Mon second #web2day à Nantes
Post de Olivier Ezratty du 20 juin 2011 - Tags : Entrepreneuriat,France,Google,Haut débit,Internet,Startups | 11 Comments
J’étais vendredi 17 juin 2011 à Nantes pour mon second “web2day”. C’est une sorte de mini-LeWeb local organisé par l’association d’entrepreneurs Atlantic 2.0. La conférence qui rassemblait au nez 150 personnes dans la salle (mais plus en tout, cf commentaire d’Adrien…) adoptait un format assez classique avec tables rondes thématiques et concours de startups. Il y avait notamment deux tables rondes très intéressantes, l’une sur la net neutralité et l’autre sur l’internationalisation des startups (avec notamment Patrice Lamothe de Pearltrees et Mickael Froger de Lengow). Et puis une autre sur l’open data, et enfin, une intervention de Chris Heilmann de la Mozilla Foundation sur HTML 5. Sans compter des séances de speed dating entre entrepreneurs et prestataires de services et un petit Hackathon ! Ce qui fait pas mal de choses en une journée !
Cet événement s’inscrit dans un l’écosystème entrepreneurial de Nantes qui est l’un des plus dynamiques de France. Il comprend un grand nombre des ingrédients incontournables : un lieu avec La Cantine, inaugurée début 2011 (ci-dessous), cette conférence annuelle web2day, mais aussi StartWest qui y a lieu une fois tous les deux ans en alternance avec Rennes, mais aussi l’association Atlantic 2.0, sorte de Silicon Sentier local qui gère La Cantine et aussi les événements comme le web2day, mais aussi les Startup Weekends comme celui de février 2011 auquel j’avais participé. Dans l’écosystème, il y a aussi l’enseignement supérieur avec écoles d’ingénieur, de commerce et de design, et enfin, des prestataires de services divers (communication, web agency, stratégie, financement). Le tout à deux heures de TGV de Paris, ce qui facilite le business lorsqu’il faut vendre “dans la capitale” !
Aller à Nantes, c’est aussi pour moi le plaisir d’avoir l’impression d’y connaitre autant de monde qu’à Paris et de rencontrer des visages bien connus comme Adrien Poggetti, Magali Olivier et Lucie Piriou (Atlantic 2.0), Quentin Adam et Clément Nivolle (CleverCloud), Guillaume Champeau et Bénédicte Carrio (Numerama), Jean-Yves Stervinou (devantlatélé.com), Vincent Rostaing (Lecairn), Mikael Froger et Elodie Vigneron (Lengow), Simon Robic, Etienne Billet ou Katell Le Scanff. Et tous ceux que j’oublie car je connais les visages mais pas forcément les noms ! Sans compter Thierry Ferey de Darqroom, une startup nantaise où j’ai publié les photos de la journée. Et puis vous trouverez les vidéos de ce web2day sur Ustream.
Neufs startups sur les starting blocks
A tout seigneur tout honneur, commençons par les startups qui pitchaient. Il se trouve de plus que je faisais partie d’un sympathique jury. J’étais donc parfaitement assidu pendant les présentations ! Nous allons commencer d’abord par les quatre projets sélectionnés par le jury (sur 9 !) :
Cinq autres projets étaient présentés qui n’ont donc pas retenu la faveur du jury, et je vais expliquer à la fois pourquoi et ce que les porteurs pourraient améliorer. Le feedback est peut-être dur, mais tout à fait bienveillant !
Un bon débat sur la Net Neutralité
Ce débat animé par Guillaume Champeau de Numerama regroupait trois des intervenants les plus vocaux de la “société civile” sur le sujet et qui font régulièrement face aux politiques et aux industriels : le rebelle des rebelles Jean-Michel Planche (Witbe), le ténébreux Benjamin Bayart (French Data Network) et le fougueux Jérémie Zimmermann (La Quadrature du Net, aussi connue pour sa lutte contre la HADOPI).
J’ai bien apprécié cette table ronde car elle faisait un survol de la question de la net neutralité en la vulgarisant très bien.
En positionnant les grands principes, le débat de la net neutralité étant souvent abordé par la négative. L’Internet est neutre s’il n’empêche rien. Il ne faut pas notamment que nous soyons exclu de la capacité à créer un grand de demain comme l’a été Skype. Il faut une une garantie d’accès et de publication sans discrimination des flux sauf dans des cas très encadrés. L’histoire de l’Internet qui a démarré sous des auspices très “peer to peer” (c’est le principe de l’hypertexte, et pas seulement du téléchargement en peer to peer) subit depuis quinze ans les coups politiques et économiques qui poussent à la centralisation. Cela amène des congestions et des risques de censure. Même si on n’a pas encore toute la presse écrite dans un seul journal, les Application Store gérés par des sociétés comme Apple qui décident de ce qui est publiable ou pas sont très dangereux. Ce sont des monopoles de régulation privés de l’Internet.
