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Windows 8 est-il prêt pour les tablettes ?

Post de Olivier Ezratty du 19 septembre 2011 - Tags : Apple,Google,Internet,Logiciels,Microsoft | 19 Comments

Lors de sa conférence développeur Build des 13 au 16 septembre 2011 à Anaheim en Californie, Microsoft a levé le voile sur nombre de détails concernant la prochaine version de Windows. On comprend enfin comment Microsoft entend aborder le marché des tablettes – actuellement dominé par Apple – et qu’il avait testé sans grand succès avec les Tablet PC il y a environ 10 ans. La conférence était bien plus riche que cela, traitant aussi de l’évolution des outils de développement ainsi que de l’offre serveur et cloud de l’éditeur. Mais c’est l’application de Windows 8 aux tablettes qui retenait le plus l’attention.

Logo Conference Build Microsoft

Dans cet article, je vais tenter d’expliquer le bien fondé et d’éventuels écueils de cette stratégie par rapport à d’autres options et faire le lien avec les évolutions côté matériel. Je la comparerai avec celles d’Apple et de Google.

Les annonces de Microsoft tordent en tout cas pas mal le cou à la mode de la supposée “mort du PC” que j’ai déjà traitée ailleurs. Certains chroniqueurs américains parlent même de l’ère post-post-PC. C’est dire ! D’autres appellent les lecteurs à adopter une analyse non émotionnelle de cette annonce. Une posture que vous retrouverez ici même.

Avant la conférence Build

Le “avant” cette conférence n’était pas bien glorieux pour Microsoft pour ce qui est de l’univers des tablettes.

Cela a commencé il y a une dizaine d’années avec le lancement des Tablet PC basés sur Windows et donc l’interface utilisateur reposait principalement sur l’usage du stylet, couplée à un clavier amovible, avec la volonté de démocratiser la reconnaissance d’écriture. Cette catégorie de PCs n’a pas eu un grand succès. Il lui manquait plein de choses pour réussir, surtout dans le grand public : une interface tactile en plus du support du stylet, et multi-touch, un prix adapté au grand public, un poids acceptable, un design convenable, et une bonne autonomie. Résultat : les Tablet PC sont utilisés uniquement dans les environnement professionnels et sur de faibles volumes. J’ai ainsi utilisé pendant quelques années (2003-2006) un Tablet PC Toshiba Portégé M200 (ci-dessous).

Toshiba Portege M200 2

Un mois après l’annonce du premier iPad, et au MWC de Barcelone en février 2010, Microsoft présentait pour la première fois son nouveau système d’exploitation pour smartphones, Windows Phone 7. WP7 est doté d’une belle interface utilisateur qui fait oublier celle de Windows Mobile 6.5 et des précédentes, qui avait peu évolué à cause du tropisme entreprise de la société et de son activité mobile avant 2010. Mais à Barcelone comme plus tard, c’était le grand silence sur l’adaptation de WP7 aux tablettes. Je m’en étonnais à l’époque. L’interface utilisateur de WP7 était pourtant parfaitement adaptée aux tablettes, d’autant plus qu’elle est structurée comme une interface de tablette dont une fenêtre glissante est présentée sur smartphones. Nous sommes aujourd’hui un an et demi après cette annonce. Pour l’instant, le lancement de Windows Phone 7 n’est pas bien brillant. L’iPhone d’Apple et les smartphones sous Android dominent le marché. L’accord avec Nokia peut changer la donne par l’offre, mais côté demande, cela ne prend pas vraiment. La stratégie voisine de celle d’Apple ne paye visiblement pas. Il était préférable de ne pas répéter cette erreur avec les tablettes.

Windows Phone 7 People Screen

Là-dessus intervient une annonce clé au moment du CES 2011 à Las Vegas : le support de chipsets embarqués à base ARM pour Windows 8. On commence à comprendre la stratégie : c’est Windows 8 qui va équiper les tablettes “Microsoft” construites par ses partenaires OEM ! Cela rappelle le moto de Microsoft et de Steve Ballmer d’il y a 20 ans : la stratégie de Microsoft, c’est et cela reste “Windows, Windows, Windows”. Puis en juin 2011, arrivent les premières présentations de l’interface utilisateur de Windows 8 pour tablettes sous la forme d’une vidéo publiée sur YouTube.

