Google = Microsoft ? (3)

Publié le 13 avril 2007 et mis à jour le 28 avril 2007 - 8 commentaires -
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Nous allons terminer ce tour d’horizon avec des aspects plus “people”. Je rajoute au passage une petite partie sur les approches d’écosystèmes, suites aux remarques de Julien Codorniou.

Les stratégies d’écosystèmes

Les deux sociétés en ont toutes les deux compris l’importance. Mais la nature de leur activité est telle que cette notion est nettement plus importante pour Microsoft que pour Google.

De tous temps, Microsoft a énormément investit sur son réseau de partenaires, un levier incontournable pour non seulement revendre ses produits, mais également les déployer et les compléter par des solutions métiers. La variété des marchés touchés par Microsoft les amène donc à déployer une stratégie partenaires tout azimut, notamment chez les éditeurs de logiciels, mais aussi les SSII, les revendeurs, les sociétés de formation, ainsi que chez les constructeurs de PC comme de périphériques. Et dans un registre plus difficile à mettre en oeuvre pour eux: les opérateurs télécoms et les médias. Les logiciels des plateformes Microsoft présentent une adhérence technique significative, qui créé une inertie de marché favorable à l’éditeur, en plus de leur intégration et interdépendance, qui en rajoute. D’où des relations avec les développeurs très anciennes et développées qui n’ont pas beaucoup d’équivalent dans l’industrie: Apple, Sun et dans une certaine mesure IBM et Oracle étant juste derrière (comme entreprises privées) dans les efforts consentis vis à vis de cette audience. Rien qu’en France, les relations développeurs de Microsoft représentent la moitié de l’effectif total de Google France!

Chez Google, l’écosystème de partenaires est à la fois plus simple et plus étroit. Ils n’ont pas besoin de revendeurs, pas besoin de SSII, ni de formateurs, et encore moins de constructeurs et de ces maudits pilotes de périphériques pour faire utiliser leurs sites Web. Leur approche développeur consiste à encourager les créateurs de sites Web à intégrer différents composants de Google comme AdSense ou Google Maps. Ils proposent également un intéressant moteur de recherche de codes sources: Google Code Search. Cette approche développeurs n’a pas encore porté tous ses fruits et pourrait être démultipliée dans les années à venir. L’adhérence de plate-forme chez Google n’est pas encore aussi significative que chez Microsoft. D’où des tactiques de placement du moteur de recherche dans les navigateurs, soit via des OEM qui préconfigurent des PCs sous Windows, soit par leur partenariat avec Firefox ou leur investissement dans Maxthon. Et enfin, avec des opérateurs telcos pour leurs solutions pour mobiles. Google propose de plus d’excellents outils pour optimiser le trafic des sites, surtout Google Analytics, déjà cité. Ce qui alimente notamment une composante clé de l’écosystème de Google: les Web agencies et autres sociétés spécialisées dans l’optimisation de trafic et de revenus publicitaires. Plus récemment, Google a aussi lancé un programme partenaire entreprises lié à ses offres dont on avait vu qu’elles étaient plus lourdes à commercialiser que des services Internet. Google se distingue aussi par la contribution active à des projets Open Source divers (Java, Eclipse, Linux, ODF, Python). Mais ils se gardent bien comme tant d’autres de confier leurs “bijoux de famille” à la communauté open source!

Pour comparer le poids de l’approche développeur des deux sociétés, vous pouvez jeter un petit coup d’oeil sur le site pour les développeurs de Google (http://code.google.com) et celui de Microsoft (http://msdn2.microsoft.com).

Il serait intéressant de comprendre comment sont organisées les équipes commerciales de Google. Je suspecte que leur majorité est orientée vers les grands clients annonceurs. Chez MS, quasiment la moitié des forces de vente et avant-vente entreprises et PME est tournée vers les partenaires. Dans les activités grand public (MSN, XBOX), c’est proche de 100%.

