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Résultats de l’appel à projets Serious Gaming et Web 2.0

Post de Olivier Ezratty du 16 septembre 2009 - Tags : Entrepreneuriat,France,Innovation,Internet,Logiciels,Politique,Startups | 95 Comments

En mai dernier, le gouvernement avait lancé un appel à projets de 30m€ pour financer des projets de création de solutions de Serious Gaming et Web 2.0 (au sens large du terme). L’idée était d’intégrer le numérique et les créateurs de projets dans le plan de relance économique du gouvernement qui avait fait un peu trop la part belle au bitume.

Le 15 septembre 2009, Nathalie Kosciusko-Morizet accompagnée de Luc Rousseau, le Directeur de la DGCIS (Direction Générale de la Compétitivité, des Industries et des Services, qui dépend de Bercy) annonçaient les résultats de cet appel à projet. Ils en profitaient pour mettre en valeur par leur témoignage cinq projets extraits des 92 sélectionnés.

Voici quelques détails sur les résultats de cet appel à projet…

Le processus de sélection

La DGCIS qui assurait le dépouillement des candidatures pendant l’été 2009 a été surprise par le nombre de projets : 500 – pile poil ! Pas étonnant vus les montants distribués, qui relèvent de ce que l’on obtient avec des business angels plus que pour un premier tour d’avances remboursables d’Oséo !

Le jury constitué pour l’occasion était constitué essentiellement de responsables concernés de l’administration (Oséo, CNC, ANR, Ministères de la Santé, de l’Intérieur, etc), deux pôles de compétitivité (Cap Digital, Imaginove), une CCI (de Valenciennes) et un consultant, Julien Alvarez (pas identifiable avec précision). Il manquait peut-être juste quelqu’un du secteur privé, entrepreneur, business angel, ou autre.

Les résultats

Ils sont publiés sur le site de la DGCIS, avec la liste des heureux élus (projets et partenaires des projets). En voici une synthèse chiffrée :

Résultats appel à projets serious gaming et web 2 sept2009

A noter que comme annoncé, le taux de subventionnement des projets était supérieur pour les PME, pour les projets collaboratifs et parrainés par un pôle de compétitivité. Les projets semblent bien répartis sur le territoire, sans passer par l’écueil des pôles de compétitivité, un projet sur un thème donné étant éligible quelle que soit sa localisation géographique.

Les plus grosses enveloppes attribuées l’ont été à un projet web 2.0 destiné aux personnes âgées pour 800K€ et porté par Alcatel (Mazadoo 2.0) et à au projet Virtual Clone Studio de création de clone virtuel à partir d’une personne réelle porté par plusieurs startups (Vocally, Solidanim, Spirops, etc), et pour 900K€.

Les projets financés ne pourront pas l’être une nouvelle fois via les pôles de compétitivité. Les projets recalés pourront par contre déposer leur dossier dans le neuvième appel à projets (dit “P9”) des pôles de compétitivité géré par la DGCIS pour le par le Fonds Unique Interministériel, la date limite étant fin novembre 2009 (il y a deux appels à projets par an pour les pôles).

Côté budget, par rapport à l’annonce de mai 2009, “l’opération NKM” a été un peu modifiée :

  • 15m€ ont été alloués aux projets web 2.0 au lieu des 10m€ de prévus, en raison du grand nombre de projets candidats.
  • Le surcroît de 5m€ a été retranché de la seconde phase de l’opération destinée aux appels d’offre publics. Il reste donc 15m€ au lieu de 20m€. Ces 15m€ se répartissent entre 10m€ pour l’appel à projets Proxima Mobile clôt le 14 septembre 2009, un portail d’information mobile rassemblant des services gratuits, et 5m€ de commande publique à venir. NKM et son équipe doivent ainsi utiliser les résultats de l’appel à projets pour sensibiliser les différentes administrations centrales pour lancer des appels d’offre spécifiques. Probablement la partie la plus délicate du processus.

Caractéristiques des projets retenus

Les projets retenus dans l’appel à projets sont très variés. La majorité sont le résultat de partenariats, dans une mixture que l’on retrouve souvent dans les pôles de compétitivité : une grosse boite, une ou deux PME, et un laboratoire de recherche public. Sachant que c’est souvent la grosse boite ou l’une des PME qui est motrice du projet. Certains comme Total Immersion ou Exalead ont trouvé le moyen de figurer dans deux projets sélectionnés. Cela me choque un peu pour ce dernier, étant déjà largement familier des subventions, avec le projet Quaero qui lui a permis de récupérer la bagatelle de 9m€ d’aides publiques !

Dans les noms connus (de moi…) on retrouve : Thalès, ATOS, le CEA, Rue89, Wikio, la FING, KXEN, Daily Motion, Skyrock, La Poste, MylD.is Certified qui était à la dernière conférence LeWeb, tout comme Haploid, Alcatel, Sémiocast (hébergé chez l’incubateur Agoranov à Paris), Eeple, le créateur du portail pour adolescents Melty soutenu par Bouygues Télécom, Fittingbox (et son système de réalité augmentée pour choisir ses lunettes) et Imaginatio (projet Splayce de couplage de gestion de la connaissance et de réseau social). En tout cas, une majorité de PME ce qui nous change de nombre de pôles de compétitivité où dominent les projets pilotés par de grands groupes.

