La dérive des exponentielles 3/3

Publié le 10 avril 2015 et mis à jour le 26 avril 2015 - 2 commentaires -
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Je termine ici une série démarrée au sujet du phénomène des exponentielles de progrès technologiques que j’avais illustré pour commercer par les progrès dans les semiconducteurs et le solaire photovoltaïque.

L’idée était de démontrer que les progrès ne sont pas toujours “linéairement exponentiels” (au sens, courbe toute lisse, ou log(exponentielle) = droite) et que les belles exponentielles subissaient des à-coups à la hausse comme à la baisse. Nous allons terminer cela en traitant du séquençage de l’ADN. Puis en tirerons quelques conséquences génériques et aussi pour le monde entrepreneurial.

Séquençage de l’ADN

Ce troisième sujet donne lieu à de belles exponentielles liées au coût du séquençage du génome humain. J’avais eu l’occasion de traiter du sujet du séquençage et de ses applications dans une série de sept articles publiée pendant l’été 2012 : Les technologies de séquençage de l’ADN humain. A l’époque, on prédisait que l’on atteindrait rapidement un coût de séquençage inférieur à $100. Or, les progrès se sont quasiment arrêtés au moment où j’écrivais ces articles. Je n’y suis évidemment pour rien ! C’est un bon rappel qu’une corrélation ne vaut pas causalité. Essayons donc de comprendre les raisons de ce coup d’arrêt et ce qui pourrait relancer la baisse de coût du séquençage.

C’est un coup d’arrêt d’autant plus surprenant qu’il fait suite à une courbe “quadri-exponentielle” d’accélération du progrès démarrée vers 2006 lorsque la méthode traditionnelle de Sanger a été abandonnée. C’est la méthode qui avait été utilisée pour séquencer laborieusement pour la première fois le génome humain en entier. Ce séquençage a été terminé en 2000/2001 et à coup de centaine de million de dollars.

On observe ici un double phénomène de hoquet lié d’un côté à une forte rupture technologique puis à la difficulté de mise au point des nouvelles méthodes de séquençage. La génération 1 était en vigueur entre les années 1970 et le début des années 2000. La seconde correspond à la période 2007-2015 et est associée à une première phase d’accélération du séquençage. Le séquençage de troisième génération s’appuie sur différentes méthodes accélérant le procédé et réduisant son coût radicalement. Il exploite souvent l’analyse de “brins longs” d’ADN, comme dans la technique des nanopores, et ne nécessite pas leur réplication par PCR (polymerase chain reaction, une réaction chimique qui démultiplie l’ADN d’un échantillon). Elle permet de séquencer des brins plus longs et de simplifier le traitement numérique de reconstitution du puzzle généré par les brins d’ADN séquencés.

Flatley Law

On peut se poser au passage la question du poids relatif du séquençage et du traitement numérique des données issues du séquençage. Il semble qu’il représente actuellement environ 20% du coût actuel du séquençage. Plus les brins séquencés sont longs, plus le puzzle de l’ADN est facile à reconstituer. Il existe aussi de nombreuses variables techniques dans le séquençage qui affectent le taux d’erreur généré. Qu’il s’agisse de la multiplication des brins d’ADN générée par la PCR, utilisée dans le séquençage de seconde génération ou des erreurs de lecture dans quelque technologie que ce soit.

DNA Sequencing Cost Split

Des startups comme Edico Genome, créée en 2013, proposent des processeurs qui accélèrent d’un facteur 50 la vitesse du traitement numérique du séquençage. Leur “Bio-IT Processor Dragen” est commercialisé sous la forme de cartes PC à la norme PCI. Qualcomm a investi $10M dans cette startup en 2014. C’est une des nombreuses innovations dans le domaine du traitement des données du séquençage, d’autres nombreuses relevant du big data et d’offres en cloud.

