Les français de la TV connectée : iFeelSmart

Publié le 21 septembre 2012 - 7 commentaires -
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Dans la série des acteurs français de la TV connectée, nous allons examiner l’offre d’une startup, celle d’iFeelSmart. La société propose une solution logicielle pour la consommation de contenus télévisuels sur TV connectées, set-top-boxes et seconds écrans (tablettes, smartphones). Elle est dotée d’une interface utilisateur très agréable d’utilisation et supportant tous les types de contenus. Elle est commercialisée en marque blanche auprès des opérateurs télécoms et constructeurs de TV connectées.

ifeelsmart logo

L’équipe

La société IFeelSmart a été créée par deux spécialistes du monde de la télévision et des médias : Shy Shriqui (Président) et Xavier Bringué (DG).

Shy Shriqui a été notamment responsable informatique chez Warner Music où il a pu créer de nouveaux formats, numériques, de diffusion de la musique. Chez Novedia et pour le compte d’Orange, il mène une mission de conseil consistant à détecter les technologies intéressantes chez les startups. Il y lance le projet Wormee, le « Deezer » d’Orange puis rejoint Jean-Louis Constanza en 2008 lors de la création d’Orange Vallée décidé par le CEO de l’époque, Didier Lombard. Sous l’impulsion de ce dernier, il y lance le projet de nouvelle set-top-box TV du groupe qui a abouti après diverses aventures à la création d’iFeelSmart.

Xavier Bringué a de son côté un profil marketing produit : sur QuickTime chez Apple, sur les produits de communication grand public (modems) chez Sagem puis les « webphone » d’Alcatel. Il entre en 2000 chez Microsoft où il participe à la promotion des technologies Windows Media auprès des créateurs de contenus, opérateurs, constructeurs et chaines de TV en Europe. Il est aussi impliqué dans la bataille HD-DVD, promu par Microsoft, contre Blu-ray. La bataille est gagnée par ce dernier. Il entre chez Orange en 2008 au Technocentre qui est la branche marketing amont de la société où il prend en charge le projet de prochaine set-top-box TV.

C’est à ce moment que Xavier Bringué rencontre Shy Shriqui avec qui il travaille de concert sur ce projet. Lorsque le projet perd son soutien en interne chez Orange, Shy Shriqui et Xavier Brinqué décident de continuer à le faire vivre en quittant Orange. Le tout en étant soutenu par Jean-Louis Constanza qui lui, reste chez Orange.

Chez Orange et par la suite, les fondateurs d’iFeelSmart ont fait appel à Dale Herigstad (ci-dessous) pour la conception de l’interface utilisateur de leur solution. Avec son agence Schematic, il avait gagné l’appel d’offre d’Orange contre Ideo, une société de design bien connue aux USA. Dale Herigstad est un concepteur d’interfaces graphiques qui a eu quatre Emmy Awards sur la création de sites web de grandes chaines TV, a été impliqué dans l’un des premiers projets de TV interactive (à Orlando en 1994), travaillé sur Battlestar Gallactica. Il a aussi conçu les interfaces utilisateurs de “Minority Report”. Une pointure et un partenariat unique en son genre dans l’écosystème français. Il joue le précieux rôle de “design advisor” d’iFeelSmart.

J’ai pu le rencontrer à l’occasion de l’IBC 2012. Il m’a notamment raconté comment avaient eu lieu les tests utilisateurs de l’interface d’iFeelSmart, en France et au Royaume Uni. Avec une présentation de cinq minutes et dix minutes de prise en main assistée ou pas. D’où une observation intéressante des variations culturelles : les utilisateurs français aiment bien les dispositions en mosaïque (comme dans les bouquets CanalSat ou dans l’interface utilisateur de la SFR Evolution) tandis que les britanniques préfèrent les grilles de programmes classique (EPG). D’où un mélange des deux métaphores dans iFeelSmart. L’interface proposée utilise en abondance des représentations graphiques des contenus et évite les éléments textuels tant que c’est possible.

Dale faisait aussi remarquer qu’il faut savoir distinguer dans la conception les fonctionnalités, la facilité d’emploi et le style. On retrouve cela dans la démarche de l’interface utilisateur d’iFeelSmart : très bien pensée pour les deux premiers points (cinématique applicative) tandis que la dernière n’est pas entièrement “léchée” et peut donner libre court à la créativité des clients opérateurs. C’est ma foi un scénario assez classique.