Après la conférence Build

Dans cette conférence développeur Build, on a pu découvrir la plénitude de la stratégie de Microsoft. Ce n’est pas un OS pour tablette qui a été annoncé. C’est une évolution majeure de Windows qui – entre autres nouveautés – permet d’être un excellent système d’exploitation pour tablettes. Mais la conférence couvrait aussi l’offre outils de développement, serveur et cloud de l’éditeur.

Si vous ne l’avez pas déjà fait, regardez bien ce keynote de Steve Sinovski qui dure une heure et demi bien denses. Il rappelle le “Pearl Harbour Day”, cette conférence de presse de Bill Gates – le 7 décembre 1995 – où il annonçait la très attendue stratégie Internet de l’éditeur un peu largué par les avancées de Netscape. Une stratégie qui lui a évité de sombrer mais a couté au passage plus d’une décennie d’affaires antitrust aux USA et en Europe. Le scénario peut-il se reproduire ? Oui, Windows 8 permettrait à Microsoft de revenir dans le jeu du marché des tablettes. Mais si Windows l’emportait sur les tablettes grâce à sa base installée dominante sur desktops, certains concurrents pourraient remuer le chiffon rouge de l’antitrust comme en 1998.

OS Fixes et Mobiles Apple Microsoft Google

Au lieu donc de partir d’un système d’exploitation mobile bridé, Microsoft part de Windows pour couvrir les tablettes. Il lui a ajouté ce qu’il lui manquait pour les supporter convenablement : une interface utilisateur adaptée, le support du multi-touch (qui existe déjà dans Windows 7 au niveau driver) et un boot rapide. Mais il conserve l’interface traditionnelle du bureau de Windows en option et on peut passer rapidement de l’une à l’autre. Un scénario voisin de Windows dans les Tablet PC, mais avec une plateforme matérielle cible différente. Une stratégie diamétralement opposée à celle d’Apple qui exploite iOS sur ses iPad et non pas MacOS. Et aussi Google, qui fait de même avec Android et a une approche encore ambigüe pour les laptops, associant Chrome OS dans les Chromebooks et Android dans certains netbooks.

Windows 8 Start Screen

Ceci nous rappelle la différence fondamentale entre les couches basses d’un système d’exploitation et son interface utilisateur. Un système d’exploitation mobile est généralement très léger. Ses fonctions sont réduites au strict nécessaire. Le prix à payer est une incompatibilité avec les applications issues des PC et des Macintosh. Les systèmes mobiles permettent d’exécuter des applications natives ou des applications web mobile plus ou moins adaptées à la petite taille des écrans de smartphones. Cela n’aurait aucun sens de faire tourner sur smartphone une application faite pour l’écran du PC ou du Mac.

Windows peut-il convenir aux tablettes ?

Une tablette n’est pas un smartphone. Son écran est plus grand, et généralement aussi grand qSnapDragonue celui d’un netbook (9 à 10 pouces). On peut y faire tourner une plus grande variété d’applications. Son processeur peut être plus puissant que celui d’un smartphone. On ajoute même parfois un clavier aux tablettes. Donc, pourquoi ne pas supporter de véritables applications de bureau classiques pour permettre au nomade d’avoir l’ensemble de ses outils numériques sous la main et lui éviter de trimbaler à la fois une tablette et un laptop ou un netbooks comme c’est le cas aujourd’hui ?