Dragen Bio-IT Processor

Le séquençage de troisième génération idéal est celui qui permet de traiter sans réplication préalable (PCR), en parallèle, très rapidement et sans (trop d’) erreurs des brins longs d’ADN. On en est encore loin. Les nouvelles technologies pêchent souvent dans l’une de ces dimensions.

Notons au passage la confusion sémantique fréquente entre génotypage et séquençage de l’ADN qui sont deux techniques différentes. Elle est bien expliquée sur le site de 23andme.

Le génotypage est au point et coûte de moins en moins cher. Il consiste à détecter des SNP (Single Nucleotid Polymorphisms) dans l’ADN pour identifier des variations dans les gènes connus par rapport à une cartographie de référence. Les systèmes actuels de génotypage comme le Illumina HumanOmniExpress qui est utilisé par la startup américaine 23andme sont capables de détecter de quelques milliers à deux millions de SNPs selon le taux de couverture du génome proposé. L’ADN humain comporterait environ 50 000 gènes dont les deux tiers seraient bien identifiés. On peut détecter des pathologies ou des risques pathologiques (Alzheimer, diabète type 2, certains cancers, etc) avec cette méthode. Elle est aussi utilisée dans la police scientifique. Ou, c’est d’actualité, pour identifier les victimes d’un accident d’avion comme ceux de l’A320 de Germanwings.

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Machine "portable" de génotypage de NEC vue au CEATEC de Tokyo en octobre 2013.

Le génotypage peut être effectué assez rapidement avec des machines qui tiennent maintenant dans une valise. J’en avais vu une au CEATEC de Tokyo en octobre 2013 chez NEC. Le génotypage est exploité par les sociétés telles que 23andme, présentée souvent comme une filiale de Google, ce qu’elle n’est pas. C’est une société créée par Anne Wojcicki, l’ancienne femme de Sergei Brin et qui a Google Ventures comme actionnaire tout comme Genentech, un des pionniers du séquençage. Pour réaliser un génotypage, 23andme envoie un système de prélèvement de salive au client, qui le renvoie et reçoit en retour une génotypie permettant d’identifier ses origines raciales et géographiques, faire des rapprochements avec des parents ou cousins (avec des effet inattendus, genre “je suis ton père”, ou “tu n’es pas mon père”…) et identifier des risques pathologiques transmissibles génétiquement. Le tout pour un prix de vente de $100. Cela aboutit, potentiellement, à permettre de faire ce que l’on appelle de la médecine préventive. Par exemple, si un gène d’une maladie chronique comme le diabète type 2 est détecté, il sera recommandé à l’individu d’éviter de développer des comportements à risque au niveau alimentaire ou du manque d’activité physique. Il en sera de même pour certaines pathologies cardio-vasculaires. La médecine préventive actuelle relève surtout de l’adaptation des comportements pour limiter les risques exogènes d’apparition des pathologies d’origine génétique.

Le séquençage de l’ADN est plus lourd et plus complexe. Au lieu de détecter des variations sur quelques milliers de gènes dans des zones bien identifiées de l’ADN avec des marqueurs ciblés, il s’agit de séquencer une partie ou l’intégralité des trois milliards de bases réparties dans les 22 chromosomes de nos cellules. Les méthodes de séquençage qui requièrent la PCR nécessitent de capter entre 10 et 30 fois ce nombre de bases pour reconstituer le puzzle de l’ADN. Il faut donc récupérer 30 et 90 milliards de base, ce qui est bien plus lourd que quelques milliers de SNP. On peut aussi réaliser du séquençage focalisé sur un gène pour identifier des variations non standards que le génotypage ne permet pas de détecter.

J’avais listé les nouvelles techniques de séquençage dans le quatrième article de ma série en 2012. Depuis trois ans, les noms des acteurs en lice sont toujours à peu près les mêmes. Certains ont disparu et quelques fusions/acquisitions ont eu lieu. Des technologies ont été abandonnées comme celle de 454, acquise par Roche en 2004.

