Decode Quantum avec Harold Ollivier d’Inria

Publié le 30 novembre 2022 - Commenter -
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Dans le 53ième épisode des entretiens Decode Quantum, Fanny Bouton et moi-même revenons au monde de l’informatique et du logiciel avec Harold Ollivier après l’avoir couvert il y a quelques semaines avec Alastair Abbott d’Inria Grenoble. Ces entretiens sont toujours également diffusés sur Frenchweb.

Harold Ollivier est chercheur en informatique quantique et directeur du quantique chez Inria. C’est là où il avait démarré en faisant sa thèse en 2001 après être passé par l’Ecole polytechnique. Dans le cadre de sa thèse, il a passé quelques années au laboratoire de Los Alamos du Département de l’énergie aux USA puis été post-doc au Perimeter Institute au Canada à Waterloo. Après un passage de quelques années à la DGE à Bercy, il a ensuite travaillé dans un fonds d’investissement dans les PME, lancé une startup dans le logiciel (Linksight) puis est revenu à ses premières amours de chercheur au CNRS LIP6 avant de rejoindre Inria. Autant dire que son parcours éclectique est plus qu’intéressant.

Points clés du podcast et liens

  • Comment est-il tombé dans le quantique ? La première personne qui lui a parlé de quantique était Philippe Grangier à l’Ecole Polytechnique. Puis il a fait un DEA de physique théorique et a ensuite choisi un stage un peu en lien avec l’industrie, ce qui l’a amené à creuser la notion d’information quantique. Il avait découvert les articles de Wojciech Zurek, entre autres créateur du théorème de non-clonage quantiuqe, ce qui l’a amené à faire son DEA dans le laboratoire de Los Alamos du Département de l’Energie US.
  • Le titre de sa thèse était Eléments de théorie de l’information quantique, décohérence et codes correcteurs d’erreurs, sous la direction de Pascale Charpin à l’Ecole Polytechnique, soutenue en 2004.
  • Il a intégré une équipe qui faisait des codes de correction d’erreur classiques chez Inria et y a travaillé sur des codes de correction d’erreur quantiques. A l’époque, les qubits à base de résonance magnétique nucléaire avaient le vent en poupe avec 10 qubits disponibles.
  • Ses recherches initiales, notamment sur la “quantum discord“. C’était son sujet de son stage de DEA et portait sur le caractère quantique des corrélations. Il s’agissait de développer une compréhension de la décohérence.
  • Le théorème de non-clonage est un condensé de propriétés du quantique. Il présente l’avantage de faire comprendre la différence entre la physique quantique et la physique quantique. Il provient de la linéarité de la physique quantique et est assez facile à démontrer. Mais ce n’est pas parce que l’on ne peut pas cloner qu’on ne peut rien faire. C’est une ressource utile comme dans la cryptographie. Et on peut tout de même copier de l’information quantique mais de manière imparfaite.
  • Qu’est-ce qui t’a initialement amené à quitter le monde de la recherche puis finalement à y revenir ? En 2007, le domaine s’est spécialisé. Et les progrès expérimentaux allaient prendre du temps. Il serait bien parti dans une startup mais à l’époque, ce n’était pas réaliste. Il n’y avait ni une technologie mature ni clients. Les choses ont beaucoup changé depuis. Les perspectives sont bien meilleures.
  • Comment et sur quoi y est-il revenu à la recherche, et au LIP6 ? Il connaissait Elham Kashefi du fait de son passage au Canada où elle avait réalisé son post-doctorat au même endroit que lui. Il a rencontré ensuite Elham en 2019 dans une conférence sur la place des femmes dans le quantique. Elham y faisait une intervention et l’avait cité. Elle lui a alors proposé de reprendre la recherche. Au LIP6, il travaille sur les protocoles de sécurisation de calculs qui vont jouer un rôle important. Cela porte sur la confiance entre acteurs du calcul quantique et est lié au “blind quantum computing” qu’Elham Kashefi a contribué à formaliser. Comment protéger les algorithmes et les données qu’ils utilisent dans le cloud et certifier aussi les réponses ? Et les protocoles qui peuvent être mis en œuvre avec des liens classiques entre serveurs et ordinateurs quantiques avec un gros overhead, ou avec un canal de communication quantique avec un client quantique léger ce qui est plus facile à mettre en œuvre. Ils travaillent avec l’Université de Delft pour tester ces protocoles sur de vrais machines.