Dale Herigstad (1)

L’équipe d’iFeelSmart est sinon complétée de cinq développeurs qui avaient travaillé en sous-traitance sur le projet lorsqu’il avait démarré chez Orange.

L’histoire étonnante d’une spin-off d’Orange

Une fois n’est pas coutume, je vais m’attarder sur l’histoire de ce projet qui est pour le moins originale.

Didier Lombard avait confié à Orange Vallée la mission de préparer la future génération de set-top-box du groupe, bien avant l’arrivée de la Neufbox Evolution et de la Freebox Révolution, suivies récemment de la BBox Sensation et de la dernière box de Numericable, ces trois dernières fonctionnant sur architecture Intel Atom (Sodaville ou Groveland). Il s’agissait de créer une box qui allait tenir compte des évolutions du marché notamment dans les usages multi-écrans. Le tout dans un contexte d’arrivée progressive d’acteurs internationaux sur ce marché (Apple, Google), du poids relativement faible d’Orange à l’échelle mondiale et de la nécessite de mutualiser une partie du middleware avec d’autres acteurs. Et avec une répartition en pleine évolution de la valeur entre la gateway (modem et routeur ADSL/fibre) et la box TV. C’est d’ailleurs à ce moment qu’a été créé SoftAtHome, une joint-venture entre Orange, Sagem et Technicolor concernant plutôt la partie gateway de l’offre des opérateurs. Ici aussi, dans une logique de mutualisation. Et tout ceci, avant l’arrivée de l’iPad.

En 2008, Shy Shriqui avait découvert les technologies de capture du geste de Primesense et SoftKinetic, la première ayant ensuite fait son apparition dans la Kinect de Microsoft. Elle donna lieu au CES de janvier 2009 à une démonstration réalisée par Orange Vallée sur le stand du belge Softkinetic de pilotage d’une interface de vidéo à la demande avec les gestes.

Shy Shriqui et démo Keenu Soft Kinetic (2)

En 2009, le projet prend forme et aboutit à un premier prototype de set-top-box qui tourne sur l’architecture Intel Sodaville, un processeur Atom dédié aux set-top-boxes, le CE4100. Le choix de ce processeur est à l’époque plutôt hardi car Orange est le premier opérateur à l’annoncer. Suivront de nombreux autres opérateurs français : Free avec la Freebox Révolution qui arrive début 2011, puis Numericable et Bouygues Télécom en 2012. Il y avait d’ailleurs beaucoup de scepticisme sur la capacité d’Intel à bien pourvoir aux besoins d’une set-top-box notamment sur le support de la sécurité des accès aux contenus. Le prototype de box Orange est même démontré en janvier 2010 lors du keynote du CEO d’Intel, Paul Ottelini, au CES de Las Vegas. Et je suis dans la salle.

En 2010, les développements logiciels avancent et j’ai l’occasion d’en voir une démonstration sous NDA en mars 2011 chez Orange Vallée à Chatillon sous Bagneux, juste après le lancement de la Freebox Revolution. L’interface proposée est très élégante et permet de naviguer facilement entre toutes les composantes de l’offre TV : le direct, un guide de programme, de la VOD, de la catch-up. Il intègre des contenus enrichis, notamment au niveau du guide de programme.

A l’époque, pour un tas de raisons internes à Orange, le projet perd ses soutiens. Le projet de set-top-box d’Orange Vallée tombe alors à l’eau au printemps 2011. Le projet de future set-top-box Orange est alors repris en main par FT R&D avec une vision moins en rupture avec la base installée. Il pourrait sortir avant fin 2012, avec presque deux années de retard, après la mise à jour majeure des box de tous les autres opérateurs français, Numericable compris.

En septembre 2011, poussés par l’envie d’entreprendre et de ne pas laisser le projet en plan, Shy Shriqui et Xavier Bringué décident de créer une spin-off d’Orange Vallée pour le finaliser et le commercialiser. Orange ayant investit plusieurs millions d’Euros dans l’affaire : ce serait dommage de tout laisser en plan ! Ils négocient avec Orange une cession de la propriété intellectuelle et la société poursuit le développement et la commercialisation du logiciel en étant totalement indépendante d’Orange.

