Après avoir parcouru le domaine de la santé dans un premier article, voici celui des nanotechnologies pour ce petit tour des laboratoires de recherche et de startups à Grenoble. Je confluerai avec quelques réflexions sur les facteurs de développement et de succès des startups rencontrées qui présentent toutes une forte intensité technologique.
Le showroom du CEA
J’ai visité rapidement le showroom du CEA avec Ahmed Jerraya, qui est Directeur de Recherche et responsable de la “Design Center Initiative” du CEA. Il propose un panorama des innovations technologies sorties des laboratoires et en général intégrées ensuite dans des offres industrielles. Curieusement, les photos y sont interdites, ce qui a le don de m’agacer comme vous pouvez l’imaginer, surtout dans la mesure où rien de ce que l’on y trouve n’est confidentiel !
Les innovations technologiques présentées couvrent les différents domaines d’intervention des laboratoires du CEA présents à Grenoble avec en particulier :
- Le solaire photovoltaïque avec des cellules dites “mono-like” qui s’appuient sur une technique de fabrication permettant de créer des wafers quasi mono-cristallins – donc, à fort rendement comme dans le silicium mono-cristallin – mais à partir d’un four traditionnel et non pas d’un long et coûteux étirage de silicium mono-cristallin par la méthode de Czochralski. J’ai découvert au passage l’existence d’un mine de silicium propre à la fabrication de cellules PV et de semi-conducteurs à Bourg d’Oisans, entre Grenoble et Briançon. Le CEA travaille aussi sur des cellules PV organique ainsi que sur une technique de captation d’énergie solaire utilisant une lentille de Fresnel et un composant dit “III-V” (germanium, phosphure d’indium-gallium et arséniure d’indium-gallium, cf cet article au sujet du III-V). La solution est mise en oeuvre par les français Heliotrop et Soitec. Elle générerait un rendement de 40% ce qui est très élevé pour du solaire photovoltaïque. Reste à savoir à quel prix car cela compte plus que le rendement.
- Des solutions de production d’hydrogène stockée sous forme gazeuse ou sous d’hydrures de magnésium, produite par électrolyse de la vapeur d’eau, générant 90% de rendement en laboratoire. Ils planchent aussi sur des piles à combustible qui diminuent le besoin en platine comme catalyseur. C’est utilisé dans la plateforme MYRTE située en Corse. On peut aussi citer des batteries lithium-fer-phosphate (LFP) qui présenteraient une meilleure amplitude de fonctionnement. Elles seraient utilisées dans la Renault Twizy.
- La solution de captation de l’énergie vibratoire utilisée par Enerbee, une startup grenobloise qui a levé 2,5m€ en 2015 et était présente au CES 2015 dans la zone Eureka. Dans un démonstrateur, une pression d’un doigt sur un tableau interactif permet d’allumer une diode sur un plan. Leur système permet de créer des télécommandes auto-alimentées en énergie, aussi bien pour ouvrir un portail que pour diverses commandes domotiques dans la maison.
- Pas mal de solutions dans le RFID avec des étiquettes RFID permettant de lire très rapidement de grandes quantités de contenus (à 5 à 10mbit/s). La réception peut utiliser des antennes de 1 m2 et des champs magnétiques tournants. Ils montrent aussi des tuyaux instrumentés intégrant une étiquette RFID et reliés à un lecteur contenant un capteur de présence statique, exploités par Eliot Innovative Solutions à Grenoble. Et puis aussi du RFID utilisé dans les pneux associé à un compteur de tours et un magnétomètre.
- Des capteurs divers : de gaz utilisant de la chromatographie en phase gazeuse, un radar fonctionnant dans la fréquence de l’Ultra Wide Band pour l’automobile, des caméras de recul pour engins de chantier qui envoient un signal sonore en cas de danger, une solution mise en oeuvre par la PME française Arcure, des capteurs de transpiration et de risques infection de plaies pour les pompiers, et un système de détection de court circuits dans les voitures utilisant une technique de réflectométrie électrique.
- Des logiciels de réalité augmentée industrielle intégrés dans des tablettes, exploités chez le francilien Diotasoft.
