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Point sur les propositions pour les Assises

Post de Olivier Ezratty du 25 juin 2008 - Tags : Actualités,Economie,Enseignement supérieur,Entrepreneuriat,Innovation,Internet,Logiciels,Politique,Startups,Technologie | 8 Comments

Depuis la publication d’un ensemble de propositions pour encourager l’entrepreneuriat et faire réussir les startups en France, j’ai obtenu des feedbacks divers qui ont été intégrés pour l’essentiel dans le plan.

D’autres vont arriver ! Et le temps presse car l’équipe d’Eric Besson va relever les compteurs des propositions début juillet !

Pour à la fois reconnaître les contributions directes et les faire resortir, je me suis dit qu’il était utile de les mettre en évidence. Alors voici certains des éléments que j’ai reçus par mail ou en mode révision du document et qui méritent d’être relayés :

Pierre Kociusco-Morizet (Vice-Président de l’IE-Club et PDG de Price Minister)

Simplifier les aides à la création d’entreprise : la création est simple, mais les aides s’empilent et créent un maquis bien dense pour l’entrepreneur.

Travailler à une harmonisation européenne, à la fois en terme de droit du travail, de fiscalité, etc. Et surtout, ne plus réfléchir en franco-français, mais au moins en européen !

Considérer l’accès à Internet et globalement aux technologies de l’information comme une priorité nationale, et mettre les moyens qui vont avec.

Séverine Smajda (association Cyber-Elles)

il me semblerait utile d’avoir quelques explications sur ce que c’est qu’entreprendre et comment s’y prendre lorsque l’on est au collège ou au lycée. L’initiative de 100 000 entrepreneurs est très intéressante et il faudrait la généraliser à mon sens. Certaines initiatives individuelles sont prises au niveau des collèges et j’ai pu y participer. C’est étonnant comme des jeunes de 14 /15 ans peuvent avoir envie d’entreprendre ! Avant que les enseignants ou le système éducatif ne les en découragent, il est important de leur donner des exemples et surtout de leur expliquer comment s’y préparer au mieux.

Hervé Lebret (auteur de "Start-ups", professeur à l’Ecole Polytechnique de Lausanne)

Un point me semble-t-il oublié : les américains ont une éducation pratique, itérative, le « trail and error ». Cet aspect là donne confiance, apprend à vivre avec l’incertitude. On parle d’éducation dès le plus jeune âge.

Encourager les échanges avec les régions et individus qui ont l’expérience. AnnaLee Saxenian a bien montré dans « The New Argonauts » qu’une culture de pionnier est essentielle à l’innovation. Taiwan, Israël, puis l’Inde et la Chine ont sur envoyer leurs éléments prometteurs dans des régions entrepreneuriales (au risque de les perdre…) pour mieux les récupérer plus tard. Grâce à cette génération, (il ne s’agit pas que d’invidus isolés), une culture entrepreneuriale en high-tech a pu s’établir localement. J’aime beaucoup l’analogie au sport de haute compétition : la migration des stars a sans doute conduit à l’augmentation du niveau national de haut niveau, et une entrepreneur de start-up, c’est un sportif de haut niveau…

(à propos de la réforme des grands Corps de l’Etat) Salutaire sans doute mais peut-être trop irréaliste et donc pas crédible. Il faut donner envie, pas nécessairement faire peur.

La grande question est de savoir si un état peut aider à l’innovation. J’aurai tendance à penser que parier sur une qualité en amont (éducation, recherche) aurai plus d’impact à la condition que le monde économique prenne le relais de l’innovation. Je ne suis pas sûr d’avoir jamais vu une agence étatique d’innovation bien efficace.

Jérémie Fain (Emerald Vision)

Un entrepreneur entaché d’une liquidation de société aura beaucoup de mal à trouver une nouvelle banque pour monter une autre société, ou même à être administrateur d’une société tierce : bien au-delà des valeurs, il y a une perception négative quasi-institutionnelle de l’échec.

(L’acceptation de la valeur de l’argent) relève de l’Education Nationale aussi, et plus profondément de la vieille conception balsacienne selon laquelle derrière chaque fortune se cacherait un crime. Difficile de faire bouger cela autrement qu’en starifiant l’entrepreneur, mais là, on risque de revenir aux années Tapie. 

(au sujet de la motivation des étudiants pour entreprendre) Je pense qu’il s’agit plutôt d’un manque de conditionnement des étudiants par les corps professoraux. Pour ces derniers, un bon élève est un étudiant qui rejoindra une grosse boite ou le CNRS. Certains professeurs d’écoles d’ingénieurs n’hésitent pas à faire des remarques à leurs étudiants du genre « c’est une présentation digne d’un marketeux d’HEC » et la même chose serait valable à HEC (quand bien même, grâce aux admissions passerelles, il y a beaucoup plus d’ingénieurs dans les classes) : on n’apprend pas aux profils gestionnaires et aux profils techniques à travailler ensemble.

Il ne s’agit pas à mon sens d’assister les étudiants dans leur quête d’entreprendre. Tout le monde peut financer par du service la création de son entreprise. Bill Gates et Paul Allen, ou plus récemment Mark Zuckerberg, n’ont jamais eu d’OSEO ou de concours du Ministère de la Recherche pour financer les débuts de Microsoft ou Facebook! Une solution : favoriser la création d’entreprises par des étudiants pendant les études.