En rappelant les forces en présence : il y a un fort déficit de compréhension des enjeux, et beaucoup de lobbying des opérateurs télécoms et des équipementiers sans compter les acteurs économiques des contenus. Contrairement aux précédents, les mouvements citoyens n’ont que le bâton et pas de carottes. Ce sont les petits acteurs qui ont le plus besoin de la net neutralité pour se protéger et pouvoir émerger. C’est une question que l’on pourrait d’ailleurs se poser dans le cas des applications de la TV connectée, un domaine où la net neutralité est la plus remise en cause par les acteurs du status quo actuel !
En se méfiant des opérateurs télécoms. Ils instrumentalisent les peurs sur la “chute” de l’Internet qui est un vrai sujet dans le cadre de la mobilité mais pas sur l’Internet fixe. Selon les intervenants, il n’y aurait pas de risques de pénurie ou de saturation. Les évolutions techniques gèrent assez bien la capacité des réseaux. Les seuls cas de saturation identifiés dans le passé étaient liés à défauts d’investissement et de compétences des opérateurs ! Ce qui a changé est la concentration croissante du marché des télécoms dans le monde, Free étant un cas exceptionnel. Et les opérateurs comme France Télécom ont beau jeu de demander aux grands de l’Internet de financer leurs infrastructures alors qu’ils sont déjà très profitables. France Télécom a ainsi distribué 3,7Md€ (et non 7Md€ comme cités dans la table ronde) de dividendes pour sa dernière année fiscale !
En se méfiant aussi des anonymes qui menacent à leur façon la liberté d’expression, en attaquant par exemple le serveur personnel de Jean-Michel Planche après son fameux déjeuner à l’Elysée en décembre 2010. Résultat, il a du transférer son blog de son serveur vers un serveur hébergé, une chose qu’il voulait éviter pour échapper à toute forme de centralisation. Comme quoi il n’y a pas que les gouvernements qui menacent les libertés dans ce bas monde !
La position des grands acteurs de l’Internet tels quel Google a aussi été évoquée. Ils mènent un double jeu : ils ont besoin de la net neutralité pour prospérer mais ont aussi besoin de protéger leur position dominante et peuvent être intéressés par les règlementations qui rendraient la vie plus difficile aux nouveaux entrants. La question qui se pose est de savoir quelles règlementations mettre en place ou éviter face à ces “monopoles privés” qui gouvernent une grande partie de l’accès aux contenus du web (Google, Apple, Facebook, Twitter, etc). Là-dessus, je n’ai pas eu de réponses de Jérémie Zimmermann autre que de qualifier ma question de “truc de bisounours” (il parait qu’il fait cela à tous les coups…) et que Google avait un lobbying très puissant capable de tout.
La palme des bons mots revenait à l’analogie faite entre l’Internet “neutre” et le chocolat. Le chocolat est censé contenir des fèves de cacao. Mais la règlementation européenne permet de considérer comme “chocolat” des produits contenant des graisses de substitution au beurre de cacao (huile de palme ré-hydrogénée…). Par analogie, on en vient à ne plus savoir ce qu’est “l’Internet” et à consommer uniquement des “saveurs” d’Internet. D’ailleurs, les “gens” confondent facilement l’Internet et leur liaison ADSL, autant qu’ils assimilent l’Internet au web. Et puis, il y a ces offres ubuesques où l’on peut consommer de la vidéo sur mobile chez Orange mais uniquement celles qui proviennent des services d’Orange, tout comme ces abonnements mobiles qui intègrent Facebook et Twitter, mais pas la navigation libre sur Internet.
En attendant, tout ceci est très sérieusement discuté par nos élus et notamment dans un rapport intéressant produit en avril 2011 par deux députées, Corinne Erhel et Laure de La Raudière !
Bon, aller, si vous voulez en savoir plus, regardez la vidéo de cette table ronde ! Vous m’y verrez faire le guignol à prendre des photos des intervenants !
Et après ?
Mon prochain passage à Nantes ? Je ne sais pas trop. J’ai en tout cas battu un record avec cinq à six visites en 12 mois !
Lien du blog Opinions Libres : https://www.oezratty.net/wordpress
Lien de l'article : https://www.oezratty.net/wordpress/2011/mon-second-web2day-nantes/
Cliquez ici pour imprimer
(cc) Olivier Ezratty - http://www.oezratty.net