Il y a un signe indirect qui montre que l’écosystème est moins important pour Google qu’il ne l’est pour Microsoft: c’est la communication. A l’instar d’Apple, Google a tendance a cultiver le secret dans sa communication. C’est en train de changer dans le bon sens, mais le point de départ est très bas. Prenez juste le cas de la France: qui s’exprime dans les médias chez Google? Qui a un blog? Chez Microsoft, la culture de communication est beaucoup plus ouverte. Rien qu’en France, une bonne cinquantaine de personnes sont en contact régulier avec la presse, une trentaine ont leur blog, et une centaine interviennent dans des séminaires.

Une direction multi-céphale

La tête de Google et de Microsoft comporte une direction bicéphale, voire tricéphale, et qui fonctionne dans la durée. Peu d’entreprises de high-tech ont réussi cette combinaison. Steve Jobs est maître après Dieu chez Apple. Larry Ellisson n’a pas bien géré sa cohabitation avec Ray Lane chez Oracle. Scott McNeally a été longtemps patron sans égal chez Sun Microsystems. Et dans pas mal d’autres endroits, le CEO n’est même pas le vrai patron, mais plutôt le Conseil d’Administration avec ses guerres de palais, comme chez Hewlett-Packard. Rares sont également les entreprises comme Google ou Microsoft ou la tête comprend encore des dirigeants à forte culture technologique.

Le couple Bill Gates / Steve Ballmer a vécu pendant longtemps, depuis qu’ils ont fait Harvard ensemble au milieu des années 1970. Mais avant que Steve Ballmer devienne le numéro 1 de Microsoft, d’autres Présidents ont joué le rôle de numéro 2 sous Bill Gates, notamment Jon Shirley (1983-1990) et Mike Hallman (1990-1992). Dans les trois cas, ils apportaient une culture business, vente et marketing à la société, complémentaire de la culture à dominante technique de Bill Gates. Et aujourd’hui, Bill Gates se désengage progressivement de Microsoft, après 32 ans de services, Ballmer étant à la tête de la boite depuis 1998 (comme President) et 2000 (comme CEO). Comme sorte de CTO-méta-gourou, Gates a été plus ou moins remplacé par Ray Ozzie en 2006. Et même s’il est fortement teinté vente et marketing, Ballmer est d’une compétence technique fort honorable.

Chez Google, les fondateurs Larry Page et Sergei Brin ont tous les deux des traits communs avec ceux de Bill Gates: ils sont smart, ont un fort tropisme technique, et disposent d’un sixième sens business, même s’ils n’en sont pas les rois. Ils ont aussi créé leur boite très jeunes et ne sont pas de bons communicants. Aujourd’hui, ils jouent un rôle de direction technique chez Google, et se sont adjoints les services d’Eric Schmidt (le gars à la cravate au dessus), un CEO expérimenté passé chez Sun et Novell. Schmidt apporte la séniorité et une expérience globale du business dans la IT. Il a dirigé des groupes produits chez Sun. C’est également le cas de Steve Ballmer qui avait dirigé la Division produit en charge de Windows entre 1983 et 1992!

Dans les deux cas, le CEO actuel est arrivé après la création de la société : 5 ans pour Ballmer (en 1980) et 3 ans pour Schmidt (en 2001). Et la complémentarité comme la symbiose avec le ou les fondateurs est excellente.

La direction de ces deux entreprises rassemble ainsi une formule magique: des visionnaires technologiques accompagnés de businesmen et de managers qui savent ce que c’est de gérer des produits et des cycles de développement. Mais pas des financiers ni des consultants, que l’on a pu voir passer à la tête d’autres sociétés de la high-tech, avec plus ou moins de bonheur!

Mais la tête ne fait pas tout!

Management et ressources humaines

Là aussi, Google et Microsoft partagent quelques points communs intéressants.

Ils cherchent à recruter les meilleurs et s’en donnent les moyens. Ils se soucient plutôt bien de l’environnement de travail de leurs collaborateurs, au dessus de la moyenne de l’industrie. Et leurs dirigeants ont pas mal de points communs.