Cela peut alourdir le système mais la capacité des processeurs embarqués à basse consommation le permet aujourd’hui. Windows 8 tournera sur base Intel et aussi sur des SoC (systems on chips) à base de noyau et jeu d’instruction ARM provenant de Qualcomm, nVidia et Texas Instruments. Par exemple, les processeurs Snapdragon S4 de Qualcomm gravés en technologie 28nm par TSMC à Taiwan seront dotés de un à quatre cœurs tournant à 2,5 GHz, d’un moteur graphique 3D double-cœur (Adreno), supporteront la vidéo 1080p, en intégrant à la fois un GPS et la communication 3G et LTE. C’est le meilleur niveau d’intégration du marché. Il simplifie grandement la conception de cartes mères. Leur disponibilité est prévue pour début 2012, juste à temps pour arriver en amont de la sortie de Windows 8. Les processeurs nVidia et Texas ne seront pas en reste, chacun avec leur spécialité, plus orientée vers le graphisme 3D. Et Intel continuera d’améliorer sa gamme Atom, notamment en termes de power management. Dans le même temps, Microsoft a réussi à réduire le “footprint” de Windows 8, c’est-à-dire la mémoire minimum consommée par le système lorsqu’il ne fait rien. C’est descendu à environ 400 Mo, un gain d’environ 200 Mo par rapport à Windows 7.317374-uefi-logo

Il faut aussi pouvoir éteindre et allumer sa tablette très rapidement. Un boot de Windows 7 dure jusqu’à 60 secondes. Une sortie de veille dure environ 3 secondes. Une sortie de veille prolongée quelques dizaines de secondes selon la mémoire RAM de la bécane. C’est là que le matériel entre en jeu. Les processeurs embarqués d’aujourd’hui gèrent mieux l’énergie et la mise en veille. Et associés aux nouveaux BIOS UEFI, ils permettent un boot très rapide. Moins de 10 secondes pour une tablette sous Windows 8, en théorie. Et toujours une à deux secondes pour sortir de la veille. On verra à l’usage.

Il y a ensuite le choix qui est donné à l’utilisateur d’adopter une métaphore bureau/folders/fichiers ou applications/contenus. Sur iPad, on n’a pas le choix : l’utilisateur est forcé d’utiliser la métaphore applications/contenus avec ses insupportables limitations. Qui n’a pas pesté contre iTunes lorsqu’il a voulu synchroniser avec son iPad ses photos (un seul répertoire autorisé) ou ses fichiers PDF (via iBooks, rebelote, un seul répertoire autorisé) ! On en est obligé de passer par des applications telles que Dropbox pour gérer une arborescence de fichiers. Horrrripilant ! Microsoft a choisi de permettre à l’utilisateur d’utiliser les deux métaphores sur Windows 8. La liberté, pas la contrainte ! La liberté du consommateur mieux promue par Microsoft que par le Apple du “think different” ? Mind blowing, non ?

La conférence Build a aussi permis de découvrir plein d’autres aspects de Windows 8 que voici un peu en vrac :

  • Le menu d’accueil des tablettes est non facilement personnalisable. Il s’agit plus d’un écran de widgets que d’un menu d’applications. Chaque rectangle dédié à une application est en effet sous le contrôle de celle-ci et affiche des informations mises à jour dynamiquement. Et à partir d’Internet Explorer, il est très facile de créer un bookmark pour un pavé qui sera présenté comme une application. Il serait intéressant de permettre à ce pavé d’être alimenté par le code web de l’application. Voici à quoi ressemble ce menu d’accueil en mode tablette une fois débarrassé de ses fioritures et après une installation d’Office sur le PC.

Accueil Tablette Windows 8 avec Office

  • L’interface du bureau traditionnel bénéficie d’améliorations démontrées lors de Build, certaines ciblant plutôt pour les utilisateurs avancés, ce qui est normal puisque les premiers utilisateurs sont les développeurs. Le mode double écran est plus finement paramétrable, avec une barre de tâche qui affiche les applications chargées dans chaque écran. Le gestionnaire de tâches consolide les fonctions de trois utilitaires différents (task manager, services manager, msconfig). La barre de progression de copies de fichiers affiche une courbe avec le débit de la copie et comprend une fonction de “pause” (ci-dessous). La sauvegarde et la restauration système sont aussi grandement améliorées. Enfin, les fenêtres de l’explorer ont maintenant des rubans empruntés à l’interface d’Office 2010/2007. Une interface contestable et contestée dans le cas d’Office 20XX mais qui prend son sens pour un usage sur tablette. Elle alourdit cependant le visuel du bureau.