L’état de l’art a peu progressé. Un peu comme pour le changement de génération de technologie d’intégration de semi-conducteurs, la mise au point de ces procédés est très difficile, lente et itérative.

Illumina ($1,8B de CA) détiendrait environ 70% du marché du séquençage de l’ADN, issu notamment de l’acquisition de Solexan 2007. Juste derrière se trouve un autre grand groupe, Thermo Fisher Scientific ($17B de CA) qui a acquis Life Technologies en 2014, qui avait lui-même acquis le prometteur Ion Torrent en 2010. A ce jour, Illumina propose – entre autres – son séquenceur HiSeqX 10 capable de traiter un ADN humain complet pour moins de $1000. Ils s’appuient pour ce faire sur la parallélisation de 10 unités de traitement pour générer des économies d’échelle (ci-dessous). La technologie de Ion Torrent a l’air délaissée.

Illumina HiseqX Ten

Il semblerait que le coût total du séquençage complet de l’ADN humain soit plus important, et de l’ordre de $3000. Il est aussi contingenté par le coût des consommables, contrôlé par les industriels cités. Ils cherchent évidemment à faire perdurer une belle source de revenu récurrent.

Le marché du séquençage est aujourd’hui surtout focalisé sur la recherche. Il n’existe pas d’équivalent de 23andme qui proposerait au grand public le séquençage individualisé de son ADN. Et pour cause, en l’état de l’art actuel, cela ne servirait pas à grand chose par rapport à un génotypage !

La recherche se focalise sur divers sortes de séquences d’ADN : l’ADN humain complet, uniquement l’exome (la partie des chromosomes qui est utilisée pour la création des protéines par l’expression des gènes et qui représente 1,5% des bases des chromosomes), le transcriptome (les ARN issues de la transcription du génome), le bactérome (nos bactéries, notamment intestinales ou cutanées) ainsi que l’ADN de toutes sortes d’espèces vivantes animales et végétales. L’un des grands défis des spécialistes est de comprendre le rôle des séquences dites non codantes (98,5%) de l’ADN ainsi que de protéines clés comme l’histone, autour de laquelle l’ADN s’enroule à certains endroits et pas d’autres, permettant ou pas l’expression des gènes.

La majorité des chercheurs qui utilisent le séquençage se focalisent sur des parties bien spécifiques de l’ADN. Derrière le séquençage, il reste à comprendre la mécanique de l’expression des gènes qui est très complexe et l’influence de paramètres externes aux gènes, que l’on intègre dans ce que l’on appelle l’épigénétique.

Tout cela doit mener à la création de thérapies géniques, personnalisées ou pas, qui ne progressent pas au même rythme que la baisse des coûts du séquençage car la modification des gènes est très délicate à mener. C’est notamment le cas pour le gène DMD dont l’altération provoque les dystrophies musculaires comme la maladie de Duchenne. Le gène DMD comprend 2,4 millions de bases. Il comprend une séquence codante de 14 000 bases qui est saupoudrée dans 79 parties disjointes de l’ADN qu’on appelle les exons. Autant dire que la réparation d’un gène DMD défectueux n’est pas simple ! Sans compter son implantation ensuite dans les muscles des patients.

Nanopores

Dans les technologies de séquençage prometteuses, il faut compter avec les nanopores et en particulier avec Oxford Nanopore et son MiniIon qui tient en théorie dans la main (ci-dessous). La technique fait passer un demi brin d’ADN dans un nano-tube et chaque base est détectée à sa sortie par une électrode en graphène. A noter d’ailleurs qu’Illumina était dans son capital et en est sorti en 2014.

