fonctionnant avec un accès Internet d’un autre opérateur ou même via la 4G. Sans compter une évolution probable de l’offre quad-play associant fixe et mobile.

Du côté des chaines TV, l’offre actuelle propose 165 chaines dont 26 en HD en ADSL et 150 chaines dont 29 en HD pour l’offre fibre/câble. On y trouve en plus des chaines de la TNT un bouquet assez classique dans l’IPTV avec notamment AB Moteurs, Equidia, NBJ Hits, LCI (en HD), CNN, CNBC, BBC World et pas mal d’autres chaines internationales ainsi que Disney Channel en HD.

L’annonce commerciale devrait avoir lieu au début de l‘octobre 2014. Il est probable qu’elle s’accompagnera de nouveautés côté contenus avec divers service de VOD voire S-VOD, en plus de la boutique VOD de TF1 qui est déjà prévue.

L’opérateur prévoit de distribuer progressivement la box pour s’assurer d’un déploiement sans problèmes. Ils avaient connu des bugs significatifs au moment du déploiement de la Bbox Sensation en 2012 et veulent éviter de rééditer cela.

La box

La nouvelle Bbox est la plus petite box IPTV du marché français qui intègre un tuner TNT. Sa taille est d’une quinzaine de centimètres de côté sur 4 cm de hauteur. Elle est conçue pour être la box “principale” du foyer. Ce n’est pas une box secondaire. Elle contient toutes les fonctions que l’on est en droit d’attendre d’un tel engin pour alimenter sa TV avec toutes sortes de contenus, y compris ceux qui peuvent provenir de vos mobiles.

Nouvelle Bbox

Ses entrées/sorties sont une prise RJ45 Ethernet, l’alimentation avec une alimentation externe en 12V, une prise HDMI, une prise audio optique, une prise coaxiale pour antenne TNT et une prise USB. Le design du boitier est fonctionnel sans être particulièrement recherché.

Elle intègre un processeur Marvell à quatre cœurs ARM A9, le ARMADA 1500 Pro “Berlin” (BG2Q) dont voici le layout ci-dessous. Chacun des cœurs du CPU est un noyau ARM A9 32 bits, une architecture que l’on retrouve dans de nombreux chipsets de smartphones et tablettes haut de gamme tournant sous Android.

Le chipset Marvell comprend un moteur graphique 3D Vivante GC4000 supportant Open GL, complété d’un moteur 2D GC420. Le GPU Vivante offre une puissance voisine de celle de la XBOX 360, une performance maintenant courante dans les chipsets ARM haut de gamme. C’est aussi le cas du dernier NVIDIA K1 lancé au CES 2014, qui dispose de son côté de 192 cœurs graphiques dans une architecture massivement parallèle.

ARMADA 1500 Pro Layout

Marvell est un acteur émergent du marché de la box qui s’est fait remarquer en 2010 en étant le premier à supporter Google TV sur lequel il a parié très tôt. Aujourd’hui, la clé Chromecast de Google tourne avec un Marvell Armada 1500 mini, une version très simplifiée et mono-cœur du processeur de cette Bbox. Le chipset choisi par Bouygues Telecom pour équiper sa box est la version la plus haut de gamme qui soit disponible aujourd’hui chez Marvell.

Comme je l’évoquais dans le dernier Rapport du CES 2014 (page 222), Marvell a été cofondé par Weili Dai, une américaine d’origine chinoise née à Shanghai. C’est la seule femme à la tête d’une société de semi-conducteurs aux USA. Et son frère Wei-Jin Dai est le fondateur de Vivante, qui fournit le GPU des processeurs ARMADA de Marvell !

Le chipset Marvell de la nouvelle Bbox contient aussi un processeur graphique QDEO d’amélioration des images intégrant notamment un upscaler. Cette technologie QDEO est parfois utilisée dans des amplificateurs audio/vidéo, comme chez Onkyo, en concurrence avec les upscalers Faroudja, qui sont depuis 2007 sous la coupe de ST Microelectronics.

Le chipset comprend aussi un cœur vMeta pour le traitement d’une très grande variété de codecs vidéo, si ce n’est la meilleure du marché, sauf le HEVC qui n’est pas encore supporté. Il peut décoder deux flux 1080p en parallèle, ce qui permet de présenter deux images simultanément dans l’interface utilisateur, une possibilité que je n’ai pas vue dans les démonstrations même si elle peut certainement servir à gérer du “picture in picture” d’un flux 1080p sur un autre.

Le chipset supporte sinon toutes les entrées/sorties classiques : Ethernet, SATA (pas utilisé), USB, carte SD, HDMI 1.4A, audio S/PDIF. Le Wi-Fi jusqu’au 802.11n (pas encore de ac qui monte à 300 MBits/s par canaux) est supporté via un port PCIe et un composant réseau Marvell intégrant le Wi-Fi et le Bluetooth, intégré sur la carte mère de la box. Mais l’opérateur recommande d’accéder aux contenus en ligne via une liaison filaire Ethernet ou bien courant porteur.

L’autre point clé de ce chipset est l’intégration de toutes les briques de sécurité qui permettent le support de la TV payante, y compris Canal+. Les principaux systèmes de contrôle d’accès du marché sont supportés, tels que ceux de Verimatrix qui sont utilisés par la box. Au cœur de ce dispositif se trouve le support de TrustZone, une technologie de ARM qui est directement intégrée dans ses cœurs A9 et qui permet de séparer l’exécution du code du système d’exploitation généraliste (ici, Android) de celle du code du middleware vidéo sécurisé qui va décrypter les vidéos protégées via les systèmes de protection de la TV payante.