Les recrutements sont effectués en grande partie par une démarche des meilleurs étudiants sur les campus. Très attirants pour les jeunes diplômés comme les moins jeunes, ils traitent en masse des centaines de milliers de CV. Google a poussé le processus très loin en automatisant le tri des CV qu’ils reçoivent. Leur processus de sélection, notamment des développeurs, est très rigoureux et nécessite le passage d’entretiens avec de nombreux collaborateurs, managers ou non, de l’entreprise. Dans les deux boites, on peut ainsi facilement atteindre une dizaine d’entretiens avant d’être sélectionné. Dans les équipes de développement, la priorité est donnée au quotient intellectuel. Et chez Google, également à la capacité à travailler en équipe. Microsoft s’attache également à celà, mais a du progrès à faire en la matière.

Les sociétés recrutent également des pointures provenant d’autres acteurs ou de concurrents. On a vu récemment quelques transfuges passer de Microsoft vers Google, mais pas dans l’autre sens. Pour ces transfuges, une cure de jouvance peut-être, mais pas vraiment l’aventure car on ne peut pas dire qu’un passage chez Google relève d’une prise de risque fantastique. Parmi les transfuges, on compte Kai Fu-Lee, l’ancien patron de Microsoft Research en Chine, Vic Gundotra, ancien General Manager des Relations Développeurs et Adam Bosworth, un ex-Microsoft également ancien CTO de BEA Systems. 

Du côté de la vie des salariés et de leur compensation, les deux sociétés partagent également quelques points communs:

  • Elles valorisent on l’a vu “l’IQ” (Intellectual Quotient), les gens “rapides”, l’initiative et la prise de risque, et aussi la passion pour la technologie et ses usages. Elles tolèrent l’échec bien plus que la moyenne… surtout dans la mesure où elles ont toutes les deux les moyens de les absorber financièrement. Leur fonctionnement interne est largement basé sur le consensus et de grandes réunions. Les dirigeants développent les capacités analytiques de leurs managers: chez Microsoft, le système de gestion interne basé sur SAP et sur Siebel est plutôt bien construit et fournit des données sur les ventes, le marketing, les dépenses, etc, mises à jour en temps réel à l’échelle mondiale. Le déploiement de SAP chez Microsoft en 1997 a été l’un des plus réussis au monde de ce logiciel! Quand à Google, ils disposent du plus formidable outil statistique au monde permettant de savoir ce que font les utilisateurs de ses services et comment optimiser en temps réel la génération de revenu.
  • Les équipes produits semblent déconnectées des considérations business et terrain. Mais pas pour la même raison ni avec le même effet. Chez Microsoft, la culture technique des équipes produits conduit à une forme d’autisme, qui plus est assez américano-centrique. Cet autisme est couplé à une vision déformée du monde. Comme si tous les utilisateurs avaient le niveau de vie moyen de la région de Seattle (qui se porte bien aux USA) et achetaient un nouveau PC tous les ans et tous les gadgets qui sortent régulièrement. Cela aboutit à des produits qui ne rencontrent pas leur marché comme les UMPC ou les montres Spot. Ou à des décisions absurdes qui ne tiennent pas compte des utilisateurs (exemple récent qui m’agace particulièrement: on ne peut plus scanner une image directement sous Windows Vista ou sous Office 2007, ni utiliser sa Webcam directement, ou via Movie Maker). Chez Google, le découplage est dans le modèle économique lui-même: d’un côté, des équipes créent des services gratuits pour les utilisateurs. De l’autre, d’autres – y compris de R&D – travaillent à la monétisation de ces services une fois qu’ils ont rencontré leur audience. C’est un découplage très fort de la R&D et du marketing permis par le modèle économique du web.
  • Elles offrent un cadre de travail agréable et largement au dessus de la moyenne (snapshot Google Earth du Googleplex de Mountain View en Californie ci-dessous, et le campus principal de Microsoft à Redmond, dans l’Etat de Washington près de Seattle). Les boissons sont gratuites (chez les deux), et chez Google, cela va jusqu’aux repas. Manière indirecte d’encourager les collaborateurs à se défoncer sur place. Chez Microsoft, cela permet notamment de mener ces “marches de la mort” pendant la finalisation des produits, où les développeurs travaillent sans s’arrêter, semaine et week-end, sans même rentrer chez eux parfois.