Comment juger un tel showroom en prenant du recul ? Il faudrait connaître l’histoire sous-jacente des projets, et des entreprises qui les exploitent avec leurs succès et échecs. Par exemple, dans le solaire la situation française n’est pas bien folichonne : Photowatt, la JV entre le CEA et EDF était déficitaire et a été absorbée par EDF pour sauvegarder les emplois, SOITEC s’est lancé dans le solaire sur le marché américain mais y a perdu beaucoup de plumes, et les autres acteurs technologiques du marché ont du mal à décoller. Dans d’autres cas comme ceux qui suivent, on a des startups plutôt prometteuses mais qu’il reste à faire décoller pour atteindre la taille critique.
Microoled
J’ai rencontré Eric Marcellin-Dibon qui gère le business development de la société. Microoled est une société de 8 ans d’existence qui fabrique des écrans OLED miniatures destinés à la vision de près, dans des lunettes et autres viseurs. Elle propose trois familles de produits : un écran WVGA de 873×500 pixels, un XGVA de 1024×768 pixels et un SXGA de 1280×1024 pixels. Le principal concurrent est Sony.
Microoled a été créé par des anciens de la division écrans cathodiques de Thomson qui avait planché dans les dernières années de son existence sur les écrans TV OLED. Avec la revente de l’activité TV au chinois RCA, cette activité a été abandonnée. Le CEA-LETI en avait récupéré l’équipe qui a alors planché sur la technologie “OLED sur silicium” permettant de créer ces micro-écrans OLED. La partie silicium des écrans est fabriquée par STMicroelectronics dans la Fab 200 de Crolles ou chez Altis à Corbeil Essonne.
Les écrans utilisent des LED blanches et des filtres de couleurs, une technique voisine de celle que LG Display utilise pour ses écrans TV OLED de grand format. La maitrise du procédé ? L’empilement de couches minces. La fabrication est réalisée dans les laboratoires de Microoled dans Minalogic, dans une salle blanche créée en 2011 qui utilise des wafers CMOS de 200 mm gravés en technologie 130 nm. L’assemblage est ensuite réalisé soit en Asie soit en Europe. A ce jour, 150 000 écrans ont été livrés.
Les applications visées sont des viseurs qui intègrent une optique pour agrandir l’image de l’écran. On va en retrouver dans des lunettes de réalité augmentée, dans des jumelles, des fusils et des microscopes. Leurs grands clients sont dans la défense (comme l’américain Raytheon), en Israël ou en Corée du Sud. Via DRS, une filiale américaine de l’italien Finemecanica, ils sont intégré dans le viseur des casques des soldats de l’armée de terre US. L’intérêt : la faible consommation d’énergie des écrans, histoire de diminuer le poids des piles à transporter par les soldats.
Dans le civil, on les trouve notamment dans l’appareil photo hybride Panasonic GH3 ainsi que dans le Zacuto Gratical HD Viewfinder, dans des lunettes vidéos de Carl Zeiss (Pulsar, Cinemizer). 99% de la production est exportée ! C’est probablement un record dans l’industrie française !
De son côté, Google Glass comme le Hololens de Microsoft utilisent des écrans en technologie LCOS qui sont moins bons côté couleur mais meilleurs côté luminance. Il existe aussi des solutions utilisant des guides de lumière qui sont peu efficaces en énergie et avec des prismes (OK pour des résolutions pas très élevées).
La société emploie 30 personnes et faisait 3m€ de CA en 2014. Ils en prévoient le double en 2015 et d’atteindre l’équilibre financiers. La société a été autofinancée ses trois premières années par des contrats de recherche, puis avec des subventions et enfin, par des prises de participation de Photonis (dans la défense) et de STMicroelectronics (en 2012) en plus du CEA. Microoled exploite sous licence exclusive des brevets issus de Thomson et du CEA.
Dans la roadmap technologique, au-delà des demandes clients spécifiques, Microoled planche sur l’amélioration de la luminance des écrans, pour mieux répondre aux besoins des applications de réalité augmentée, sur la qualité d’image notamment en spectre colorimétrique couvert (gamut), et aussi en résolution (jusqu’à la 4K, même si celle-ci ne semble pas très demandée par les clients, ce qui m’étonne au moins pour ce qui concerne les viseurs d’appareils photo). Ensuite, ils prévoient aussi de monter dans la chaîne de valeur en intégrant l’optique et l’électronique pour créer des systèmes complets.
Wavelens
J’ai rencontré Sébastien Bolis, le CEO et cofondateur de cette startup issue du CEA-LETI en 2012 et dédiée à la création de MEMS de gestion de la mise au point d’optiques pour mobiles. Cet ancien de SAGEM et Atmel avait découvert les MEMS au CEA-LETI.