Trustzone

La box comprend 2 Go de RAM, le maximum utilisable avec le processeur ARMADA 1500 Pro et une capacité particulièrement utile pour les jeux. S’y ajoutent 16 Go de mémoire flash pour le stockage local, surtout dédié au guide de programme, aux méta-données et aux applications installée. Il peut être complété par un stockage externe pour l’enregistrement de la TV : soit un disque dur de capacité libre (jusqu’à 4 To aujourd’hui, ou plus via un serveur domestique de type NAS), soit une carte SD qui peut rentrer dans un slot dédié de la box (on trouve des cartes qui vont jusqu’à 512 Go, mais qui sont bien plus chères que les disques durs de taille équivalente : $1500 !). Ce slot SD permet aussi de visionner les photos sorties de son appareil photo (en JPEG) ! L’utilisation d’un NAS via le réseau est prévu à terme. Le boitier pourra alimenter en USB un disque dur de 2,5 pouces, dont les capacités vont  actuellement couramment jusqu’à 1 To, tout en gérant sa mise en veille au même titre que la box.

Le disque dur externe n’a pas besoin d’être reformaté ou partitionné spécifiquement pour la box. Android est capable d’y créer un répertoire qui contiendra les contenus enregistrés des chaines TV sous forme cryptée.

Le boitier est un peu plus gros que les plus petites box OTT du marché comme les Roku ou Apple TV. Pour deux raisons : tout d’abord, il est “fanless” (pas de ventilateur) et a besoin de nombreux trous pour la ventilation. Ensuite, il comprend un simple tuner TNT qui prend toujours un peu de place avec son blindage.

Du point de vue du réseau domestique, la nouvelle Bbox est indépendante de la gateway (votre “modem” ADSL, câble ou fibre). Vous pouvez ainsi l’emporter en vacances et utiliser la connexion Internet et/ou antenne TNT disponible pour en profiter.

Le support d’Android, à l’instar de celui de Linux qui était déjà présent dans les autres boxes du marché, permet celui de nombreux périphériques tels des claviers Bluetooth, bien pratiques pour utiliser les fonctions de recherche de l’interface utilisateur de la box, notamment lorsqu’il intègrent un pad tactile. Il s’agit de la dernière version de Jelly Bean d’Android (probablement une 4.3.1). Elle évoluera plus tard dans les versions suivantes d’Android, dont à terme, Android L, annoncé à Google I/O le 25 juin 2014.

En standard, la Bbox est livrée avec une télécommande classique sans fioritures. Il est prévu la sortie, plus tard, d’une télécommande plus sophistiquée avec gyro/accéléromètre et commande vocale. En attendant, on peut aussi utiliser son smartphone et une application dédiée pour y virtualiser la télécommande et aussi passer par de la commande vocale, par exemple dans la fonction de recherche. La commande fonctionne avec le support du tactile sur le smartphone qui émet des vibrations lorsque le pouce dépasse de la zone de commande (la commande “haptique”). Les manettes de jeu standards sont également supportées, notamment les manettes sans fil utilisant un dongle USB.

Ce genre de box est bien moins couteuse que les box de génération précédente. Elle économise en particulier le disque dur interne et la taxe sur la copie privée qui va avec (45€ pour 320 Go). Elle n’a pas de lecteur Bluray, plus une source de problèmes qu’autre chose et un support de moins en moins critique alors que la consommation de VOD et de S-VOD se développent au détriment des supports physiques DVD et Bluray.

La carte mère est beaucoup plus simple dans son layout car le SoC Marvell comprend plus de fonctions standards que les processeurs Intel Atom qui équipent les box actuelles de Orange, Free, Numericable et l’ancienne Bbox. Au final, la Bbox doit couter environ la moitié des box actuelles, un élément non négligeable qui permet d’être compétitif côté prix comme marge. Elle est fabriquée par un constructeur Taïwanais non identifié.

Côté débits nécessaires pour la vidéo, Bouygues Telecom encode les chaines TV à 2,7 Mbits/s en SD, entre 4,5 et 6 en HD et jusqu’à 15 Mbits/s pour la diffusion en câble et fibre. Les chaines TV sont diffusés en HLS (non managé) et en IPTV multicast (réseau managé).

Ma grande question est évidemment : quid du support de la 4K ? Il n’est pas encore assez courant chez les fabricants de chipsets pour être disponible en volume et à un prix intéressant. Il est prévu dans la roadmap de Marvell qui le supportera avec un chipset “pin compatible” qui ne remettra pas en cause le layout de la carte mère.

Un peu comme Free et Orange il y a quelques années avec Intel, Bouygues a eu une relation étroite avec Marvell, notamment pour faire évoluer les spécifications de leur ARMADA, en particulier pour l’aspect sécurité.

L’adoption de l’architecture ARM et de Marvell par Bouygues Telecom pourrait faire des petits. Il n’est pas impossible que d’autres opérateurs français fassent de même pour leur prochaine génération de set-top-box, qu’ils adoptent Android ou pas. L’architecture ARM semble maintenant incontournable. Les chipsets associés sont un peu moins chers que ceux d’Intel, les cartes mères plus simples à concevoir en s’inspirant de technologies utilisées dans les mobiles et elles consomment moins. Qui plus est, Intel semble avoir délaissé ce marché avec une roadmap quasiment inexistante pour le futur de ses processeurs Atom destinés aux set-top-box.

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Voilà pour le matériel ! L’épisode suivant traite de l’interface utilisateur et les contenu.

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Publié le 26 juin 2014 et mis à jour le 27 juin 2014 Post de | Actualités | 49734 lectures

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