Je continue la couverture de LeWeb au sujet des plateformes. Après avoir couvert les grands leaders de l’Internet, je passe au sujet de la communication de la mobilité et des médias.
Plateformes de communication et de mobilité
Hormis le stand indigne de l’éditeur qui se trouvait dans le Dock des startups (!), Microsoft était présent sur scène à deux reprises. D’abord avec Charlie Kindel, le General Manager en charge de l’écosystème des développeurs de Windows Phone 7. Chez Microsoft, on comprend bien l’intérêt d’une approche développeur depuis longtemps. Cela a même été “ma” business school. Encore faut-il avoir un bon produit pour commencer. C’est la conviction de Charlie Kindel pour ce qui est de WP7. Loic Lemeur veut savoir combien en ont été vendus après deux mois de disponibilité chez les constructeurs. Pas de réponse ! Normal car on ne fournit ce genre d’information qu’à la publication des résultats trimestriels pour la bourse. Mais il semblerait que les ventes soient pour l’instant décevantes. Charlie met en avant quelques éléments différentiants de WP7 au delà se son interface utilisateur originale : on y fait tourner des jeux de la XBOX, c’est un “game phone”. C’est aussi un téléphone Zune (mais un iPhone est aussi un iPod…). Enfin, l’intégration des réseaux sociaux est très poussée. On peut se synchroniser facilement avec Facebook sans passer par un compte Windows Live account. Côté développement, trois types d’interfaces sont proposés : Silverlight (commun aux postes de travail, et disponibles hors de Windows), XNA pour les jeux 3D (commun avec la XBOX) et tout de même Java et HTML (pour le web mobile). En tout cas, Charlie peut compter sur Loic Lemeur qui jouait le rôle d’homme sandwich avec un WP7 à la main pendant son intervention. Avec Seesmic, Loic a développé un partenariat technologique fort autour de l’adoption de Silverlight (aux dépends d’AIR d’Adobe, abandonné pour l’occasion). Qui dit Silverlight dit bon support de WP7 pour Seesmic.
Intervenait aussi Friz Lanzmann du CorpDev, en charge des acquisitions. Quand on pense que Microsoft a quasiment stoppé net ses acquisitions en 2010. Avec une seule acquisition en 2010 pour six en 2009, année de crise, on est en droit de se poser des questions. Réponse de l’intéressé : 2010 est une année avec plein de sortie de produits (WP7, Kinect, Office 2010) donc les équipes produits étaient trop occupées. Pipo ! De 2005 à 2009, les acquisitions n’ont pas cessé et le calendrier produit était tout aussi garni. La stratégie d’acquisitions a du marquer un coup d’arrêt pour une raison pas vraiment documentée.
Dans les plateformes mobiles, il y avait également BlackBerry et Nokia, ce dernier ayant sérieusement chaud aux fesses face à l’émergence des smartphones. Il tient le coup grâce à sa part de marché dans les feature phones et les téléphones d’entrée de gamme. Il a bien une approche développeur et un application store (Ovi). Mais l’interface des smartphones Nokia reste un handicap majeur, même dans les dernières versions. Sur LeWeb, Nokia avait un beau stand, surtout destiné aux développeurs mobiles. On pouvait y rencontrer l’américaine Anina, la fameuse top model alumni de LeWeb depuis le début. Elle est partenaire du constructeur finlandais et installée depuis quelques années à Beijing. Son site 360Fashion.net propose une solution web type couteau Suisse pour les marques dans le fashion (site mobile, social e-commerce, live streaming de défilés, etc).
Chez France Telecom et Orange, ce n’était pas l’intervention assez convenue de Stéphane Richard, son CEO, qui valait le détour, mais le stand Orange. On y découvrait la contradiction classique d’un opérateur qui cherche à la fois à s’intégrer verticalement en enrichissant son offre de services divers et à s’intégrer horizontalement pour attirer des tiers. J’y ai fait connaissance avec l’équipe d’Orange API qui fédère à l’attention des développeurs l’ensemble des différentes APIs permettant d’accéder à l’opérateur, pour l’instant très orientées mobilité. Mais on ne sera pas surpris d’ici fin 2011 de voir ce concept étendu à la télévision connectée, après la sortie de la prochaine set-top-box dite “Next”, à base Atom Sodaville. L’approche montre que cette équipe a compris les enjeux de plateforme de l’opérateur. Il lui reste à entrainer le paquebot.