Le principe de Wavelens consiste à utiliser un mécanisme piézoélectrique périphérique à une lentille souple intégrant une huile. Il fait gonfler la membrane de 200 à 400 microns. L’anneau se déplace uniquement sur 5 microns. C’est le client industriel qui choisit la méthode de calcul de la distance pour régler la focale. Cela fonctionne avec tous les capteurs photo et toutes les résolutions. Le bénéfice ? Un module caméra plus compact qui consomme moins d’énergie, un aspect critique dans les smartphones, notamment pour la capture de vidéos.
L’un des marchés concerne celui de la caméra face avant des smartphones, dédiée aux selfies et à la visio-conférence. La tendance du marché est à l’augmentation de la résolution de cette caméra, qui est habituellement inférieure à celle de la face arrière des smartphones. Mais la place disponible est encore plus limitée qu’en face arrière où les constructeurs comme Apple se permettent de positionner leur module caméra de manière légèrement protubérante. Wavelens vise d’autres applications comme dans la sécurité et l’automobile.
Jusqu’à présent, les démonstrateurs étaient construits avec des capteurs CMOS Omnivision allant jusqu’à 23 mpixels. Leurs clients sont des fabricants de modules caméra. La production en volume devrait démarrer en 2016. La société fait pour l’instant 5 salariés. Une levée de fonds de 7m€ est en cours.
La concurrence ? La majorité des systèmes de gestion de focale de smartphones fonctionne sur le même principe que les bobines de hauts-parleurs (voice coil motor). Les systèmes alternatifs ont du mal à se faire une place au soleil, les fabricants de smartphones étant peu preneurs de risques, et surtout, contrôlant au centime près le prix de fabrication de leurs produits.
Wavelens est face à un concurrent utilisant un procédé de déformation de polymères sur wafer CMOS : le norvégien poLight. Il existe aussi un système à base de cristaux liquides, chez le chinois LensVector, qui a levé $150m auprès d’industriels. Le lyonnais Varioptic, racheté par Parrot en 2011, propose des systèmes de focus exploitant la technique de l’électro-mouillage (electro-wetting). Très intéressante, elle semble plutôt utilisée dans des applications industrielles (microscopie, etc). Aux dernières nouvelles, cette activité de Parrot représentait un CA d’environ 1m€, c’est-à-dire, pas grand chose !
Chez DigitalOptics Corps, une société californienne créée en 1991 et acquise en 2006 par Tessera pour $60m, on utilise des MEMS pour déplacer une optique traditionnelle. La société avait comme client de son module caméra mems/cam un obscur constructeur chinois de smartphones, Oppo, basé à Guangdong. DigitalOptics n’a pas réussi à décoller et a réduit drastiquement sa voilure en 2014 et dépensé $55m en frais de restructuration. Sa maison mère Tessera commercialise maintenant ses brevets après avoir fermé ses usines à Taiwan et au Japon. Une grosse partie du business a été revendue à Flir, un spécialiste de la vision infrarouge.
Tout cela montre que le marché est difficile à aborder. Wavelens naviguera probablement en eaux troubles entre l’alléchant marché de volume des grands fabricants de smartphones et des marchés de niches plus court terme mais plus petits. Ils ont pour l’instant un agent commercial en Corée du Sud et doivent muscler leurs efforts commerciaux pour le reste du monde, une fois leur levée de fonds réussie.
ISORG
J’ai rencontré Laurent Jamet, cofondateur et business developer de cette autre société issue du CEA-LITEN. Créée en 2010 et rassemblant 27 personnes, elle propose des photodétecteurs souples. Son nom signifie “Image Sensor ORGanic”. On est au niveau du composant de base générique : des films souples organiques capables de capter la lumière avec des résolutions et surfaces très variables. L’épaisseur de la partie organique photosensible des films est inférieure au micron avec une résolution spatiale de 80 microns jusqu’à plusieurs centimètres et une sensibilité de plus de 80db permettant de bien capter les basses lumières. Qui plus est, ces capteurs chauffent peu. Cette flexibilité permet d’imaginer des centaines d’applications différentes. Ces films peuvent “habiller” des produits industriels et grand public de toutes sortes. En plus des circuits souples, la technologie d’impression utilisée peut aussi être appliquée sur du verre.