 

  • Elles attribuent des actions ou des stock-options à l’ensemble de leurs collaborateurs, et pas seulement aux managers de haut niveau comme c’est encore le cas dans de nombreuses boites de high-tech, même dans la Silicon Valley. Chez Microsoft il s’agit d’attributions d’actions depuis 2003 du fait d’un cours d’action stabilisé (depuis 2000, cf graphe suivant). Cela génère un effet de levier bien moins important que les stock-options qui avaient permis de générer plus d’une dizaine de millionnaires en $, surtout aux USA. Seuls les managers de très haut niveau peuvent maintenant espérer y faire “fortune”. Les attributions d’actions pour les autres représentent l’équivalent de moins d’un mois à deux/trois mois maximum de salaire supplémentaire par an. C’est pas mal, et ils ne sont pas à plaindre par rapport à plein d’autres salariés, mais cette rémunération se rapproche progressivement de la normale. Cela impacte la motivation interne qui n’est plus construite de la même manière que pendant les années 80 et 90, où beaucoup de collaborateurs travaillaient plus pour le plaisir que pour satisfaire leurs besoins financiers. Chez Google, le phénomène se reproduit déjà avec deux catégories de collaborateurs: ceux qui sont arrivés relativement tôt, jusqu’à la mi 2005 (cf graphe du cours de Google après celui de Microsoft). Et ceux qui sont arrivés après, ou qui arriveront quelques années avant que le cours de l’action de Google se stabilise, ce qui est inéluctable à terme. Lorsque, à même niveau de responsabilité, vous avez d’un côté des millionnaires en dollar et des salariés que l’on qualifiera de normaux, cela créé inévitablement des disparités de comportement. Exemple classique: le manager tout nouveau qui encadre des collaborateurs anciens dans la boite. Pas facile à gérer! Tout comme les départs inopinés de ceux qui peuvent profiter de leurs stock-options. Ou alors au contraire, ceux qui s’accrochent à leur poste alors qu’ils ont atteint leur seuil de Peter depuis des années.

 

Mais Google est plus au soleil, à Mountain View dans la Silicon Valley et l’essentiel des effectifs de Microsoft (en R&D) sont au Nord : dans la pluvieuse région de Seattle, quand ce n’est pas dans le grand froid de Fargo dans le North Dakota (pours les équipes de l’ex Great Plains). Mais si aujourd’hui, Google semble avoir largement le vent en poupe, Microsoft continue encore d’attirer du (très beau) monde!

Par contre, une différence de taille: avec ses 76000 collaborateurs, Microsoft n’évite malheureusement pas la bureaucratisation de son fonctionnement, phénomène qui n’a pas encore touché Google et ses 11000 et quelques personnes, surtout dans ses équipes de développement.

Relations institutionnelles

Il a fallut 20 ans à Microsoft pour se lancer dans des actions de lobbying actives, notamment à Washington DC. Et 8 ans pour Google qui a par exemple démarré des recrutements de lobbyistes en Europe en 2006.

La leçon de Microsoft a été bien apprise, souvent à leurs dépends respectifs. Aux USA et en Europe, les procédures antitrust, démarrées en 1990 avec la FTC puis relayées par le procès antitrust du DOJ on marqué les quinze dernières années de l’histoire de Microsoft. Ils sont tout de même passés près d’un démantèlement en 2000-2001, et ces différentes affaires antitrust ont coûté au total au bas mot environ $10B, principalement sous la forme d’accords à l’amiable avec des concurrents (Sun, AOL, Real Networks, Novell, etc) ou avec des Etats des USA et d’amendes Européennes.

