Opinions Libres - Le Blog d'Olivier Ezratty

Enseignements du Concours 2009 des (blabla) Entreprises Innovantes

Post de Olivier Ezratty du 28 juin 2009 - Tags : Entrepreneuriat,Innovation,Startups | 19 Comments

Le jeudi 25 juin 2009 avait lieu la publication du palmarès du Concours National d’Aide à la Création d’Entreprises Innovantes 2009.

L’annonce a été assez discrète avec peu de retours presse, arrivés tout du moins dans mon lecteur RSS. Il faut dire que ce concours est maintenant une routine annuelle bien huilée. Cette année, il y avait 171 lauréats pour 1161 dossiers reçus. En 2008, il y avait eu 170 lauréats pour 1174 dossiers reçus. Un nombre de candidats étonnamment stable qui doit s’expliquer par le nombre sous-jacent de laboratoires et autres incubateurs qui encouragent leurs poulains à concourir.

Le dossier de presse de cette édition du concours fait état de diverses données intéressantes :

  • 60% des lauréats proviennent de la recherche. 53% des lauréats (qui sont des individus et pas des sociétés) sont Docteurs – 55% en 2008. Et 27% des ingénieurs pour 23% en 2008. Facilement explicable : le concours sert surtout à encourager les chercheurs à créer des entreprises. Mais comme les % ne sont pas indiqués pour les candidats, impossible de savoir s’il y a un biais dans la sélection des projets dans un sens ou dans un autre.
  • Il y a deux catégories dans le concours : les projets dits en “émergence”, qui en sont au stade d’une étude de faisabilité, avec 97 élus recevant en moyenne 30K€ de subvention qui couvre jusqu’à 70% de travaux de maturation du projet et de preuve de concept. Et puis, les projets en “création-développement”, au nombre de 74, qui reçoivent en moyenne 229K€ de subvention, couvrant 50% de leurs dépenses de R&D, et étalée sur deux années.  Ce qui fait un total d’environ 20m€, hors frais de gestion.
  • Les TIC représentent 30% des élus, et l’électronique/traitement du signal/télécom en représente 12% (vs 34% et 14% en 2008). Avec 15 élus TIC en Ile de France. Cela donne une chance de réussite pour les centaines de projets pouvant potentiellement concourir dans la région. Je connais quelques uns des gagnants dans la liste, croisés à différents endroits. Au moins l’un d’entre eux n’a pas en propre la technologie qu’il présente. Un autre n’a pas de vrai modèle économique. Un troisième a déjà effectué la plupart des développements logiciels de son projet. Bon bon.
  • Le taux de survie des entreprises issues du concours depuis 1999 est de 77%. Comme il y a plein de méthodes différentes de calcul de ce taux (nombre d’années d’ancienneté de référence, etc), cela ne veut pas dire grand chose. Mais en comparant ce chiffre avec des données équivalentes d’autres organisations (incubateurs, prêts d’honneur, etc), il n’a rien d’extraordinaire car chez eux, les taux de survie sont souvent supérieurs à 90% à 5 ans. Dans l’informatique, par exemple, nombre de startups peuvent survivre en se transformant en simples sociétés de service. C’est un mode de survie modeste qui fausse les statistiques.
  • Le dossier de presse du concours et en avant les “emplois créés grâce au concours”. Et plus les sociétés sont anciennes, plus grands sont leur chiffre d’affaires et leur nombre d’emplois créés. Mais comparativement à quoi… ? . Heu heu. Ce sont les entrepreneurs et les clients qui créent des emplois. Les subventions ne sont que des dopants, parfois toxiques. Certaines boites passent plus de temps à chercher des subventions que des clients. Et elles créent à la fin moins d’emploi que celles qui ont des clients ! Mais les lauréats bénéficient d’un coaching business de la part d’HEC Startup et de l’EM Lyon. C’est le plus “compétences” louable du concours.

Palmares 2009 Concours National Entreprises Technologies Innovantes

Les lauréats

Dans le numérique, il y a un peu de tout. De la sécurité (avec notamment un projet de navigateur web qui tourne dans une machine virtuelle), un peu d’IPTV et de production de vidéo ou de cinéma en synthèse animée, du développement logiciel, de la représentation graphique de données, des logiciels autour des jeux, de la 3D et de la simulation, de l’affichage tridimensionnel sur un cube transparent, de la gestion de publicité et des applications pour le commerce en ligne comme en magasin, de la téléprésence, de la robotique. Difficile de cerner une tendance particulière, genre “cette année, le jury a privilégié tel type de projet”.