Site de data.gov

En avril dernier, NKM avait été séduite par ce qu’elle avait vu aux USA avec le projet data.gov qui vise à rendre accessibles par les entreprises une grande richesse de données publiques, pour créer de nouveaux services. Dans l’appel à projets web 2.0, elle souhaitait favoriser les projets qui feraient appel à des données publiques existantes, ou dont la publication serait demandée à l’occasion. Au final, 10 des 44 projets retenus sont dans cette catégorie, ce qui est pas mal. Il y a en particulier, DataPublica, qui se veut être une place de marchés de données publiques et rassemble une boite de conseil en ecommerce (Araok) et deux spécialistes de l’open source (Talend et Nexedi). Et puis Geo+, un service de partage de données publiques géolocalisées.

L’appel à projets mettait aussi l’accent sur les usages destinés aux citoyens, avec le lien avec des appels d’offres publics. Une conséquence indirecte : de nombreux projets sortent un peu du champ de l’économie de marché traditionnelle, notamment dans la santé ou dans l’éducation. C’est cependant une caractéristique habituelle de projets en phase d’amorçage : ils n’ont pas encore trouvé leur modèle économique. Mais le système foisonnant des aides publiques n’encourage malheureusement pas les porteurs de projets à se poser la question du modèle économique ! Il y a bien entendu aussi pas mal de projets autour des réseaux sociaux, mais assez tournés vers l’outillage d’analyse comme le projet ARSA porté par SAP et l’Ecole Centrale et Cèdres porté par KXEN.

Dans le serious gaming, on constate une dominante sur la santé, l’éducation et la formation, et l’outillage de création de jeux.

Le projet retenu le plus intriguant est sans doutes Cimetières 2.0, un logiciel de gestion de cimetières en SaaS. On est bien dans l’épure : une solution pour les services publics, ici, les collectivités locales qui ont la charge des cimetières.

Les projets mis en avant

Cinq projets sont mis en avant dans le résultat de cet appel d’offre. Ils se présentaient lors de la conférence de presse d’annonce des résultats du 15 septembre 2009 :

Médikids de Valencienne (la ville de Jean-Louis Borloo…) qui sera un jeu vidéo pour accompagner les enfants pendant leur hospitalisation en les informant sur la manière dont leur traitement ou leur opération va avoir lieu pour minimiser la douleur et la durée d’hospitalisation. Le jeu expliquera par exemple le fonctionnement de l’imagerie IRM, pourquoi il faut y être tout seul et pourquoi il ne faut pas bouger pendant l’examen.

Pixim, une plateforme collaborative de formation en entrainement de personnels à la gestion des risques associant Simfor (une PME de 10 personnes), S2i (un groupe de 3000 personnes) et et un laboratoire de l’Université d’Aix-Marseille. Le projet met en images 3D des procédures d’intervention.

Dongeons et Radon, un jeu de rôle pour améliorer l’attractivité des sciences expérimentales auprès des élèves de collèges. Un projet soutenu par Microsoft France !

Cobuse, un projet de la startup Cobuzz lancé avec le concours de François Bourdoncle, le créateur d’Exalead, qui vise à créer une base de donnée de la discographie – qui n’existerait pas (CDDB ? Ulike.net ?). Quid du business model ?

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Et Citypulse, porté par Daniel Kaplan que l’on ne présente plus (fondateur de la FING, et, c’est moins connu car ancien, rédacteur du PAGSI, le premier plan numérique sérieux du gouvernement, du temps de Lionel Jospin). C’est le projet de montre verte qui permet de collecter des données environnementales dans les agglomérations.

What’s next ?

Les projets sélectionnés devront fournir des éléments d’information détaillés à la DGCIS d’ici un mois. Les avances sont versées avant la fin de l’année 2009, suivies d’un paiement intermédiaire puis du solde à la fin du projet. Ensuite a lieu une évaluation des projets, qui doit être probablement assez succincte.

NKM a sinon en tête d’organiser un ou plusieurs événements dans lesquels les projets sélectionnés seraient mis en valeur. Elle souhaite aussi créer une émulation entre administrations et utiliser l’avant-garde des entrepreneurs Internet pour amener les PME à se numériser. Par exemple, en créant un guichet unique administratif en ligne pas seulement pour les auto entrepreneurs mais aussi pour les TPE et PME.

Vaste programme…

Post-mortem (ajouté le 18 septembre 2009)

Les commentaires de cet article sont riches de contenus. Il y a beaucoup de scepticisme sur l’intérêt de tels appels à projets. Mais les équipes soumissionnaires ont remonté quelques pistes sur les différentes manières de les aménager. En voici une synthèse :

  • Simplifier les dossiers de candidature.
  • Prévoir un peu plus de temps pour préparer les candidatures (deux mois au lieu d’un mois).
  • Allouer des budgets proportionnels à l’importance relative des sujets.
  • S’appuyer sur les ressources d’Oséo pour faire un pré-tri des dossiers.
  • Intégrer des professionnels du secteur concerné dans le jury.
  • Ne pas autant favoriser les projets collaboratifs.
  • Répartir les budgets sur un plus grand nombre de candidats.
  • Informer directement les porteurs de projets des résultats de la sélection et des raisons de la non sélection lorsqu’il y a lieu.

A bons entendeurs…

RRR

 
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