Nanopore (2)

J’ai essayé de consolider dans un tableau l’état des startups et grandes entreprises impliquées dans le matériel de séquençage de l’ADN. Rares sont les startups qui sont restées indépendantes et à même de commercialiser leur technologies. La plupart sont encore au stade du laboratoire ou de l’expérimentation (en orange). Seuls les grands groupes comme Illumina ou Thermo Fisher Scientific à même de commercialiser en volume les solutions, souvent issues d’acquisitions réalisées plusieurs années avant. Il y a eu évidemment un peu de casse avec trois sociétés qui ont fermé boutique. La technologie de l’une des trois, Helicos, a été acquise à bon compte par SeqLL, une nouvelle startup créée pour l’occasion. On constate, de manière empirique, que les startups qui ont réussi à commercialiser leur technologie ont levé des montants plutôt élevés, comme Bionano Genomics ($102m) et Oxford Nanopore ($270m). Il n’est pas étonnant dans ce contexte de ne trouver aucune startup française. Mais les difficultés à trouver du financement n’en sont pas la seule raison comme je l’avais détaillé en 2012.

DNA Sequencing Technologies

En tout, ce tableau consolide $858m d’investissements dans le séquençage. Il faudrait y ajouter les investissements en R&D des grands acteurs, difficiles à pister. C’est à comparer à un total de $2,5B sur les medical devices investis sur 10 ans qui sont recensés dans la Crunchbase. Soit environ 40% du total, ce qui n’est pas négligeable. Mais les medical devices représentent eux-même seulement 5,8% des investissements dans l’ensemble des secteurs de la santé sur la même période. Dans les services de santé, on va retrouver les sociétés telles que 23andMe ou le franco-américain Portable Genomics, installé à San Diego, qui proposent des services de génotypage (pour le premier) et d’analyse des données de séquençage (pour le second).

Healthcare investment Crunchbase

Le grand thème à la mode dans la e-santé est la médecine préventive. Certains anticipent que le séquençage complet de l’ADN humain permettra à terme de créer de nouvelles pratiques de médecine préventive. On connaîtra à l’avance les risques pathologiques de chaque individu. Les médecins pourront alors préconiser des pratiques ou thérapies préventives. Aujourd’hui, la plupart de ces préconisations sont liées au mode de vie (activité physique, poids, alimentation). En fait, on peut déjà faire tout cela avec du génotypage à $100. On n’a pas besoin d’attendre l’avènement du séquençage complet à ce prix-là.

Les plus grand progrès proviendront cependant des thérapies géniques personnalisées qui permettront de réparer les gènes défectueux et sur mesure. Vu l’état de l’art, on en est encore assez loin.

En résumé, en matière de séquençage de l’ADN, nous avons ici une exponentielle plutôt chaotique :

  • Ce qui ralentit l’exponentielle : les nombreuses difficultés de mise au point du séquençage rapide et dans une certaine mesure, la dominance du marché par un acteur qui en capte 70% (Illumina) et leur business de consommables. Enfin, les domaines d’applications du séquençage complet de l’ADN sont pour l’instant limités à la recherche.
  • Ce qui pourrait accélérer l’exponentielle : la fin de la mise au point de certaines des nouvelles techniques de séquençage de troisième génération, l’accélération de l’exponentielle dans le calcul, notamment avec les ordinateurs quantiques dont les applications au séquençage de l’ADN semblent importantes, la mise en place d’usages concrets de médecine individualisée préventive basée sur le séquençage, ce dont on est encore loin aujourd’hui et les progrès dans les thérapies géniques personnalisées sur les maladies rares comme communes.

Cela rappelle un point clé de la discussion sur les trois études de cas de cette série d’articles : les exponentielles de progrès technologiques sont liés à plusieurs facteurs dont l’équilibre est très différent selon les thématiques et aussi la maturité des technologies. Les exponentielles sont générées par le progrès technologique en soi, puis par les techniques de production en volume puis par des considérations économiques voire sociétales. L’élément déterminant de développement d’une exponentielle de progrès est l’application grand public de la technologie. Le moteur du développement des semi-conducteurs est lié aux usages généralisés du numérique. Cela a commencé avec les ordinateurs personnels, puis la dualité mobiles et serveurs, et enfin, aujourd’hui, sur les objets connectés.