Je les retrouve au CES en janvier 2012 dans une suite d’un hôtel à côté du Las Vegas Convention Center où ils font la démonstration de leur technologie à des opérateurs et constructeurs du monde entier. En tout, une cinquantaine de rendez-vous qui leur permettent de constituer un bon portefeuille de prospects. Ils me font une démonstration de leur solution qui a bien avancé et prend maintenant en compte les smartphones et tablettes tout comme les scénarios de « social TV ». L’ensemble est très convaincant et je l’évoque dans le Rapport du CES 2012 (pages 74 et 75).

Mais je ne peux en présenter aucun élément visuel, l’équipe étant en plein processus de protection de sa propriété industrielle. Sur ce, début septembre 2012, iFeelSmart peut enfin présenter publiquement son interface. Elle le fait à l’occasion de l’IBC d’Amsterdam et sur le stand d’Intel sur lequel on trouve aussi la démonstration de la nouvelle box du cablo-opérateur néerlandais UPC (sous middleware NDS avec l’interface Snowflake 12) et la BBox Sensation de Bouygues Télécom (dont le logiciel a été réalisé par Sagem).

Panorama de la solution

La solution d’iFeelSmart est un ensemble de middleware et d’interface utilisateur d’expérience télévisuelle et multimédia tournant à la fois sur TV connectées, set-top-boxes et seconds écrans comme les tablettes et smartphones.

La solution présente les caractéristiques suivantes :

  • Elle se focalise sur l’expérience télévisuelle de la TV en direct, ce qui lui permet d’être « broadcaster friendly ». C’est presque l’antithèse de Google TV ou de l’Apple TV qui délaissent la TV en direct pour privilégier la consommation de contenus à la demande. L’interface d’iFeelSmart comprend un guide de programmes illustré avec des graphiques et de fonctions d’enregistrement de la TV, d’accès à la TV de rattrapage et à la VOD et à la S-VOD (vidéo à la demande sur abonnement). D’un seul bouton de télécommande, on accède à un menu en overlay du programme regardé qui permet de faire une recherche de contenus, d’accéder aux autres chaînes, aux applications et au menu principal.

iFeelSmart_Home

  • L’interface est très dépouillée et fluide grâce à l’exploitation de la puissance des architectures processeur modernes Intel ou ARM. Elle peut notamment fonctionner en 3D stéréoscopique. Elle fonctionne en mode multi-tâche ce qui permet de basculer rapidement d’une tâche à l’autre, pour par exemple passer rapidement de la TV en direct à son navigateur web ou à une application spécifique sans avoir à les relancer dans un menu comme c’est le cas aujourd’hui dans les TV connectées et les set-top-box. Le design de l’interface n’est pas encore suffisamment dépouillé à mon goût mais peu importe car celle-ci est de toutes manières faite pour être personnalisée pour chaque opérateur avec sa propre charte graphique.

iFeelSmart on Intel booth (France) (3)

  • Elle intègre une fonction de recommandation de contenus qui fonctionne sur l’ensemble des sources de contenus proposés par les opérateurs clients d’iFeelSmart. Cela couvre aussi bien la TV en direct que la TV de rattrapage ou la VOD. Ce genre de fonctionnalité commence à être courante dans les Smart TV. Mais en France, aucune box n’en propose véritablement. iFeelSmart s’appuie pour ce faire sur des solutions tierces parties telles que celles de l’israélien Jinni ou de la startup française Spideo.
  • Elle intègre nativement la commande gestuelle de l’interface en plus d’une télécommande classique à sept boutons voire d’un clavier. C’est un peu gadget mais peut se révéler utile dans certaines situations, notamment pour des applications de jeux. Cela s’inscrit dans la mouvance des commandes “multimodales” de la TV qui associent la télécommande classique, le geste, la voix et les seconds écrans à interface tactile (tablettes, smartphones). Cette fonctionnalité reprend le travail du projet Keenu d’Orange Vallée. Elle s’appuie sur le SDK de PrimeSense qui consiste en un micro-contrôleur spécifique, une caméra couleur CMOS, un émetteur infrarouge et une caméra infrarouge. Ce kit est intégré dans les box et TV des clients d’iFeelSmart en fonction de leurs choix. La fonction de commande gestuelle suit le mouvement des mains pour des commandes individuelles (comme changer de chaine, avec plusieurs gestes types reconnus comme un push avec la main, un cercle, un mouvement de rotation comme avec un volant, etc) ou pour modifier un paramètre (monter ou descendre le volume sonore). La commande gestuelle utilise diverses bibliothèques logicielles dont l’une provient de Softkinetic, une société belge et l’autre de PrimeSense.
  • Les fonctionnalités de « Social TV » (Facebook, Twitter, etc) sont présentes dans l’ensemble de l’interface utilisateur et ne nécessitent pas le lancement d’applications séparées comme c’est actuellement encore trop souvent le cas dans les TV connectées et set-top-boxes.