File Copy in Windows 8

File Manager Windows 8

  • Windows 8 intègrera la version 10 d’Internet Explorer qui est adaptée au mode plein écran sur tablettes. Il semble qu’un site web soit vu comme une application. La version démontrée pendant Build n’avait pas l’air de supporter Adobe Flash mais cela ne veut pas dire que Microsoft veut tuer Flash (quoique…). Mais plus simplement que le code de Flash ne tourne peut-être pas encore sur les processeurs à cœur ARM utilisés pour les démonstrations. Je met ma main à couper que, comme sur Android, Flash sera supporté dans Windows 8 en mode tablette. Il le sera bien, par compatibilité Win32, dans le mode desktop classique.

Internet Explorer 10 en mode tablette

  • L’utilisateur pourra saisir un mot de passe “visuel” sous la forme de clicks à certains endroits dans une photo de la page de logon. Je ne sais pas d’où vient cette idée, mais elle est séduisante.
  • Windows 8 exécute toutes les applications Windows existantes. Ironiquement, on peut même développer son logiciel de tablette sur sa tablette (avec Visual Studio pour commencer).
  • Le logiciel de synchronisation des données entre PC et tablettes semble très souple. Il semble bien plus flexible que iTunes. C’est un point fort clé que Microsoft aura intérêt à développer et marketer au maximum car il correspond à un “pain point” majeur de l’usage de l’iPad.
  • Le support de l’écriture manuscrite subsiste. On va pouvoir donc bénéficier de la plus grande flexibilité d’usage avec clavier, souris, multi-touch (au delà de 2 doigts au passage !) et stylet pour l’écriture. Pas sûr que cela soit fondamental dans le grand public au vu de l’expérience du tablet PC. Cela servira toujours dans certaines applications verticales.
  • Les fonctions de l’antivirus Security Essentials sont intégrées nativement dans Windows 8, ce qui fera jaser les éditeurs d’antivirus si cela reste le cas dans la version finale. Ou bien, pour éviter les foudres de l’antitrust, Microsoft fera comme avec Internet Explorer depuis deux/trois ans : il proposera aux utilisateurs de choisir leur antivirus, en plus du navigateur. Un soucis que n’ont ni Apple avec l’iPad ni Google avec Android et Chrome OS qui n’ont pas d’antivirus parce ce que – parait-il – ils n’en ont pas besoin grâce à leurs noyaux Unix et Linux.
  • Le développeur a un large choix d’outils de développement pour créer ses applications : il peut utiliser le framework Metro de Windows Phone 7, le framework .NET ou bien les standards du Web tels que HTML 5 et JavaScript. Microsoft a diffusé lors de Build sa “preview” de Visual Studio 11, adapté au développement pour Windows 8. Visual Studio 11 fournit tout un tas de templates d’applications “tablette” pour Windows 8 (voir la liste des nouveautés).
  • Microsoft a aussi annoncé Windows Server 8, qui va remplacer Windows Server 2008 qui se met encore plus à la sauce du cloud (voir sa fiche produit).
  • Et puis, la plateforme de cloud computing Windows Azure bénéficie aussi d’un chapelet d’évolutions… qui me dépassent !

Les développeurs présents à la conférence sont repartis avec une tablette Samsung avec la preview de Windows 8 installée dessus. Une approche qui imite celle de Google I/O où ce même Samsung avait fournit une tablette Galaxy 10 pouces et un Chromebook à chaque participant.

Pour les autres, la Developer Preview de Windows 8 est librement téléchargeable ici. Pour la tester, il faut soit un PC assez récent, soit la lancer sous forme de machine virtuelle dans Virtual PC (gratuit pour les utilisateurs de Windows). Je l’ai installée sur un laptop Asus W7J qui date de 2006 avec un disque dur neuf. Ca tourne bien. Mais ce n’est pas une tablette !