Ces trois études de cas sont très différentes !

L’accélération technologie reste très forte dans les semiconducteurs et avec beaucoup de “mou sous la pédale”, notamment du fait des usages généralisés du numérique et de l’immense marché grand public qui tire le marché vers le haut. Plusieurs technologies de rupture sont identifiées qui feront faire des bonds significatifs à la puissance des processeurs. Et ce des bonds architecturaux déjà identifiés permettront éventuellement d’imiter voire de dépasser de nombreuses composantes de ce que l’on appelle l’intelligence humaine.

L’accélération dans le solaire photovoltaïques semble bien moins forte dans sa dimension technologique. Elle est de toutes manières plafonnée par la quantité d’énergie reçue du soleil au mètre carré. L’accélération des deux dernières décennies provient surtout d’économies d’échelle, de la réutilisation de techniques de fabrication existantes et de la concurrence chinoise qui casse les prix dans tout un tas d’autres catégories de produits, avec ou sans technologies de pointe. Le coût  de fabrication et d’installation des panneaux solaires est moins compressible que celui d’un transistor dans un processeur. La poursuite de l’exponentielle des déploiements viendra beaucoup plus de considérations macro-économiques et politiques que de progrès technologiques. Qu’elle coûtent cher ou pas, les énergies renouvelables comme le solaire PV devront remplacer tôt ou tard les énergies fossiles. Le plus tôt sera le mieux.

Pour le séquençage de l’ADN, il y a aussi beaucoup de progrès technologiques à venir. Ceux-ci seront cependant accélérés par les applications grand-public du séquençage personnalisé et aussi par l’évolution de la compréhension des mécanismes du vivant où l’on a encore fort à apprendre. Le séquençage à $100 dépend donc surtout de l’aval de sa chaîne de valeur. Chronologiquement parlant, on en est un peu au stade des ordinateurs avant l’arrivée de l’Apple II dans les années 1970 et alors que l’industrie du logiciel grand public était balbutiante !

Exponentielles et gaussiennes

Certaines exponentielles dérivent pour devenir des gaussiennes. Etude de cas ultra-classique : le nombre de recherches effectuées sur le terme “myspace” dans Google Search sur une dizaine d’année. Après avoir connu une belle ascension exponentielle entre 2004 et 2006, il s’est mis à se tasser puis à chuter vers 2009, alors que Facebook prenait progressivement sa place comme réseau social le plus utilisé dans le monde.

Les courbes gaussiennes s’appliquent aux taux de pénétration et à l’usage de technologies qui sont inéluctablement remplacées par d’autres technologies. On n’est pas dans une logique de coût ou de performance mais d’usage. Ceci explique donc cela. On retrouve ces courbes dans tous les livres sur l’innovation à commencer par ceux de Geoffrey Moore (Crossing the Chasm, Inside the Tornado, …). Encore un qui a bien choisi son nom ! On a donc des Gaussiennes de Moore !

Myspace gaussienne

La gaussienne est plus ou moins plate et plus ou moins étroite. On peut s’amuser à reconstituer cette courbe pour tout un tas de services en ligne qui ont eu le vent en poupe à un moment donné et ont disparu ensuite, emportés par la vague des phénomènes de mode qui se succèdent. Tout du moins, lorsque leur nom est unique ! Cela évite aux Path, Secret et autres Color de se faire remarquer dans leur chute vertigineuse. On verra par contre plus facilement si cela arrive à Meerkat, l’application mobile de streaming vidéo live dans Twitter. Dans le cas de Fourquare, on a un début d’exponentielle, puis un plateau glissant vers le bas, puis une chute apparente. Il semblerait que le réseau social ait du mal à perdurer après plusieurs pivots et comme on dit “à trouver son modèle économique”, une épithète souvent associable à la difficulté à créer tout simplement de la valeur pour les utilisateurs et/ou des annonceurs.