iFeelSmart_TV_channel_social_app

  • La solution permet la consommation de différents contenus : TV et VOD certes, mais aussi applications, jeux, navigation Internet et médias personnels (images, musiques, vidéos).
  • L’interface fonctionne indifféremment sur TV connectée, sur set-top-box ainsi que sur les seconds écrans et notamment les smartphones et tablettes Android. A la fois pour y profiter de l’ensemble de l’expérience utilisateur pour sélectionner et visualiser les contenus mais également pour interagir avec la TV et lui envoyer les contenus sélectionnés.

iFeelSmart on Intel booth (France) (5)

Architecture technique

iFeelSmart est l’une des rares solutions pour box et TV développée en code natif C++ et en Open GL avec un support des standards du web et notamment HTML 5 ainsi que de Flash 10 pour l’exécution des applications tierces-parties. Cette hybridation combine donc la performance du code natif exploitant toutes les capacités des processeurs, expliquant la fluidité de l’interface utilisateur, au support des standards pour construire et capter un écosystème d’applications, notamment celui d’HbbTV (qui au demeurant tourne actuellement sous HTML 4). HTML 5, OpenGL et Flash assurent une compatibilité avec les principaux jeux du marché.

Le développement représente à ce jour 500000 lignes de code ce qui est une masse conséquente. Ce développement avait été initialement sous-traité par Orange à diverses sociétés de service (Linagora, Altran, …). L’architecture proposée est bien entendu modulaire et permet l’installation de plug-ins ayant accès à l’interface utilisateur ainsi que des connecteurs avec une interface générique pour accéder aux catalogues de vidéo à la demande, aux magasins d’applications tiers et aux données de guides de programmes de chaines TV. Sans compter les divers systèmes de back-office des opérateurs clients.

iFeelSmart on Intel booth (France) (6)

Côté “client”, la solution iFeelSmart tourne sur processeurs Intel (série Atom Sodaville/Groveland/Berryville) ou sur chipsets  à base de noyaux ARM. L’équipe iFeelSmart avait ainsi démontré sa solution sur processeur Qualcomm Snapdragon pendant le CES 2012. Cette technologie équipe par exemple les nouvelles TV connectées de Lenovo mais également de nombreux smartphones sous Android et Windows Phone.

iFeelSmart supportera également à terme également les processeurs de la série Orly de chez STMicroelectronics ainsi que la famille Exynos de Samsung. Cette dernière est importante car elle équipe les Smart TV, smartphones et tablettes Samsung. Sur les smartphones et tablettes tournant sous Android, le développement est fait en Java sans dépendance vis-à-vis du processeur du mobile.

Le marché d’iFeelSmart
iFeelSmart propose sa solution à deux principaux types de clients : les opérateurs et les constructeurs.

Les opérateurs télécoms, du câble et du satellite qui proposent des solutions d’IPTV ou de TV premium ont du mal à concurrencer les solutions « over the top », surtout hors de France qui est un pays un peu à part avec des FAI très puissants équipant plus de 27% des ménages en IPTV. Le coût de mise en place de leur solution est de plus en plus élevé et la partie TV de leur offre n’est pas très profitable. Pour ne prendre que l’exemple des FAI français, ceux-ci ont une offre de base à 30-32€ par mois et leur revenu mensuel moyen par client est de 36€ (en HT, cependant, alors que l’offre de base est TTC). Ce qui veut dire qu’une faible part de leur revenu provient de la vente de contenus et services additionnels comme la VOD. Le marché se complexifie avec la consommation de contenus en mode multi-écrans et notamment sur tablettes. Les opérateurs doivent supporter un nombre grandissant d’écrans et d’architectures à partir de leur gateway (modem ADSL/fibre), sans compter leur propre base installée de box d’anciennes générations. Cela devient un casse-tête technologique et économique. D’où l’intérêt d’offres logicielles qui prennent bien en compte cette diversité technologique grandissante des écrans de la maison.