Diable, détails et interrogations

Passons au chapitre des “oui mais”, “faut voir” et autres doutes sur la stratégie tablettes de Microsoft qui ont déjà émergé ou vont le faire :

  • Quid des tablettes elles-mêmes ? Est-ce que les constructeurs vont être à la hauteur en terme de design, de poids et d’autonomie ? Comme pour Android, Samsung mène la danse. Ses tablettes pour Windows 8 risquent de ressembler fort à ses tablettes Android côté design. Toshiba propose des tablettes Android à base de processeur Texas OMAP de 7 mm d’épaisseur. Elles seront facilement adaptables à un usage sous Windows 8. Mais aucune information précise n’a été fournie sur l’autonomie des tablettes Windows 8. On sait qu’elles doivent tenir une journée et on dispose d’éléments techniques sur la manière dont est géré le “power management”, celui-ci étant meilleur avec les processeurs à base ARM. Les constructeurs font aussi la promotion des Ultra Books, sortes de laptops extrêmement fins qui rappellent le design du Macbook Air. Enfin ! Ils sera dotés d’écrans multi-touch.

Windows 8 Laptops

  • Quid de la lecture de livres et revues ? C’est un des usages clés des tablettes. Aucune démonstration n’a été faite dans ce sens pendant la conférence Build. peut-être parce qu’il s’agit d’une application restant à développer et pas une fonction du système d’exploitation. C’est d’ailleurs aussi le cas pour l’iPad puisque celui-ci n’est pas configuré par défaut avec l’application iBooks installée. On notera aussi que la plupart des tablettes présentées lors de Build avaient un écran au ratio 16/9 et pas 4/3 comme l’iPad. Le 4×3 est mieux adapté à la lecture d’ebooks et de magasines.
  • Quid de la fiabilité ? L’architecture ouverte des PC et de Windows présente plein d’avantages (prix, choix) mais génère une instabilité technique notable. Je pense en particulier aux drivers des écrans multitouch. Microsoft a montré pendant Build ses robots de test avec doigts mécanisés qui permettront de mener une nouvelle génération de tests automatisés sur les tablettes. On attend de voir ce que cela va donner !
  • Quid de la compatibilité des applications Win32 sur les architectures ARM ? Au CES 2011, une démonstration avait été faite d’Office tournant sur un prototype d’ordinateur à base ARM. Est-ce que cela va être opérationnel dans la version finale ? Ou les tablettes ARM ne pourront-elles faire tourner que les applications recompilées pour processeurs ARM, avec des variantes possibles entre processeurs (Qualcomm, nVidia, Texas) ?
  • Quid de l’interface utilisateur ? Elle me semble un peu plus chargée que celle de l’iPad et même d’Android avec ses Widgets. Tout du moins, c’est la liberté donnée aux développeurs d’applications qui peut générer ce phénomène.
  • Même question pour la réactivité de l’interface utilisateur. Une attente est mortelle lorsque l’on interagit avec le doigt sur l’écran. Comme Windows est fait pour être multi-tâche et que les disques durs SATA fonctionnent encore en mode synchrone, cela pourra devenir gênant dans un usage lourd où l’on a plusieurs applications qui tournent en tâche de fond. Les stockages SSD qui équiperont sans doutes pas mal de tablettes auront un accès disque plus rapide, ce qui améliorera peut-être les performances.
  • N’existe-t-il pas un risque de syndrome “Media Center” ? L’interface de cette fonction de Windows est de très bonne qualité mais les PC Media Center n’ont jamais été un succès de marché car trop compliqués pour le salon. Qui plus est, ils étaient assez instables du fait de pilotes de périphériques déficients pour les tuners TV, sans compter la quasi-absence de solution officielle pour recevoir la TV payante et protégée par des systèmes de contrôle d’accès (CAS). Le marché de la tablette présentant moins de spécificités que celui de la TV, ce syndrome est donc évitable.
  • A force de vouloir s’adapter aux tablettes, il ne faudrait pas que Microsoft délaisse ses utilisateurs de PC classiques. Quand on installe la Developer Preview, l’interface utilisateur est celle d’une tablette, même sur un PC desktop ou laptop classique. Ce qui n’est pas forcément approprié. Le bouton “Start” du bureau de Windows renvoie vers le menu en mode tablette. Il faut aussi passer par des accélérateurs claviers non visibles (touche Windows – C puis Settings puis Power puis…) pour éteindre l’ordinateur quel que soit le mode (shutdown, sleep, hibernate) ! Microsoft fait ici la part belle à l’usage de Windows sur tablettes. Mais il ne faudra pas délaisser la grande majorité des utilisateurs de PC classiques. Microsoft est ainsi censé rétablir l’ancien “Start Menu” pour la version finale de Windows 8. Ajouter le mode tablette, OK. Mais dégrader le mode desktop, non !