D’un autre côté, on s’active donc en créant des services en tout genre, notamment autour de l’agrégation de contenus. Il y a le site d’information 2424actu.fr qui est une sorte de service de TV de rattrapage des informations télé et radio. On pouvait voir Read&Go, un service de presse en ligne démontré sur tablette Android de Samsung. Les contenus sont au format ePub et protégés par le DRM d’Adobe. La solution a été développée en partie par la startup française miLibris que j’avais découverte dans un comité de sélection de Scientipôle Initiative (le monde est petit). Mais il faut arracher cette information aux équipes d’Orange. On va bien voir comment cela se goupille avec le kiosque numérique qui va être lancé dans le cadre du “grand emprunt” et est piloté par Frédéric Filloux, ancien de Libération et co-auteur avec Jean-Louis Gassée de l’excellentissime blog MondayNote spécialisé dans la presse en ligne. Je reste cependant dubitatif sur une telle offre. Soit elle est dédiée aux clients d’Orange et cela créé une discrimination pour l’accès aux contenus, soit elle est ouverte à tous, et cela ne créé pas de synergie particulière avec l’offre de base de l’opérateur (son rôle de tuyau). Eternel dilemme ! J’ai aussi croisé l’incontournable Jean-Louis Constanza qui pilote Orange Vallée, qui aurait survécu à l’arrivée de Stéphane Richard. Et de me montrer des applications Java pour feature phones car il n’y a pas que les smartphones dans la vie. Et de citer Memory-Life, une “boite à souvenirs” numérique qui ferait un tabac (je ne fume pas), de la visoconférence mobile et enfin, de me teaser sur l’interface de Next, qui va déchirer. De quoi entretenir le suspens alors que la Freebox 6 va être annoncée mardi 14 décembre.
Plateformes médias
Il y avait un panel media (vidéo YouTube) avec des représentants de CNN, du Wall Street Journal, de Weblogs SL, Techmeme et Pierre Chappaz de Wikio. C’était l’endroit pour parler de Wikileaks ! On avait évité cela dans toutes les autres sessions. C’est un sujet à part entière. Mais en creusant un peu, il s’agit bien d’une “plateforme”.
Wikileaks est bien une plateforme. Elle agrège des contenus confidentiels et organise ensuite sa diffusion par étape aux Internautes et en se servant d’intermédiaires dans les médias. Les médias de la presse écrite (Le Monde, New York Times) sont les “développeurs” de Wikileaks, qui exploitent la matière brute fournie par Wikileaks pour fournir une “solution applicative”, l’analyse documentée des fuites. Wikileaks a bien une stratégie de plateforme, rendue d’autant plus nécessaire par les attaques DNS & co dont le site est victime. En agissant à la mode “SkyNet (Terminator) et en disséminant les contenus largement par une stratégie de plateforme, les actions de censure évoquées de manière alarmiste par Pierre Chappaz sont finalement sans grand effet. Certes, l’affaire Wikileaks a mis en branle – dans le cas du CableGate – la première censure globale de l’Internet pilotée par plusieurs gouvernements concertés. Mais au au bout du compte, SkyNet, non, les Internautes et l’architecture éminemment distribuée de l’Internet et une bonne capillarité de distribution ont eu la peau des gouvernements !
J’ai été sinon surpris de voir France Télévision avec un grand stand de partenaire Gold. Ils faisaient des tournages d’interviews, proposaient de se transformer un instant en présentateur de météo sur un fond vert et montraient leur approche communautaire émergent. Mais c’était la démonstration de HbbTV sur TV LG Electronics qui méritait le plus le détour, reprenant le scénario présenté pour la première fois à l’IBC Amsterdam de septembre 2010. Petit détail marketing : il n’y avait aucune indication autour des écrans de TV concernés, un comble. HbbTV est un standard dont on parlera de plus en plus. C’est à la fois une sorte de Teletext en HTML, un concurrent de Google TV, un moyen de créer un wall-garden Internet autour des chaines TV. J’ai déjà eu l’occasion d’évoquer cette guerre qui s’annonce longue entre les chaines TV et les désintermédiateurs en puissance que sont Google et Apple.
Pour Bernard Fontaine de France Télévision, HbbTV est un moyen d’éviter un standard de facto provenant des USA. Sorte de SECAM de la télévision connectée à ceci près qu’il est commun avec l’Allemagne. C’est un sujet très sérieux qui aurait pu être traité pendant les plénière de LeWeb mais a été zappé. Peut-être l’année prochaine ?
Prochain épisode sur les plateformes, les moyens de locomotion et… le cerveau. C’est pas une histoire de dingues de passer son dimanche à rédiger le compte-rendu d’une conférence ?
Tous les articles sur LeWeb 2010 :
LeWeb 2010 – Vue d’ensemble
LeWeb 2010 – Les startups
LeWeb 2010 – Les plateformes 1
LeWeb 2010 – Les plateformes 2
LeWeb 2010 – Les plateformes 3
LeWeb 2010 – Epilogue
Reçevez par email les alertes de parution de nouveaux articles :
Au sujet de l’apparente absence d’acquisitions par Microsoft, il semble qu’ils aient continué à faire de “petites” emplettes (<$10M) mais en restant très silencieux, contrairement à Google qui communique plus ouvertement sur ses acquisitions.
Mais pourquoi une telle politique, pas terrible en terme d'image ?
Cf. http://paidcontent.org/article/419-microsofts-secret-acquisition-spree/
En fait, Google aussi fait des acquisitions cachées. J’en ai discuté avec le gars des M&A Europe de Google à LeWeb. Ils ne communiquent pas eux-mêmes, mais la communication leur échappe souvent donc ils doivent “annoncer” les deals après les fuites. Regarde la capacité à conserver le secret sur Groupon… !
Pour MS, leur acquisition sure est Canesta, un capteur 3D, concurrent de celui de Prime Sense utilisé dans Kinect. A n’y rien comprendre ! Complémentaire, concurrent, seconde source, va savoir !