L’année dernière, je vous avais concocté un tableau de comparaison du revenu moyen par utilisateur de sociétés de l’immatériel : éditeurs de logiciels, opérateurs télécom et de contenus et surtout, sociétés du secteur de l’Internet.
Ce petit travail d”économétrie me permet notamment de jauger les modèles économiques des startups que je peux être amené à expertiser ou coacher. Surtout au regard de leur stratégie de monétisation publicitaire ou payante.
Cette consolidation de données n’est pas évidente car peu de sociétés sont cotées en bourse et déclarent donc leur revenu. Les autres sont censées le faire – tout du moins en France – mais elles ne le font généralement pas.
Un an plus tard, j’ai mis à jour ce tableau en réactualisant les données et en quasiment doublant le nombre de sociétés présentes, que ce soit dans les médias (TF1, M6) ou dans l’Internet (surtout des entreprises cotées américaines ou anglaises). L’ARPU (Average Revenue Per User) est toujours calculé à partir du chiffre d’affaire annuel de la société ou de l’activité considérée, divisé par le nombre d’utilisateurs. Ce nombre est soit un trafic de visiteurs uniques mensuels pour les activités web, soit un nombre d’abonnés moyen pour les services payants, web ou pas.
Le thermomètre de l’ARPU 2008 complet est disponible dans un fichier PDF.
En voici un zoom sur les sociétés dont j’ai récupéré l’ARPU :
Il faut évidemment prendre ces ARPUs avec des pincettes. Ce sont des indicateurs, pas des chiffres précis, surtout pour les sociétés en croissance. J’extrapole parfois leur revenu annuel à partir du dernier trimestre publié, je le cale à des données d’audience obtenues par des moyens divers (Comscore, Nielsen, déclaratif des sociétés) qui sont loin d’être cohérents. Donc, la marge d’erreur doit être significative. Il n’empêche que les résultats semblent corrects et pas surprenants.
Que peut-on donc observer dans le tableau ?
- La même disparité de revenus selon les business. Evidemment, le payant rapporte plus par utilisateur, mais en général avec des volumes plus faibles. Au moins dans l’Internet. Et les chaines TV comme TF1 et M6 caracolent avec un ARPU supérieur à 100€. ARPU qu’elles doivent protéger sous les assauts de l’Internet, qui attire de plus en plus les jeunes audiences.
- L’ajout de Wikio, startup relativement récente, dont le CEO, Pierre Chappaz a publié ses principales données économiques lors de son intervention à la conférence LeWeb. Son ARPU est très faible quoiqu’en croissance constante. Il bénéficie des fonctions de shopping du site, mais est encore limité par l’absence de revenu publicitaire significatif sur 70% de l’audience (hors France). Mais dans le meilleur des cas, je ne vois pas Wikio dépasser un ARPU de 1€, ce qui le laissera très bas dans ce hit parade, montrant la difficulté qu’il y a à vivre de la publicité avec un modèle de désintermédiation qui n’est pas le search.
- L’ajout de Blinkx, un moteur de recherche de vidéos, qui lui aussi a un ARPU très faible. Notamment parce que le service est principalement distribué en marque blanche.
J’ai ensuite tenté d’ajouter les comptes d’exploitation d’un maximum de sociétés. Pas facile. Notamment parce qu’il n’est pas déclaré de la même manière en France et aux USA. Là bas, les rubriques R&D, Ventes et marketing, et coûts administratifs sont bien distinctes ce qui permet d’avoir une idée des variations de business models. En France, on a juste les salaires et, encore, cela dépend !
Dans le tableau complet, la “revenue base” est un chiffre d’affaire de trimestre, semestre ou année complète dans la monnaie d’origine déclarée (€, $, £) par la société, indiqué dans la colonne “Source” et cohérente avec les colonnes suivantes qui vont avec. Le “revenue/Y (m€)” est un revenu annuel calculé sur la dernière année glissante pour laquelle cette information est disponible. Le taux de change $/£ date un peu mais n’a pas trop bougé depuis.
Tout ceci permet pour les entreprises qui publient leur résultat de calculer leur résultat opérationnel par utilisateur (sorte d’EBITA par utilisateur) un autre indicateur de la santé de leur modèle économique. Et voici ce que cela donne :
On y voit que pas mal de portails gagnent très peu par utilisateur : moins de 1€ en général. Et on découvre un modèle d’intermédiation Internet qui fontionne très bien avec Expedia, bien au dessus de Google. Dommage pour Microsoft qui avait créé ce service puis l’avait revendu ! Tout comme les services de petites annonces d’immobilier (RightMove et SeLoger) également bien profitables. C’est l’avantage de business pur internet qui se financent à la commission ou avec un service payant.
Petit exercice statistique : voir s’il y a une corrélation entre cette marge et audience vraiment. Ce graphe montre qu’il n’y en a pas vraiment. A moins de 30 millions d’utilisateurs, on trouve de tout. Et dessus, on retrouve une progressivité de la marge en fonction de l’audience. Effet Google oblige.
Au passage <pub>, je signale aux entreprises et organisations que cela pourrait intéresser que ces éléments sont l’une des composantes d’une formation d’une journée que je donne à la demande sur les modèles économiques de l’Internet </pub>.
Reste maintenant à obtenir le coût d’acquisition par utilisateur pour chacun de ces services ! Rapprocher le coût d’acquisition avec le résultat net annuel serait très indicateur de la santé d’un modèle économique ! Ce qui me donne l’occasion de faire un appel au peuple pour collecter – ou identifier les sources de – ce genre d’informations et les partager ici même !
Sur ce, il me reste à vous souhaiter d’agréables fêtes de fin d’année !
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Passionnant, merci
Comme d’habitude merci 🙂
Excellente analyse, qui m’aidera par ailleurs à faire 1 ou 2 courts posts sur BlogBers.com
Merci.