Shutting down Windows 8

  • Quid de l’application store pour les applications Metro ? Sera-t-il un point de passage obligé pour installer des applications dans l’interface tablette ? Les développeurs attendent la réponse avec impatience.
  • Lors de la création du compte utilisateur, le setup de Windows 8 propose d’utiliser son compte Windows Live / Hotmail. Ce qui fait qu’on se logge ensuite dans Windows avec le même logon que dans les services de Windows Live. C’est une vision très “cloud” des choses, mais elle pourra susciter des réserves.
  • Comment Intel va réagir à la poussée des SoC à base ARM ? Dans une gymnastique diplomatique classique, Microsoft explique qu’Intel reste un partenaire de choix et que les plateformes Intel seront bien entendues supportées par Windows 8, y compris les Atom et ses successeurs. Intel va certainement faire des efforts pour améliorer l’autonomie de ses processeurs ce qui le fera revenir dans la course. Les processeurs de la série Haswell en technologie 22 nm et à transistors 3D Tri-gate sont prévus pour 2013 et donneront aux Ultrabooks du moment 24 heures d’autonomie. Comme l’indique Jean-Louis Gassée, cela pourrait rappeler le sort réservé aux architectures Alpha et Power PC initialement supportées par Windows NT puis abandonnées.

Cela fait pas mal d’inconnues à ce stade des courses. On pourra mieux se prononcer au fur et à mesure de l’avancée du développement de Windows 8, notamment avec sa bêta en fin d’année, avec l’arrivée de tablettes le supportant et aussi des premières applications associées.

Scénario de prospective

Nous sommes fin 2012 et Windows 8 est disponible après un cycle “preview-beta-RC-RTM-GA” d’un an (release candidate, release to manufacturing, et general availability dans le jargon Microsoft). Les constructeurs de PC lancent leurs Ultra Book et tablettes dessus. Dans le même temps, les constructeurs de moniteurs généralisent le support du multitouch. Et Apple a lancé depuis le début de l’année un iPad 3 encore plus fin et avec un écran ultra-haute résolution type Retina. Steve Jobs n’est peut-être plus de ce monde et a été béatifié comme grand bienfaiteur de l’humanité numérique. Mais son empreinte est toujours présente chez Apple qui n’a pas encore viré sa cutie en “Corporate America Classica”.

Contrairement aux smartphones, Android reste un peu à la peine pour concurrencer l’iPad qui bénéficie d’une base installée de plusieurs dizaines de millions d’unités et domine encore largement les ventes.

Les développeurs d’applications qui ont commencé à travailler pour Windows Phone 7 adaptent facilement leurs applications pour Windows 8. Les développeurs d’applications natives .NET et de sites web font de même. Mais leur nombre est encore faible au regard de ceux qui supportent iOS malgré les efforts d’évangélisation énormes que l’éditeur a lancé pendant plus de 12 mois. Le lancement de Windows 8 a en tout cas servi de bouclier à Microsoft : il contient le développement de l’usage d’iPad et de tablettes Android dans le segment professionnel.

La grande inconnue reste l’accueil du consommateur dans le grand public. Comme dans la bataille Mac vs PC, il se retrouve avec une alternative pour l’achat de tablettes. Alternative à trois… avec iPad, tablettes Android et tablettes Windows 8. Est-il si intéressé que cela par la compatibilité avec Windows ? Suspens ! Est-ce que la version livrée de Windows 8 sera dépourvue d’écueils gênants pour son utilisation confortable dans tous les cas de figure ? Cela demande à la fois de la patience et une petite étude de marché…

En tout cas, la bataille est ouverte pour permettre aux tablettes d’être le seul ordinateur que l’on embarque avec soi au lieu de cumuler une tablette et un micro-ordinateur. A ce jeu, Microsoft est plutôt bien préparé. Reste à voir si Apple va adopter un jour une approche similaire en fusionnant iPad et Macbook Air d’une manière ou d’une autre.

RRR

 
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