  • Harold nous décrit les activités de recherche d’Inria dans le quantique. Comment Inria a-t-elle pris le virage du quantique ? Quelles ressources a-t-elle alloué au sujet ? Bruno Sportisse avait décidé de développer le quantique à Inria dès 2018. Le quantique y avait démarré en 2001 avec les codes de correcteurs d’erreur puis avec la correction d’erreurs autonome avec Mazyar Mirrahimi, menée en commun avec le laboratoire de physique de l’ENS et l’Ecole des Mines de Paris. Puis en 2018 est lancée l’équipe Loria à Nancy avec Simon Perdrix. Puis à Saclay, Grenoble et Lyon.
  • Il y avait un besoin de coordination sur l’ensemble de ce que l’Etat attendait d’Inria dans la stratégie nationale quantique. Cela portait sur les outils de financement comme le PEPR et les grands défis. Il est aussi devenu le point d’entrée pour déclencher des partenariats avec les entreprises pour faire en sorte que la recherche réponde à des besoins des entreprises et aussi à recaler les attentes. Il est en train de créer une équipe pour répondre à des besoins des entreprises pour regarder les algorithmes pour ordinateurs NISQ.
  • Quels sont les besoins d’Inria ? Des étudiants en thèse, des post-doctorants et des chercheurs à temps plein. En 3 ans, Inria a embauché 11 permanents dont 3 seniors.
  • Le PEPR (programmes et équipements prioritaires de recherche) joue un rôle important avec les autres outils de la stratégie nationale quantique dans cet afflux de ressources. Mais il y a aussi des appels à projets ANR habituels puis des projets européens, des projets du flagship comme NEASQC et d’autres projets autour du calcul quantique. Il y a beaucoup de financements qui vont sur le hardware ce qui est normal. Mais il y a toujours besoin d’une couche d’algorithmie autour du hardware. Ce sont des projets qui sont loin de leur base.
  • Quid de l’intérêt pour le calcul quantique analogique ? C’est plus compliqué pour l’informatique. Ce n’est pas évident car les repères et métriques sont différents. Ils cherchent aussi à comparer les ressources utilisées. On perd une grande partie de ces repères dans l’analogique. Le sujet théorique est différent mais très intéressant. Une grande partie des outils sont communs entre l’analogique et le digital dans le calcul quantique.
  • Les chercheurs font plus souvent attention à préciser les besoins côté matériels. Ils font de la simulation numérique pour mieux comprendre ce qui se passe et notamment tenir compte du bruit des calculateurs quantiques. Avec une dizaine de qubits, on arrive à comprendre ce qui se passe d’un point de vue pratique. Mais les besoins sont bien plus importants pour les applications industrielles pratiques, notamment en vitesse d’exécution des portes.
  • Quels sont les grands défis de recherche à relever dans les domaines couverts par Inria ? La question de la correction d’erreurs qui est mise en œuvre partout, notamment dans le calcul mais est gourmande en ressources. L’enjeu est de réduire la consommation de ressources. Code, architecture de contrôle, connectivité entre les qubits et les compilateurs. C’est ce sur quoi travaillent Anthony Leverrier et Maryar (sur les cat-qubits). Autre sujet de recherche : l’optimisation des circuits et les langages à Nancy avec Simon Perdrix et QUACS avec Benoit Valiron qui a créé le langage Quipper. Omar Fawzi travaille sur les théories de l’information en étant basé à Lyon. Puis les questions de quantum foundations avec Alastair Abbott à Grenoble.

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Publié le 30 novembre 2022 Post de | Actualités, Quantique | 6402 lectures

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Stéphanie dirige un laboratoire de conception intégrée de circuits électroniques du CEA-Leti qui travaille sur des systèmes sur puces intégrés, des interfaces de capteurs, des interfaces de contrôle de qubits et de la gestion intégrée de l'énergie. #recherche #quantique
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