C’est cependant du côté des greentechs que je me suis le plus penché. Ce sujet n’a pas sa catégorie à part dans le concours ce qui est bien dommage. Il est dommage qu’une ambition associée ne soit pas affichée dans le cadre de ce concours. On trouve cependant quelques projets greentechs dans les lauréats du concours 2009 :

  • Cinq projets d’énergie éolienne, le plus souvent pour de l’équipement urbain. Certains m’ont l’air bien fumeux…
  • Trois projets autour du photovoltaïques dont un projet de création de tuiles de toit photovolaïques et un autre qui se propose d’améliorer le processus de fabrication des cellules PV en CIGS.
  • De la production de carburant à partir des algues (pas la première initiative du genre).
  • Un système de chauffage à base de moteur Stirling (assez courant).
  • De l’éclairage technique à base de LED de grande puissance.
  • De la climatisation à base d’eau de mer froide, utilisable notamment dans les DOM-TOM.
  • Un système de captage de l’énergie des vagues, qui nécessitera sans doute beaucoup de capitaux pour voir le jour.
  • De la production de briques en terre crue compressée pour la construction d’habitat.
  • Des systèmes de détection de polluants divers.

Il y a aussi une catégorie santé et biotechs très bien représentée dans les lauréats et c’est d’ailleurs plutôt dans cette catégorie que les projets lauréats semblent faire avancer l’état de l’art de leur discipline.

Le processus de sélection

Les projets en phase “émergence” sont sélectionnés par des jurys régionaux, les candidatures étant à déposer auprès de la représentation Oséo locale. Il y avait 97 lauréats dans cette catégorie. Les jurys semblent composés de membres des Directions Régionales d’Oséo, d’un incubateur local et de la Direction Régionale à la Recherche et à la Technologie, les représentations du Ministère de la Recherche dans les régions.

Les projets en phase “création-développement” sont présélectionnés par ces mêmes jurys régionaux et un jury national effectue la sélection à partir de cette présélection. Il en conserve environ les deux tiers (74 sur 129 en 2009). Le jury est assez hétéroclite est composé d’un tiers de représentants de laboratoires publics (souvent, leurs responsables du transfert de technologie), d’un tiers de représentants d’entreprises publiques ou pas, et le reste avec des investisseurs divers (AFIC, VC, etc), quelques incubateurs et structures d’accompagnement et deux écoles de commerce impliquées dans le coaching business des projets lauréats (HEC et l’EM Lyon). Il serait intéressant d’y ajouter des représentation de startups sous une forme ou une autre.

Bref, un processus quelque peu alambiqué. En tout état de cause, une bonne relation avec votre chargé d’affaire Oséo et votre incubateur local doit aider à gagner des points dans le processus de sélection !

Si vous n’avez pas gagné…

Si vous avez concouru et perdu (ou pas, d’ailleurs…), vous pouvez retenter votre coup avec l’appel à projet Serious gaming / Web 2.0. Vous avez jusqu’au 6 juillet 2009 pour déposer votre dossier ! Sachant que rien que sur ces deux sujets, un montant équivalent à tout le concours national a été alloué (re-20m€ de subventions), avec l’idée de subventionner des projets dans des enveloppes supérieures à celle du concours national phase “création-développement”. Mais mon petit doigt m’indique tout de même que les chances d’obtenir quelque chose devraient être plus grandes ici que dans le Concours National. Pour les projets Internet bien entendu…

Bref, la chasse aux subventions est ouverte en permanence !

Même si ce système parait utile au premier abord, je me demande si son foisonnement actuel n’est pas une trop grande source de distraction pour les entrepreneurs. Surtout avec la démultipliée qui serait introduite par l’emprunt que lance le gouvernement et qui pourrait augmenter la manne qui finance les pôles de compétitivité, dont l’efficacité reste à démontrer.

RRR

 
S
S
S
S
S
S
S
img
img
img


Lien du blog Opinions Libres : https://www.oezratty.net/wordpress

Lien de l'article : https://www.oezratty.net/wordpress/2009/enseignements-du-concours-2009-des-blabla-entreprises-innovantes/

(cc) Olivier Ezratty - http://www.oezratty.net