L’un de leurs premiers clients est Trixell, une joint-venture entre Siemens, Philips et Thalès et qui propose des capteurs à rayons X pour l’industrie médicale et la sécurité. Ces capteurs associent des scintillateurs au césium couplés aux capteurs optiques d’ISORG. On va les retrouver également dans des capteurs de veines utilisés dans la sécurité. ISORG est aussi présent dans l’Internet des Objets avec des applications industrielles telles que la captation de la présence d’objets dans des étagères. Ici, c’est avec des capteurs dotés d’un seul pixel ! Après, on peut imaginer de créer toutes sortes de surfaces interactives dans le retail, dans les jeux, la domotique et les wearables. Pourquoi pas, pour permettre aux montres connectées de détecter des gestes.
La startup a levé au total 8m€, le dernier tour en date étant de 6,4m€ en 2014 auprès de Bpifrance, du CEA et de business angels. Cette levée a permis de lancer la création d’une unité de production à Limoges qui sera opérationnelle en 2017, pour compléter l’unité de production expérimentale sise à Grenoble. Elle mettra en œuvre leur procédé de dépôts de grande surface. La base de la technique relève de l’impression !
A noter un partenariat industriel avec Plastic Logic, une société anglaise que j’ai eu l’occasion de vous faire découvrir il y a plusieurs années dans les Rapports du CES. Elle est maintenant intégrée dans l’allemand FlexEnable, basé à Dresde, et est financée par des capitaux russes. Elle est spécialisée dans les circuits et écrans électroniques souples, utilisés notamment pour la création d’écrans à encre électronique. ISORG utilise leurs circuits électroniques souples comme “backplane” de leurs capteurs de lumière.
Le siège d’ISORG est à Grenoble et la société a un bureau de vente et solutions à Hong Kong, en plus d’une représentation commerciale à la fois au Japon et en Corée du Sud.
L’enjeu principal ? Prospecter et identifier des secteurs porteurs, si possible dans des marchés de volume ! Donc, avec pas mal d’idée du côté de l’Asie !
Dracula Technologies
J’ai rencontré Nicolas Leblanc de cette société au nom bien curieux. Comme pour ISORG, on est aussi dans la captation de lumière sur film flexible, mais ici, pour générer de l’énergie. Ce sont des cellules photovoltaïques flexibles intégrables dans des produits grand public pour servir d’appoint d’énergie pour recharger des smartphones, des GPS ou autres appareils portables.
Dracula n’est pas une startup sortie d’un laboratoire de recherche. C’est en fait une spin-off créée en 2012 à partir d’une société industrielle de Valence dans la Drôme, Ardeje, spécialisée dans l’impression industrielle. Dracula Technologies est issue d’un projet collaboratif qui visait à créer une filière photovoltaïque organique par impression numérique. Le produit a maintenant deux ans de production derrière lui et le volume commence à arriver. Ils peuvent industrialiser de 5000 à 20000 pièces par produit. Cela pourrait passer aux millions sans difficultés ! L’entreprise a aujourd’hui trois ans d’existence et s’est attachée construire son marché en réalisant de nombreuses preuves de concept qui devraient passer en mode production à grande échelle. Les formes imprimées peuvent être multiples et adaptées aux besoins des clients.
Les rendements photovoltaïques sont de l’ordre de 4%, à comparer aux 12% à 25% du solaire photo-voltaïque inorganique (silicium) traditionnel. L’avantage de leur technologie est qu’elle est adaptée à la captation de lumière diffuse en intérieur. Elle fonctionne en lumière tamisée, d’où une application bien spécifique, les capteurs d’incendie dans les forêts ! Ils en ont notamment dans le secteur émergent des objets connectés, comme avec un fabricant de serrures lui-aussi situé à Valence.
Ils sont aussi intégrés dans des roues de vélos, dans des porte-tablettes, dans les produits du français RaidLight, dans les équipements pour enfants de Jarden et chez Petzl. Dernière application en date, le sac à dos du lyonnais Babolat qui recharge la raquette de tennis connectée qu’il contient, présenté à Roland Garros cette année (2015) ! Le circuit souple de captation d’énergie lumineuse ambiante est associé à un convertisseur électrique doté d’une sortie USB. Il permet de gérer à la fois les faibles et les fortes luminosités. Les objets sont proposés en marque propre et en marque blanche.
