La série des entretiens Decode Quantum que j’enregistre régulièrement avec ma comparse Fanny Bouton et avec Richard Menneveux (Frenchweb / Decode Media) vous permet de découvrir tour à tour les acteurs des technologies quantiques : dans la recherche, dans l’entrepreneuriat, dans le financement de ce dernier et dans les grandes entreprises de technologies ou utilisatrices.
Ce nouvel épisode est consacré à la startup Pasqal. Elle a été créée pour lancer le premier ordinateur quantique français complet en exploitant la technologie des atomes froids. Ils bouclaient en 2019 leur premier tour de financement avec le fonds Quantonation, à tel point que Christophe Jurczak, le managing partner du fonds, est aussi leur chairman.
Pour écouter le podcast, direction Apple Podcasts et Deezer. Et ci-dessous !
Interviennent dans le podcast les deux cofondateurs de la startup, Antoine Browaeys et Georges-Olivier Reymond.
Antoine Browaeys est directeur de recherche au CNRS. Il pilote l’équipe de recherche “Optique Quantique et Atomes froids ” du Laboratoire Charles Fabry de l’Institut d’Optique à Palaiseau. C’est là où il a obtenu son doctorat en 2000 après avoir fait des études scientifiques initiales à l’Université Paris-Sud d’Orsay. Après être passé au laboratoire du NIST (USA) pour travailler sur les atomes froids, il est entré au CNRS en 2003. Donc, en gros, toute sa vie de chercheur a été consacrée à contrôler des atomes froids avec des lasers. Il est maintenant le Directeur Scientifique de la startup Pasqal qui va industrialiser le fruit de ses travaux.
Georges-Olivier Reymond est le CEO de Pasqal depuis sa création en mars 2019. Ingénieur de l’Institut d’Optique, il a fait une thèse en physique quantique à l’Université Paris-Sud en 2002. Après un passage par le prestigieux laboratoire de physique quantique IQOQI d’Innsbruck, il a fait beaucoup de R&D dans l’industrie chez Genewave (imagerie médicale), Safran (capteurs infrarouges) et UnitySC (dans la métrologie). Il a donc toujours côtoyé l’optique. Son expérience dans l’industrie est clé pour lancer cette startup.
Dans leur équipe, on compte aussi Thierry Lahaye, un chercheur CNRS avec qui Antoine a longuement travaillé et publié presque tous ses papiers scientifiques. Enfin, ils ont Alain Aspect comme conseiller scientifique.
Au menu de ce podcast :
- Le parcours scientifique des deux cofondateurs. Leur découverte des atomes froids. La relation de longue date avec Alain Aspect.
- Quelques explications sur le principe de fonctionnement des atomes froids. Pourquoi d’ailleurs choisit-on spécifiquement le rubidium comme atome pour créer des qubits ? Où l’achète-t-on et sous quelle forme ?
- A quoi va ressembler leur ordinateur quantique d’un point de vue pratique ? Comment va-t-on l’installer et où ? Combien de qubits vont-ils pouvoir gérer ?
- Qui les a encouragés ou découragés à créer la startup ?
- Ont-ils des concurrents dans leur domaine ?
- Leurs partenariats, notamment européens mais aussi avec la PME française Muquans, basée à Bordeaux.
- La roadmap de la startup.
En prime, un schéma explicatif de leur procédé, issu du livre blanc Quantum Compting with Neutral Atoms, juin 2020 (41 pages) qui documente tout cela très bien. Il casse une idée préconçue que j’avais sur le contrôle des atomes froids. Comme on les stabilise et on les contrôle par laser, j’imaginais une forêt de lasers arrosant les dizaines ou centaines de qubits de l’installation. En fait, bien non, ils n’utilisent visiblement qu’un seul laser avec tout un dispositif optique qui permet d’en contrôler le faisceau de manière ciblée, un peu comme dans un projecteur vidéo.
Le système de pilotage des qubits à base d’atomes froids comprend un modulateur spatial de lumière (Spatial Light Modulator, SLM, qui peut être à base de cristaux liquides de type LCoS) qui contrôle des atomes dans un plan de focale avec des micro-pièges optiques. Des “tweezers” (pièges optiques d’atomes à base de rayons lasers) de réarrangement des atomes sont contrôlés par l’AOD (Acousto-Optic laser beam Deflector) et ajoutés au faisceau issu du SLM par un filtre biréfringent. La lumière fluorescente émise par les atomes lors de la lecture est filtrée par un PBS (filtre séparateur polarisant) et lue par une caméra.
En parallèle avec la mise au point des qubits, la startup Pasqal a développé le support logiciel de plateformes de développement du marché comme Cirq et TensorFlow Quantum de Google ainsi que Qiskit d’IBM. En juillet 2020, c’était au tour de Cambridge Quantum Computing (CQC) d’annoncer leur support des qubits de Pasqal avec leur outil de développement t|ket⟩.
Ils développent des modèles de simulation quantique du magnétisme, pour la chimie et la découverte de molécules thérapeutiques ainsi que pour résoudre des problèmes d’optimisation (VQE, MaxCut pour le traitement de problèmes de graphes). Ils annonçaient en juin 2020 un partenariat avec la R&D d’EDF pour tester un algorithme d’optimisation de gestion de réseau pour la recharge de véhicules électriques, à base de QAOA (Quantum Approximate Optimization Algorithm).
Enjoy !
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Instructif, sujet très bien traité, Topissime Bravo