Chez Google, les ennuis ont commencé récemment, en 2005/2006 et ont surtout concerné ses relations avec la propriété intellectuelle et le droit d’auteur, mais dans des différents avec d’autres entreprises privées. Que ce soit avec la presse écrite en Belgique (qui a obtenu son déréférencement du moteur de recherche de Google, ce qui soit-dit en passant est une bien belle erreur de la part de ces médias), avec certains pays qui voyaient d’un mauvais oeil l’émergence de Google Books, ou avec les ayants droits du cinéma et de la télévision avec le service YouTube.

Nos deux leaders qui veulent se développer dans les pays émergents comme la Chine sont confrontés au délicat équilibre entre le respect des lois parfois liberticides de ces pays et aux aspirations de liberté et d’exemplarité du reste du monde. Jusqu’à présent, ils ont choisi le respect de ces lois malgré le tollé que cela peut générer. Et ils rentrent dans le mode “dammage control” pour éviter un effet de résonance trop fort dans les pays occidentaux.

La position dominante de Google n’a pas encore eu de répercussions juridiques. Malgré des parts de marché dans le search qui se rapprochent de celles de Windows et Office: plus de 80% au Royaume Uni et en France semble-t-il, et 64% aux USA qui est un marché plus compétitif pour eux. Les ennuis juridiques de Microsoft provenaient d’accusations d’abus de position dominante sur un point récurrent: l’intégration. Que ce soit l’intégration d’Internet Explorer dans Windows (DOJ), de Windows Media Player dans Windows (Commission Européenne) ou les liens entre Windows client et serveur (Commission Européenne). Chez Google, ce risque est moindre du fait de la nature Internet de leur activité. Leurs outils sont disparates et peu intégrés. Et la page d’accueil de Google ne fait pas directement la promotion d’autres services de Google. Cela répond à la fois à une exigence de simplicité, mais relève peut-être également d’une précaution juridique de bon aloi.

Chez Microsoft, les relations institutionnelles couvrent un spectre très large de sujets tels que:

  • Il leur faut déjà faire homologuer les logiciels par les organismes de sécurité idoines (DCSSI/SGDN en France, NSA aux USA, etc). C’est un processus technique méconnu et indispensable pour pouvoir commercialiser les logiciels.
  • Dans les pays émergents, ils poussent à l’adoption de dispositions législatives protégeant la propriété intellectuelle, préalable à toute activité commerciale saine dans le domaine du logiciel commercial.
  • Ils font un lobbying en faveur des brevets logiciels en Europe, même s’il n’est pas très développé contrairement aux théories du complot imaginées chez les bien plus efficaces (sur ce sujet) ennemis des brevets logiciels des communautés du logiciel libre. Mais le rejet du Parlement Européen de la proposition de Directive de la Commission Européenne sur les brevets en 2005 n’est pas si grave que cela pour MS car les brevets concernant les logiciels – de MS comme des autres – sont acceptés par l’Office Européen des Brevets. Le cadre juridique manque juste de clarté!
  • Le sujet des droits d’auteurs et des DRM bouillonne en ce moment. Avec une position d’équilibriste car l’assimilation potentielle des logiciels aux contenus culturels, protégés tous les deux par le droit d’auteur, peut avoir des effets induits négatifs pour le logiciel. Les éditeurs ne verraient évidemment pas d’un bon oeil la notion de copie privée être associée aux logiciels.
  • Les questions concernant l’interopérabilité à l’heure ou l’Europe et des pays comme la France édictent des référentiels d’interopérabilité pour l’informatique des services publics. Cadres qui pourraient indirectement interdire l’usage de logiciels comme MS Office dans les services publics. Microsoft doit à la fois gérer les relations avec les organismes de normalisation (ECMA, ISO, etc) pour faire adopter les spécifications de certains de ses produits comme standards, et avec les administrations en charge de ces cadres d’interopérabilité pour promouvoir sa propre approche d’ouverture.
  • Des questions de société comme la protection de l’enfance sur Internet, liée à l’activité MSN, la protection de la vie privée, intégrée notamment dans les relations avec les organismes du type CNIL, tout comme la place des TIC dans l’éducation.
  • Ils s’impliquent pour promouvoir le rôle des TIC dans le développement économique, notamment au niveau des PME, où Microsoft est très actif, ou dans les partenariats avec la recherche publique, déjà évoqués.