Foursquare Google Trends

Cela se complique avec la fameuse courbe d’adoption du “hype cycle” du Gartner. La courbe commence avec une exponentielle, puis devient une gaussienne, puis se termine sur une asymptote. La grandeur mesurée ? Les “attentes”, une grandeur qualitative qui n’est pas mesurable très scientifiquement ! Surtout dans la mesure où le Gartner positionne toutes les technologies connues sur la courbe comme si celle-ci était unique. Le Gartner considère de manière un peu péremptoire que toutes les innovations sont inéluctables et qu’elles suivent exactement le même chemin.

Hype-Cycle-General

On trouve aussi de belles exponentielles dans les inénarrables prévisions de chiffre d’affaire des startups dans leurs business plans. Ce sont probablement les exponentielles les plus chaotiques de toutes celles que j’évoque dans ce texte ! Et bien évidemment, elles ne sont pas respectées dans la réalité. Les dérives y sont la norme ! Seuls quelques rares startups arrivent à suivre leurs plans, notamment les “organisations exponentielles“, le nouveau synonyme des unicorns (licornes). Dans le papier sur ces organisations, 10 critères de bon sens sont mis en avant comme ayant été respectés par ces startups à succès. Rien ne dit cependant que ce soit des conditions suffisantes car nombre de startups s’en rapprochent et ne croissent pas pour autant.

On pourrait aussi ajouter les exponentielles croisant l’ego, la compétence et la réussite tout comme la courbe d’évolution de la bêtise humaine exprimée dans les réseaux sociaux, qui est proportionnelle au carré du nombre d’utilisateur. Elle suit en effet très bien la loi de Metcalfe sur la valeur des réseaux.

Other Moore Laws

Le thème est déclinable à l’envie, comme dans le schéma précédent auquel on pourrait ajouter la loi d’Olivia Moore dont les gesticulations augmentent exponentiellement aux débuts de ses sketches puis retombent comme dans une gaussienne ensuite (ci-dessous, dans la Journée de la Femme Digitale en mars 2015 au Palais Brongniart, et elle y était excellente, je ne fais que la taquiner un peu !).

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Olivia Moore (3)
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Olivia Moore et Sylvain Orebi
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Avant le stand-up. On a dit : "pas de grimaces pour les photos... !".
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Excellent stand-up !
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Olivia Moore (1)
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Olivia Moore (36)

So what ?

Pourquoi ai-je donc pondu tout cela ? Pour prendre un peu de recul vis à vis de la vision simpliste du progrès “linéairement exponentiel” en l’illustrant avec trois types de technologies. On pourrait faire de même avec le stockage et les réseaux.

Il est utile de comprendre les tenants et aboutissant des technologies sous-jacentes aux progrès du moment et de faire la part des choses entre les progrès purement technologiques et les aspects économiques ou sociétaux qui accélèrent les progrès.

Il ne faut pas prendre pour argent comptant les visions simplistes et les exponentielles. C’est critique lorsque, par exemple, on lance une startup ou un projet d’entreprise qui table sur des progrès de ce genre. Il faut aussi bien intégrer les phénomènes d’inertie de marché. L’inertie est bien plus grande dans la santé que dans le marché de la mobilité où le matériel est remplacé environ tous les deux ans.

A contrario, il est très utile d’anticiper de manière éduquée les grandes évolutions technologiques qui impacteront une forte proportion des consommateurs et des entreprises. Arriver au bon endroit et au bon moment avec la solution qui exploite à fond les nouvelles technologies permet de profiter de leur courbe d’adoption par le marché. Cela fait partie d’un bon “time to market”.

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Publié le 10 avril 2015 et mis à jour le 26 avril 2015 Post de | Santé | 19552 lectures

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