Les constructeurs de télévisions connectées avec leurs plateformes propriétaires, Samsung en tête font à la fois partie de l’univers concurrentiel d’iFeelSmart mais en sont aussi des clients potentiels. Ils concurrencent surtout les box des opérateurs télécoms qui sont maintenant en général plus puissantes et souvent dotées d’un disque dur pour l’enregistrement de programmes. Les TV connectées sont dotées de processeurs souvent anémiques qui rendent leur interface assez lente. Même si LG Electronics et Samsung intègrent des processeurs de plus en plus rapides dans leurs Smart TV, double cœur et même quadri-cœurs. L’interface utilisateur des TV connectées est assez déficiente en général car elle s’inspire de canons asiatiques qui valorisent l’idéogramme plus que le graphisme qui sont assez différents des canons occidentaux. Elles n’ont pas d’équivalent sur les seconds écrans.

LG Electronics intègre Google TV sur une partie de sa gamme 2012 et est propriétaire sur le reste. Les constructeurs chinois comme Haier et HiSense ou Lenovo sont en train d’adopter Android mais avec une interface utilisateur propriétaire qui n’est pas celle de Google TV. A noter que la plupart des TV connectées ont une assez mauvaise intégration avec la TV en direct et un guide de programme très pauvre. L’expérience utilisateur fonctionne en silos : chaines TV, applications, réseaux sociaux. Rien n’est intégré dans la navigation, un domaine où iFeelSmart se démarque nettement.

iFeelSmart_TV_channel_ecosystem

Environnement concurrentiel

Le marché de la TV connecté est très fragmenté avec des acteurs mondiaux et locaux, aucun n’arrivant pour l’instant à prendre le dessus. Par ailleurs, il est caractérisé par le syndrome du « service outillé », les opérateurs et constructeurs demandant aux industriels et éditeurs de logiciels de personnaliser leurs offres. Au point que des acteurs leaders comme NDS ont plus de la moitié de leurs effectifs qui travaillent sur les projets clients.

Qui sont les acteurs en concurrence frontale avec iFeelSmart ? Il y a l’embarras du choix sachant que l’inventaire n’est jamais exhaustif.

Les grands éditeurs de middleware comme NDS avec son interface SnowFlake ou le groupe Kudelski avec ses filiales Nagravision et OpenTV. Ils maitrisent en général également les technologies de contrôle d’accès conditionnel (CAS) et de DRM. Ce sont des éditeurs de logiciels avec une grosse activité de service pour personnaliser les solutions pour leurs clients qui sont les acteurs de la TV payante : les opérateurs télécoms, du câble et du satellite.  La plupart d’entre eux ont maintenant des offres multiplateformes et supportent la plupart des chipsets des set-top-boxes du marché (ST Microelectronics, Broadcom, Sigma design, Intel). Par contre, ils ne sont pas présents dans le marché des constructeurs de TV connectée. Leurs prix sont assez élevés du fait de coûts de structure importants et d’une difficulté à factoriser leurs logiciels entre leurs clients.

Les éditeurs de logiciels « over the top » comme l’israélien Boxee que l’on retrouve dans les boitiers de D-Link. Comme l’Apple TV, ces logiciels permettaient de consommer tout un tas de contenus vidéo à la demande, sauf la TV en direct. Résultat, ils ont ajouté un support de la TNT avec un tuner sous forme de dongle et une verrue dans l’interface utilisateur. Contrairement à iFeelSmart qui intègre la TV live au cœur de son interface utilisateur. On peut aussi citer un autre israélien, Comigo, qui vise le marché des set-top-box comme celui des TV et des seconds écrans. Il propose une solution multi-écrans qui se rapproche fonctionnellement de celle d’iFeelSmart.

Le français httv que nous avons déjà ausculté dans ce blog et avec sa solution httvBox, qui s’appuie sur HbbTV. La solution est plutôt destinée aux box “OTT” exploitant la TV broadcast qu’aux box des opérateurs. Ce n’est pas vraiment le marché visé par iFeelSmart.

Un autre français, Netgem, ancien fournisseur historique de SFR/Neuf et qui se développe bien à l’international, comme en Australie (avec Telstra) ou dans les pays nordiques. C’est l’un des rares à maitriser son middleware de bout en bout et à supporter divers écrans dont les tablettes. Il promeut son architecture n-cloud permettant le partage des contenus de l’utilisateur en mode SaaS. Côté interface utilisateur et usages sociaux, l’offre de Netgem est par contre un peu en retrait.