Il est probable que Google ait à s’impliquer plus dans nombre de ces sujets dans les années à venir! Ils sont souvent d’ordre défensif pour le business, mais ils prennent souvent la forme d’une meilleure intégration avec la société civile et politique sur des questions de société auxquelles ils ne peuvent pas échapper. Les relations institutionnelles avec les pouvoirs publics et législateurs sont intimement liées à la gestion de l’image de la société. Dans le cas de Google, ils ont d’ailleurs mis les deux activités sous la même casquette: celle d’un VP, Elliot Schrage, spécialiste de ce que l’on appelle la responsabilité sociale des entreprises (Corporate Social Responsibility).

Les deux entreprises doivent gérer leur puissance réelle ou perçue par le marché. Voir à ce sujet deux articles récents intéressants: “Is Google Too Powerful? paru dans Business Week, et “Microsoft is dead” de Paul Graham qui fait référence au fait que Microsoft ne fait maintenant plus peur. L’impact de la dominance est tel que les frayeurs des plus rationnelles aux plus irrationnelles émergent. La peur d’un nouveau “big brother” est toujours présente. Certains s’inquiètent ainsi des capacités de transmissions de fibres optiques démesurées acquises par Google! Des peurs fleurissent en Europe où l’on n’apprécie pas trop l’émergence d’acteurs mondiaux dominants provenant d’outre-Atlantique. D’où le (laborieux) lancement de Galiléo pour concurrencer le GPS américain, celui du (tout aussi incertain) moteur de recherche français Quaero, qui n’est même pas un projet européen. Et nombreux sont ceux en Europe qui poussent au développement des logiciels libres dans l’espoir de réduire leur dépendance vis à vis de Microsoft.

Pour terminer ces trois posts, signalons que les comparaisons entre Google et “le reste du monde” sont nombreuses. Certains ont même comparé Google à StarBucks. Pour dire que le business model de Google était plus efficace, car reposant moins sur des hommes pour fonctionner. Vous pourrez également consulter avec intérêt cette récente interview d’Eric Schmidt, le CEO de Google, parue dans Wired.

Aurais-je oublié d’autres points communs? Sûrement! A vous de les trouver maintenant!

Un des lecteurs de ce blog a annoncé attendre la version PDF de ces trois posts. Je m’y attèlerai en fonction des commentaires de lecteurs et compléments d’information glanés dans les jours qui viennent.

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Publié le 13 avril 2007 et mis à jour le 28 avril 2007 Post de | Communication, Google, Internet, Management, Microsoft | 23946 lectures

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Les 8 commentaires et tweets sur “Google = Microsoft ? (3)” :

  • [1] - Bob a écrit le 14 avril 2007 :

    Sur le sujet de la comm, la tactique de Google est de laisser les autres parler d’eux.

    Ex: en france, c’est le “new kid on the block 2.0” aka Louis Nauges, qui porte le discours agressif et anti-Microsoft, pour le compte de Google, et idem pour Firefox, où c’est tristan nitot qui porte la bonne parole et de la liberation du web tandis que Google encaisse et place des barres de recherche.

    Microsoft est trop bourrain pour se permettre ce genre de subtilités.

