J’ai découvert, Z2 Innovation, une petite startup originale lors d’un Comité de Sélection de Scientipôle Initiative.
Créée par Yves Colombe, un mathématicien spécialiste des méthodologies de développement de circuits intégrés ASIC, et dirigée par Philippe Dutron, ancien de la filiale européenne d’Artisan (acquis par l’anglais ARM en 2004), elle propose une solution logicielle d’optimisation par les mathématiques des performances du silicium pour le calcul intense. Vous aviez peut-être vu que dans mes rapports sur le CES de Las Vegas, je couvre aussi les processeurs divers que l’on trouve dans l’électronique grand public. Occasion m’est donnée ici de poursuivre ma découverte de ce domaine fascinant et méconnu.
Pour faire simple, le logiciel de Z2 Innovation transforme une formule mathématique ou un ensemble de formules mathématiques représentant un algorithme de traitements numériques directement en plan optimisé pour fabriquer le circuit intégré correspondant. Cela remplace un processus qui est pour l’instant “manuel”, réalisé évidemment virtuellement avec des outils de conception de circuits intégrés dits “EDA” (Electronic Design Automation).
Le logiciel de Z2 Innovation automatise complètement le placement et le routage des jonctions et transistors sur le circuit intégré, et bien entendu leur optimisation. Les bénéfices sont multiples : des blocs de fonctionnalités de traitements sont réalisables avec 1) moins de surface occupée sur le silicium, 2) moins de consommation électrique et 3) de bien meilleures performances et 4) bien plus rapidement qu’avec les méthodes traditionnelles de conception de circuits intégrés avec les logiciels d’EDA (Electronic Design Automation). Le tout avec des améliorations pouvant dépasser un ordre de grandeur (x10) dans ces différentes dimensions.
Le procédé est particulièrement pertinent dans les composants pour les produits grands publics et spécialement, les produits de mobilité. Les processeurs de ces appareils sont très souvent des “System on Chips”, qui intègrent un cœur de microprocesseur pour réaliser des traitements par programmation logicielle (cœur ARM le plus souvent) ainsi que des blocs de traitements “en dur” pour le graphisme, l’audio, la connectivité et la sécurité. Ce sont ces derniers blocs que la solution de Z2 Innovation permet de créer de manière optimisée. Dans le jargon des circuits intégrés, on parle de “blocs d’IP”, ou “blocs de propriété intellectuelle”. Car chaque bloc de traitement a une valeur en soi et peut-être commercialisé. La société anglaise ARM qui a conçu les microprocesseurs embarqués du même nom ne fabrique rien. Elle a conçu l’IP de ses microprocesseurs et en vend le design à des fabricants ou concepteurs de SoC comme Qualcomm, Texas ou Samsung, qui les intègrent dans leurs SoC. A l’arrivée, cela donne le Snapdragon qui équipe les Google Nexus One, les futurs Windows Phone 7 ou bien ces processeurs A4 qui équipent l’iPad d’Apple et sont fabriqués par Samsung.
Les circuits intégrés qui récupèrent des “blocs d’IP” réalisés avec le logiciel de Z2 Innovation peuvent ensuite être fabriqués avec n’importe quelle technologie de silicium. Notamment, des SoC, des ASIC ou des FPGA (des circuits logiques programmables, utilisés notamment pour le prototypage).
Vous demanderez : comment protéger ce genre de logiciel qui s’appuie sur des traitements mathématiques ? Le créateur a choisi la voie du secret industriel. Pas de brevet déposé sur cette série de logiciels, protégés classiquement par le droit d’auteur et le copyright. Ce, d’autant plus qu’il est difficile de le faire tant sur des formules mathématiques que sur des logiciels les exploitant.
Le site web de la startup est pour l’instant assez pauvre, mais son univers client est limité à quelques milliers de sociétés à l’échelle mondiale, et donc requiert un démarchage pas très grand public, qui sera notamment réalisé aux USA par un américain, Dane Sinofski, qui est un associé de la société. De plus, le directeur scientifique de Z2 Innovation est un scientifique bien connu dans son domaine. Enfin, les briques logicielles de Z2, qui tournent sous Windows, sont encore à l’état de “pre-release”, la version 1.0 devant sortir dans le courant de l’année 2010.
Cette petite startup intéressante complète le cheptel d’entreprises du secteur de la micro-électronique française qui est finalement l’un des plus solides des entreprises technologiques du numérique. Il y a notamment dans la chaîne de valeur : SOITEC (qui traite des wafers de silicium pour en optimiser les performances et baisser la consommation électrique), ST Microelectronics (un concepteur de circuits et un fondeur, franco-italo-suisse), DibCom (une fabless qui conçoit des circuits pour la télévision mobile), le tout complété en amont par le CEA-LETI, un excellent laboratoire de recherche public dans la nanoélectronique, qui joue le rôle de pivot du pôle de compétitivité Minatec de Grenoble. Et j’en oublie certainement beaucoup d’autres !
De manière discrète, cette startup sera ainsi peut-être à l’origine, d’ici quelques années, de l’augmentation de la durée de vie des batteries de nos divers appareils mobiles et de leur rapidité de fonctionnement pour des tâches courantes. Il faut ainsi parfois remonter très en amont la source de progrès technologiques et rendre aux Césars ce qui est à eux !
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Pour une fois qu’on reste au top sur la microélectronique grâce à ces entreprises hors du commun. Merci le CEA-LETI.
Et pour continuer sur le thème de l’industrie florissante, Christian Estrosi nous promet de jolies polémiques avec NKM car il a lancé en février un appel à projets sur les services mobiles (comme Proxima) mais sans contact et nous a dégoté pour cela (pour 20 projets collaboratifs) 10 millions d’euros de derrière les fagots… Vous avez suivi l’affaire ?
http://pro.01net.com/editorial/512389/dix-millions-d-euros-pour-des-projets-de-services-mobiles-sans-contact/
Pour retrouver cet appel d’offre, il faut faire un petit tour sur le site du Ministère de l’Industrie. Toujours la même histoire : des projets collaboratifs ! Il y avait d’ailleurs déjà eu un appel à projet sur les tags RFID il y a moins d’un an, pour 3,5 millions d’Euros.
La routine…
“Les circuits intégrés qui récupèrent des “blocs d’IP” réalisés avec le logiciel de Z2 Innovation peuvent ensuite être fabriqués avec n’importe quelle technologie de silicium”
Je ne suis pas sur que cela soit aussi simple surtout quand on sait l’importance des technologies de “foundry” silicium dans cette industrie. J’ai certes un bloc d’IP mais je dois travailler sur sa meilleure réalisation donc choisir la meilleure technologie et donc me retourner vers des fondeurs. Si en plus, on veut rajouter des fonctions analogiques, alors on devient complétement dépendent de la technologie
Petite anecdote : à part IBM et Intel, les meilleurs fondeurs sont en Asie (TSMSC et UMC). Les investissements sont tels qu’il est difficile de durer dans cette industrie stratégique. La France arrive encore à tenir avec Crolles II mais pour combien de temps.
Z2 Innovation
Trio sérieux ! Bien connu dans le milieu. La réussite sera au rendez vous s’ils sont bien accompagnés. Investisseurs ne loupez pas cette opportunité.
Heu silvouplé c koi la formaule cea leti
Tu connais Google ? Tu lui demandes, et il te répond…
Cf : http://www.leti.fr/