Un mot sur les grands comptes français  : personne n’y prend de décision. C’est assez atterrant, mais c’est une réalité : les circuits décisionnels sont politiques, opaques et obscurs de l’extérieur. Ce qui explique en partie pourquoi le tissu de PME français est aussi fragile en comparaison de nos voisins allemands ou même italiens.

A noter que suite aux affaires Vinci et Airbus (stock options des dirigeants), les BCE sont taxés comme du revenu et non plus comme du capital. Ce qui est un élément bloquant dans le recrutement pour les startups.

La quasi-absence de capital-risqueur à même d’être capable de financer des projets « sur plans ». L’Etat n’y peut pas grand-chose, à part faire signe à la CDC, principale pourvoyeuse institutionnelle des fonds de capital-risque, de privilégier ce genre d’investissements.

Youen Chéné (de "Your Software 276", une SSII de Rouen)

(au sujet du besoin de Bourses plus importantes pour les étudiants) Particulièrement vrai pour les écoles et universités en région parisienne où le prix du logement est prohibitif. Mais faux pour les villes de provinces où les bourses sont le plus souvent suffisantes (sauf pour la caution et le premier mois de loyer avant que les bourses n’arrivent). J’ai été boursier et en école d’ingénieur publique. En même temps, sur Paris je n’ai jamais fait autant de petit boulots (avec la Junior Entreprise) qui m’ont beaucoup servi pour le début de ma carrière professionnelle. Je pense que c’est plus un problème d’ambition, de connaissance de l’enseignement supérieur (qui est très souvent très partiellement connu par les lycéens) et de pessimisme ambiant.

(au sujet des aides Oseo) Si on souhaite exporter un service web au plus tôt, c’est d’investissements marketing et commerciaux que l’on a besoin.

La simplification du système fiscal et même la suppression de L’ISF permettraient une meilleur récompense du risque.

Jean-Eudes Queffelec qui souhaite rajouter quelques propositions :

Maitrise de l’anglais: c‘est tellement évident qu’on oublie encore de le mentionner et pourtant la situation ne s’améliore guere; comment etre bon a l’export sans maitriser l’anglais. Je vois en ce moment l’engouement pour le chinois dans les ecoles secondaires, mais on oublie que l’anglais est la langue du business même en Chine!! typiquement français ! C’est encore plus crucial pour les PME qui n’ont pas les structures des grands groupes. Des bons métriques à mettre en avant sur ce thème et a surveiller sur 5 à 10 ans : % de francais qui obtiennent un diplome type MBA ou qui passent plus de 12 mois consécutifs a l’étranger en étude sup ou en emploi, % des francais dans les grandes universités mondiales (classement de Shanghai ?), % de francais qui passent le bac international.

Priorisation des industries TIC: pourquoi ne pas mettre en valeur certaines industries des TIC: logiciel, internet, jeux, graphisme, mobile qui sont plus propices aux start-ups (moins de capitaux; time to market plus courts, mieux adapté aux formations et mentalités francaises).

Objectifs: pages 28, les objectifs sont plus des indicateurs qui permettent de faire un tableau de bord de la progression du plan. Il faudrait des  objectifs "supra économiques" qui chapeauteraient ceux qui sont proposés et qui montrent la corrélation entre l’augmentation des PME et des start-up  et le % de croissance de PIB obtenu (le seul métrique économique qui mets d’accord tous les politiques) ou l’augmentation de la part de marché des entreprises francaises dans le marché mondial des TICs. Par exemple, pour le logiciel : quelle est la part des entreprises françaises dans le marché mondial du logiciel (édition et services): 3 ou 4% ? Si on augmente cette part de quelques points (ce qui peut se faire que quasiment en investissant dans les PMEs , start-up), le gain correspondrait j’en suis sur à quelques points de PIB et des milliers de job en plus.

Sur la forme du document : il faut absolument le limiter à 20 pages maximum car sinon tu va perdre tout tes lecteurs. Tu pourras faire une version complète pour les inconditionnels et passionnés du sujet ! Executive summary : 2 ou 3 pages maximum, à bien travailler aussi. Idem pour les pistes qui devraient plutôt être des propositions, c’est un terme plus fort et qui sonne plus concret. Il faut les limiter à 10 max et en avoir 1 ou 2 phares qui puissent être l’étendard du document dans son ensemble. Une fois finalisé, tu devrais proposer le document à signature ‘electronique’ à la communauté de ton blog et même au dela, ce qui apporterai encore plus de poids a la démarche. Titre: quelque chose de plus accrocheur a mettre en exergue et garde ton titre actuel en sous titre. Pour le Titre, il faudrait quelque chose qui puisse être repris en slogan ou programme politique : du genre 5 propositions pour 5% de croissance du PIB.

S’il s’agit d’un document pour alimenter les politiques, je mettrai personnellement le turbo sur les incitations fiscales. Même si c’est jamais très sexy, c’est ce qui est le plus efficace car malheureusement c’est un des seuls véritables leviers actionnables des politiques.

Il me faut maintenant intégrer ces dernières propositions dans le plan.

Et cet après-midi, on remet cela, dans le cadre de l’atelier sur les startups organisé à Rouen par Olivier Martineau de l’Exchangeur PME. On va y "cruncher" les propositions et cela devrait générer quelque chose d’intéressant. Et cela sera filmé.

Stay tuned et continuez de commenter le plan, sous forme de révision du document ou bien sous forme de commentaires sur ce blog (dans ce post ou dans celui de la publication du plan) !

RRR

 
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