  • [2] - Olivier Ezratty a écrit le 14 avril 2007 :

    Microsoft aussi sait laisser d’autres parler d’eux. Mais une grosse boite doit s’exprimer elle-même pour être en contact avec ses clients et partenaires. Et pas seulement avec ses dirigeants. Mettre un visage humain sur des boites qui font peur n’est-il pas judicieux tout de même?

  • [3] - LVM a écrit le 14 avril 2007 :

    Sur l’implantation de Google, en plus des traditionnels navigateurs Web, je remarque qu’ils cherchent aussi à s’implanter dans les smartphones comme par exemple le futur iPhone d’Apple.
    D’ailleurs Eric Schmidt est membre du conseil d’administration de la firme à la pomme.
    Certains voient d’ailleurs là-dedans une sorte d’alliance secrète entre Google et Apple qui viserait plus ou moins à fragiliser MS.
    Qu’en pensez-vous ?

    Sur l’article de Paul Graham, je crois qu’il y a aussi beaucoup à raconter…

  • [4] - Olivier Ezratty a écrit le 14 avril 2007 :

    Les concurrents de Microsoft qui sont complémentaires entre eux ont naturellement tendance à s’allier effectivement. Mais je ne souscris pas trop à cette vision des stratégies “pour fragiliser untel ou untel” qui plus est secrètes. Il n’y a pas besoin de secret pour cacher la concurrence, ou la “concurralliance” dans certains cas, entre les différents protagonistes de la high-tech. C’est un éternel jeu de position où chacun gère au mieux son intérêt. Avant tout, il s’agit de se renforcer et d’améliorer l’accès au marché pour ses propres offres. La conséquence est une fragilisation des concurrents. Il est évident pour Google qu’une “place” sur l’iPhone est à optimiser. Et que de toutes façons, MS ne peut pas obtenir ce placement du fait de sa rivalité avec Apple, présente forte dans les mobiles que sur les ordinateurs personnels.

    Les stratégies qui consistent à d’abord fragiliser le concurrent avant de renforcer sa propre position sont risquées, voire perdantes. C’est par exemple le cas de Sun Microsystems et de son rachat de Star Office, devenu depuis OpenOffice. C’était clairement une stratégie de fragilisation de MS et d’office. Mais qu’est-ce que cela a rapporté à Sun? Pas grand chose. Même si au passage, cela a un peu gêné MS. Cela a surtout détourné l’attention de Sun d’ennuis sérieux qui touchaient leur offre serveur. Ennuis qui ont généré une baisse de CA et des plans de licenciements nombreux chez le constructeur ces dernières années. Par ailleurs, Sun n’a jamais vraiment réussi à être un acteur solide dans le logiciel. Ils se sont fait damer le pion par IBM, Oracle et BEA dans le middleware Java.

    Autre exemple plus ancien: le rachat de WordPerfect par Novell au début des années 1990. Résultat de l’obsession du patron de Novell de l’époque, Ray Noorda, de gêner Microsoft. Résultat désastreux!

    On pourrait objecter que ces deux histoires sont liées à MS et à sa dominance avec Office. Il y a en a sûrement d’autres de ce genre ailleurs. Attaquer un concurrent sans se donner les moyens de gagner les clients et d’en tirer un bénéfice commercial ne mêne à rien!

  • [5] - Leafar a écrit le 16 avril 2007 :

    Il y a une soirée consacré au triumvirat (Goog, MSft & Apple) sur Arte le 20… je pense que c’est une bonne piste pour continuer la réflexion.

  • [6] - ~laurent a écrit le 17 avril 2007 :

    J’aime beaucoup cette très bonne série d’article. Merci 🙂

    Une différence ? Le lien entre Google et ses clients est beaucoup plus faible que celui de Microsoft. Cela oblige en quelque sorte Google à devenir un “monopole bienveillant”, sinon il pourrait être rapidement remplacé :

    Je me permets de recopier ici un petit clin d’oeil :

    “Microsoft c’est un peu “l’ancienne génération”.
    J’ai signé un contrat de mariage avec des choses écrites en petit. Le divorce a été compliqué et ses avocats n’ont pas été drôles. Je dois dire qu’il n’en voulait qu’à mon argent. Je m’en suis aperçu trop tard.”