La société est encore petite, avec une demi-douzaine de personnes. Ils prospectent notamment en Europe, en France, en Italie et en Allemagne.
A noter l’existence d’un concurrent français qui a aussi travaillé avec le CEA, Disasolar, basé à Limoges, qui propose des panneaux solaires organiques plutôt destinés à l’architecture. Elle a malheureusement réalisé plusieurs plans sociaux. La filière solaire PV française souffre en effet de la concurrence chinoise (cf ce papier sur le sujet du solaire PV qui rappelle que l’Etat fédéral US et les capitaux risqueurs américains y ont aussi usé leur bas de laine). La filière française se focalise surtout sur l’intégration et l’installation. Ou dans des marchés spécialisés comme c’est le cas avec Dracula Technologies.
Alpwise
Alpwise, comme Abeeway (plus loin) fait partie d’une autre catégorie de startups innovantes de la région de Grenoble et qui sont spécialisées dans les communications radio. Alpwise est un fournisseur de solutions matérielles et logicielles Bluetooth à basse consommation.
La société a été fondée en 1995 au départ dans le secteur du fax. La société a été reprise par Serge Veyres en 2004. Une demande client les a amenés à se focaliser sur les piles de protocole Bluetooth. A ce jour, ces piles sont utilisées dans de nombreux produits grand public. A noter le cas de l’avant-dernière smartwatch de Sony. Ils ont aussi le fabricant de pneus et équipementier Continental comme client pour un kit main libre automobile.
Abeeway
J’ai rencontré Florian Sforza de cette startup qui a tout juste un an d’existence. Ils étaient même présents au dernier CES de Las Vegas. La startup propose une solution de géolocalisation basse consommation. Pour la petite histoire, Florian est le fils du créateur de Cycleo, la société créatrice du réseau bas débit rachetée par l’américain Semtech.
La société possède des brevets d’optimisation dans la géolocalisation à bas débit. La position vient soit d’un GPS soit de systèmes de triangulation à base de télécommunications mobiles. C’est par exemple utile pour des colliers pour chiens ne nécessitant pas de recharge régulière. Ils travaillent notamment avec les opérateurs télécom tels que Orange et Bouygues télécom, ce dernier dans le cadre de son réseau M2M Lora.
Alpwise et Abeeway sont tous deux membres de l’alliance Lora. Au passage, l’infrastructure est déployée par le français Actility. Tous ces acteurs sont des concurrents de celle d’un autre français, Sigfox !
Conclusion
Je n’ai dans ces deux articles fait que survoler quelques échantillons de la recherche et des startups que l’on peut trouver sur Grenoble. Par rapport à ce que l’on trouve en général à Paris, les startups grenobloises présentent une densité technologique bien plus forte de leurs innovations. Les innovations d’usage sont aussi disponibles à la clé mais bien moins dans le domaine du ludique, du social ou du commerce et de la publicité.
Ces startups planchent sur des sujets difficiles au niveau de la santé, de l’énergie ou des nano-technologies. Elles s’intègrent dans un écosystème qui fait se rencontrer des chercheurs et entrepreneurs issus de domaines très variés. C’est un point clé pour faire germer des innovations utiles. De tous les lieux d’innovation que l’on peut visiter en France, Grenoble est aussi celui qui se rapproche le plus d’une bonne partie des thèmes liés à la singularité.
Les projets et startups que j’ai découverts ont tous une ambition internationale. Cependant, ils sont situés souvent dans des marchés de niche, voire ultra-niche. Peu d’entre eux arrivent à dépasser quelques millions d’Euros de CA après quelques années d’existence. Leur point de départ et les financements modestes des startups limitent leurs ambitions. Cela en fait des proies faciles pour les grands groupes, surtout étrangers, qui veulent étoffer leur portefeuille technologique. Il y a même urgence à accélérer la croissance des nouveaux acteurs les plus prometteurs car de gros employeurs de la région de Grenoble tels que SOITEC et STMicroelectronics rencontrent des difficultés économiques chroniques.
Pour aller plus loin et aller au-delà de quelques millions d’Euros de chiffre d’affaire, ces startups peuvent adopter plusieurs démarches qui ont en général été expérimentées avec succès.