Google TV, une solution logicielle destinée aux TV connectées et à des set-top-boxes « over the top » bâtie autour d’un moteur de recherche de vidéos, d’un navigateur Internet vaguement adapté à l’expérience télévisuelle et d’un magasin d’applications, qui comprend des services de VOD. Mais Google TV ne gère pas directement la consommation de la TV et ne comprend pas de véritable guide de programmes linéaire classique par chaîne. Google TV est supporté par LG Electronics sur certains modèles aux USA, par Vizio sur le marché US, et par Sony  qui vient d’arriver en France avec une box OTT sous Google TV (box OTT : permettant de visualiser des contenus provenant d’Internet sans qu’elle soit fournie par un opérateur télécom/câble). Google TV n’a pour l’instant pas beaucoup d’effets de levier sur l’écosystème, que ce soit sur les opérateurs télécom ou les chaines de TV. Surtout dans la mesure où l’objectif avoué de Google étant à terme de capter une part du juteux marché de la publicité TV. Résultat, Google se lance dans ‘”l’achat” de l’écosystème de contenus en finançant à coups de centaines de millions de dollars des contenus et des chaines de contenus “premium”. Pour l’instant, surtout en langue anglaise. Auront-ils les moyens de le faire pour leur adaptation en français ? Acheter son écosystème n’est jamais un très bon signe de santé de sa plateforme même si c’est peut-être plus courant dans les contenus que dans les applications et les logiciels. Samsung a du faire de même aux débuts pour enrichir le catalogue d’applications natives de ses Smart TV. Un catalogue qui ne comporte que quelques centaines d’applications à ce jour. Ce qui montre que soit le marché est trop fragmenté pour attirer les développeurs, soit qu’il n’y a pas suffisamment d’usages chez les téléspectateurs, soit les deux à la fois !

Microsoft et sa Xbox 360 qui est devenue un terminal de choix secondaire pour les opérateurs. En France, Orange est de la partie, en plus de Canal+ et M6. Aux USA, Verizon propose ses services IPTV FiOS via la Xbox. Plusieurs dizaines d’opérateurs ont fait de même dans le monde et profitent ainsi de la base installée de près de 80 millions de Xbox dans le monde, dont plus de la moitié sont connectées et avec un abonnement Xbox Live.

Apple qui propose pour l’instant son boitier « over the top » Apple TV qui s’est vendu à environ 5 millions d’exemplaires dans le monde ce qui est assez modeste. Il s’agit surtout d’un boitier permettant de consommer des contenus à la demande, et notamment de la VOD via iTunes et maintenant Netflix (dans les pays couverts par ce dernier), une fonction que savent assurer tout un tas de boitiers comme celui de Roku tout comme les lecteurs de Blu-ray. Apple TV n’enrichi pas la consommation de TV en direct, que ce soit via un tuner ou via des chaînes TV streamées. Tout le monde attend une hypothétique TV miracle d’Apple qui n’arrivera visiblement pas avant 2013 si ce n’est 2014. Si elle arrive un jour. Et de toutes manières, Apple n’est pas un fournisseur de middleware pour opérateurs !

Conclusion

Depuis que j’ai pu la découvrir, la cinématique de l’interface utilisateur d’iFeelSmart m’a vraiment séduit. Elle est parfaitement adaptée à la consommation de contenus en mode multi-écrans. Sa fluidité a très peu d’équivalents sur le marché.

Reste à vendre la solution. Ce business est difficile. Quelles sont les chances d’y arriver quand on est une startup ? Ici, la R&D a été réalisée et bien financée, en amont par Orange. Il reste évidemment des modules à écrire déci-delà, mais l’essentiel est de trouver des clients. Dans un marché où les grands acteurs ne prennent pas de risques, l’une des approches les plus intéressantes consiste à faire alliance avec des partenariats industriels. Cela a bien commencé avec leur relation avec Intel et Qualcomm qui leur a permis de rencontrer un tas d’opérateurs et constructeurs à l’échelle mondiale. Il faut maintenant concrétiser !

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Publié le 21 septembre 2012 Post de | Apple, Mobilité, Startups, TV et vidéo | 22294 lectures

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