    “Avec Google nous vivons en union libre.
    C’est une histoire d’amour presque parfaite qui dure depuis des années.
    Il s’enrichit de ma présence. Comme il a peur que je le quitte pour un petit jeune, il doit toujours faire attention à me séduire. Vous imaginez que je suis content, je reviens le voir tous les jours.”

  • [7] - Olivier Ezratty a écrit le 17 avril 2007 :

    Oui, sachant que le contrat et le divorce, dans le cas de Google, n’ont rien à voir selon que l’on est un Internaute lambda ou un annonceur plus ou moins obligé par la force des choses de passer par eux!

  • [8] - Olivier Ezratty a écrit le 26 mai 2007 :

    Tient tient, ça commence…
    http://feeds.wired.com/~r/wired/topheadlines/~3/119643784/EU_GOOGLE_PRIVACY_PROBE
    La Commission Européenne s’intéresse à la politique de Google de stockage sur 2 ans des données relatives aux recherches des utilisateurs.

    Ironie de l’histoire, le représentant de Google à bruxelles sur le thème de la vie privée est un certain Peter Fleischer. C’est un ancien de Microsoft où il occupait un rôle voisin dans la Division Juridique en Europe.

    Et chose originale pour quelqu’un qui agit dans ce domaine, il entretient un blog: http://peterfleischer.blogspot.com/2007/04/la-protection-de-la-vie-prive-sur.html.




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Emeline Parizel
Emeline est chef de projet web et facilitatrice graphique chez Klee Group, co-fondatrice TEDxMontrouge, gribouilleuse à ses heures perdues, joue dans une troupe de comédie musicale, co-animatrice de meetups et est sensible à l’art et à la culture. #création
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Elvira Shishenina
Elvira est Quantum Computing lead chez BMW ainsi que présidente de QuantX, l'association des polytechniciens du quantique. #quantique
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Marie-Noëlle Semeria
Marie-Noëlle est Chief Technology Officer pour le Groupe Total après avoir dirigé le CEA-Leti à Grenoble. #recherche
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Gwendolyn Garan
Gwendolyn est travailleuse indépendante, Game UX Designer, Game UX Researcher (GUR) et 2D Artist pour le jeu vidéo, étudiante en Master 2 Sciences du Jeu, speaker et Formatrice sur l'autisme et la neurodiversité, l'accessibilité et les systèmes de représentation dans les jeux vidéo. #création #jeuvidéo
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Alexandra Ferreol
Alexandra est étudiante d'un bachelor Game Design à L'Institut Supérieur des Arts Appliqués (année scolaire 2019/2020) #création #jeuvidéo
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Ann-elfig Turpin
Ann-elfig est étudiante en deuxième année à Lisaa Paris Jeux Vidéos (Technical artist, 3D artiste), année scolaire 2019/2020. #création #jeuvidéo

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“[…] to Olivier Ezratty, author of Understanding quantum technologies 2023, the challenge for Europe is to position itself outside of where the US and China are likely end up...”
“Désolé, je suis passé à l'anglais en 2021 sans revenir au français. Traduire un tel ouvrage (1366) pages d'une langue à l'autre est un travail herculéen, même avec des outils de traduction automatique. Sachant...”
“Je suis un artiste conceptuel, certes je garde la grande majorité de mon travail dans ma tête par défaut d'un grand mécène. Mon travail de base se situe sur le "mimétisme" qui mène aux itérations et de nombreux...”
“Better than a Harry Potter! Thanks Olivier...”
“J'ai bien aimé le commentaire sur le film Openheiner avec l'interrogation du chercheur sur l'utilisation de ses découvertes. En continuation de ces propos, je propose d'écouter le débat suivant qui m'a semblé...”

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