Tout d’abord, en élevant le niveau d’ambition à moyen terme comme cela pourrait être imaginé chez Avalun, qui pourrait très bien être à l’origine d’un “Tricorder” français capable de réaliser plusieurs mesures biologiques d’un seul coup. Comme évoqué dans mon papier sur les stratégies industrielles de la singularité, la France a besoin de se créer des défis technologiques ambitieux. Est-ce à l’Etat de le faire ? Pas évident. Quand il s’en même, la politique a tendance à diluer les paris, comme on l’a vu avec les 34 projets industriels lancés par Arnaud Montebourg. Quand on voit la merveilleuse technologie OLED de Microoled, on a un pincement au cœur car on pense à ce qu’aurait pu être une filière industrielle française dans les grands écrans OLED, un virage complètement raté par Thomson (devenu Technicolor). Pour chaque innovation, il faut se poser la question de la création ou de la captation de marchés de volume. En France, on a trop tendance à calibrer l’ambition des projets en fonction du financement que l’on pense pouvoir trouver. Il faudrait inverser la donne et commencer par être d’abord très ambitieux, puis à chercher les financements, quitte à en trouver hors de France si nécessaire.
Ensuite, en remontant la chaîne de valeur pour proposer des solutions plus complètes, comme Microoled ambitionne de le faire dans les imageurs. Cela peut nécessiter des alliances entre plusieurs acteurs, comme cela se fait dans le solaire, avec l’exemple Soitec +Heliotrop. C’est aussi l’approche pilotée par Cityzen Science à Lyon dans les vêtements connectés. Ces alliances peuvent être internationales. Il faut éviter de s’enfermer dans l’écosystème français.
Puis, en construisant des produits extensibles par des tiers pour les transformer en plateformes. C’est plus difficile à énoncer qu’à réaliser, en particulier dans les composants de base comme ceux de Wavelens ou ISORG et Dracula. Les composants sont souvent remplaçables et leur écosystème logiciel est faible ou inexistant. D’où le point précédent sur la chaîne de valeur. Idéalement, il faut qu’elle remonte jusqu’au logiciel et aux données.
Cela passe évidemment par le développement de la dimension marketing et communication, un domaine où les ingénieurs de Grenoble ont encore beaucoup de progrès à faire. Et cela s’applique aussi aux offres “b-to-b”. Certains sites web de startups méritent une sacré refonte ! L’écosystème grenoblois peut notamment compter sur Grenoble Ecole de Management (GEM), une business school très active dans le domaine de l’entrepreneuriat où les ingénieurs peuvent notamment venir y suivre une formation complémentaire.
Enfin, en poursuivant leur développement international aussi rapidement que possible. Il n’y a pas le choix, surtout quand les grands acteurs du secteur en France sont fragiles ou pas assez innovantes et que l’on ne peut plus compter sur la commande publique. Cela explique l’intérêt, par exemple, d’avoir de fortes délégations de startups de la région au CES de Las Vegas comme dans d’autres salons spécialisés. Le rêve pour les startups dans les nanotechs ? Etre détectées par Apple ou Samsung et leur fournir un composant qui sera vendu à des dizaines voire des centaines de millions d’exemplaires !
Le propre des écosystèmes d’innovation qui réussissent est d’aligner les conditions du succès du début à la fin du processus d’innovation : de la recherche aux produits et à la commercialisation. On ne réussira en France qu’en alignant bien ces perles, pas en les opposant les unes aux autres (trop ou pas assez de technologies, trop ou pas assez de marketing, etc).
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C’est cool de faire découvrir ainsi les innovations de la région.
Dommage qu’il y ait des erreurs : Isorg ne produit pas des cellules PV organique mais des photo-détecteurs imprimés sur plastique. Ce n’est pas la production d’hydrogène qui est gazeuse ou solide, mais le stockage de l’hydrogène…Pour ne citer que 2 erreurs!
J’ai viré la mention erronée à ISORG au début, la société étant bien décrite plus loin dans l’article et bien sur les capteurs d’image souples. J’ai corrigé aussi le point sur l’hydrogène même si c’est un peu du pinaillage… :), en séparant le stockage et la production.
Il y a d’autres erreurs à corriger ?
Je l’avoue, je pinaille! Mais la précision rend votre article encore plus savoureux! 😉
Si on veut continuer à jouer avec les détails, les PAC ne sont pas en platine mais contiennent quelques µg de platine utilisé comme catalyseur.
Enerbee n’utilise pas l’énergie thermique mais mécanique.