Le Landerneau du numérique s’est quelque peu agacé ces derniers mois de la quasi-absence de cette industrie dans le plan de relance de l’économie du gouvernement. Depuis, quelques propositions sont arrivées et il est temps de les dépiauter avec un peu de recul critique.
Dans cette série d’articles, nous allons :
- Evaluer le besoin d’intégration du numérique dans le plan de relance.
- Commenter les propositions du Comité Richelieu et de la BDPME qui visent à aider de manière générique les PME innovantes dans leur financement.
- Evaluer les propositions de la FIEEC pour un plan de relance industriel organisé sur dix secteurs d’activité.
- Faire le point du rôle de l’Etat vis à vis de ces diverses propositions et sur le besoin de revoir les politiques publiques d’aide à l’innovation.
Quel besoin ?
Au départ, différentes associations qui se sont émues de l’absence de numérique dans le plan de relance du gouvernement. L’association Renaissance Numérique a interpellé vivement le gouvernement. Le Syntec Informatique a fait de même et réclamé en février 2009 un plan de relance pour le secteur informatique. Nathalie Kosciusko-Morizet a annoncé travailler sur le sujet au retour de son voyage d’étude en Corée et au Japon, admettant au passage que le plan de relance du gouvernement intégrait des plans existants dont l’échelonnement budgétaire a juste été revu.
Les 1000 projets du gouvernement annoncés en février 2009 ont été consolidés par le CIACT, le comité interministériel d’aménagement du territoire. Ils rassemblent un chapelet de travaux d’infrastructures courants comme la réfection du macadam de nationales et départementales, la mise à niveau de la sécurité sur des lignes de chemin de fer tout comme des investissements sporadiques pour l’outremer et la Corse. On y a aussi casé une accélération de plans de constructions de logements sociaux, la modernisation d’infrastructures universitaires et de la justice et aussi celle de la flotte océanographique. Ce n’est pas du tout un projet de “grands travaux” mais plutôt un jeu de bonneteau où il est impossible de distinguer ce qui existait déjà de ce qui est nouveau et où l’équité de la répartition géographique était le premier impératif politique. Quant à l’innovation, ces 1000 projets n’en font pas une promotion particulière, numérique ou pas. Ils couvrent des industries traditionnelles, BTP en premier. Il y a donc peut-être relance mais pas vraiment de modernisation.
Avant la nomination de NKM, Fillon avait bien réuni un comité interministériel pour traiter de la relance par le numérique, très focalisé comme le Plan France Numérique 2012 sur les télécommunications et la télévision. Mais sans grand impact sur le tissus économique du numérique. Il y a pourtant bien un plan “France Numérique 2012” mais son aspect opérationnel n’est pas bien clair cinq mois après son annonce, d’où la difficulté d’en accélérer la mise en oeuvre dans le cadre budgétaire du plan de relance. Un tableau de bord public de mise en oeuvre du plan serait le bienvenu !
Mais au fait, l’intégration du numérique dans le plan de relance est elle si évidente ?
Tout d’abord, l’industrie française du numérique n’a pas encore subi la crise de plein fouet. Elle est relativement protégée car étant faible dans le matériel (composants électroniques, produits finis), elle ne subit pas la chute du marché des biens d’équipement. Elle est plutôt solide dans les services informatiques, les contenus et dans les télécoms, domaines qui survivent mieux à la crise actuelle. Résultat : on n’entend pas particulièrement parler de licenciements dans le secteur du numérique. Lorsqu’ils commenceront à subir la crise, on ne va pas relancer les services informatiques directement, mais plutôt leurs donneurs d’ordre en amont.
Par contre, notre industrie du numérique présente une balance commerciale nettement déficitaire. Et notre marché intérieur présente des faiblesses structurelles au regard de nos voisins de l’Europe du Nord, sans parler des USA et de l’Asie (Corée, Japon, Taiwan). Par exemple, nous avons un relativement faible taux de PME équipées d’un site web. Ces faiblesses gênent autant les filiales des groupes étrangers du secteur que nos propres entreprises de services et les autres, qui n’exportent pas assez. Donc, crise ou pas crise, il faut développer les politiques publiques qui améliorent la compétitivité de nos industries numériques et donc leurs exportations. Simultanément, il faut développer les usages numériques dans les entreprises et aussi dans l’enseignement et la santé pour améliorer leur propre efficacité et/ou compétitivité. Dans tous les cas, il s’agit plutôt d’une approche long terme.
Alors, dans ce petit monde, il y a ceux qui demandent, et il y a ceux qui proposent. Les propositions du Comité Richelieu et de la FIEEC sont arrivées la semaine dernière et méritent d’être étudiées. Quel est leur rationnel ? Quelles sont leurs chances d’aboutir à des décisions gouvernementales ? La revue de détails en long en large et dans les travers suit dans les articles suivants.
Et vous, qu’est-ce que vous intégreriez dans le plan de relance au sujet du numérique ?
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